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Nouvelle Iconographie de La Salpêtrière
 
 L'histoire des neurosciences à La Pitié et à La Salpêtrière J Poirier
The history of neurosciences at La Pitié and La Salpêtrière J Poirier 
 
 
 

mise à jour du
1 août 2010
La guérison par la foi
Jean-Martin Charcot
 
Revue de l'hypnotisme
et de la psychologie physiologique
1893;7:282-284

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charcot
 
M. le professeur Charcot vient de publier dans la New Review un intéressant article dont nous extrayons les pssagea suivants:
 
On peut, dit-il, définir le miracle thérapeutique, et le lois qui président à sa genèse et à son évolution commencent à être suffisamment connues pour que l'ensemble des faits réunis sous cette dénomination soient présentés de manière précise, de manière à ne point échapper à l'appréciation. Nons devons nous féliciter aussi que, grâce à une intelligence plus claire de son pouvoir, les grandes ressources de la guérison par la foi soient chaque jour plus complètement dans notre main: et que, par suite la maladie nous trouve plus fortement armés contre elle.
 
Là se trouvent groupés tous les éléments de la définition que nous nous proposons de discuter. Ce groupement nous conduira à une conclusion que je puis, dès à présent, formuler. La guérison instantanée produite par la foi et connue sous le nom de miracle est simplement, comme le prouve l'immense majorité des cas, un phénomène naturel, commun à toutes les époques, aux procédés les plus différents de la civilisation et dans les religions les plus variées. Il est aussi irrégulier dans ses manifestations et qu'il est généralisé sous toutes les latitudes.
 
Les faits miraculeux out un double caractère : ils naissent d'une disposition spéciale du patient, confiance, crédulité, facilité à la suggestion comme on dit aujourd'hui, toutes circonstances favorables à la guérison par la foi, qui sont du reste, survenues de mille manières différentes
 
D'autre part, le domaine de cette guérison par la foi est limité. Pour produire ses effets, elle ne doit être employée que dans les cas dont le traitement réclame, pour unique intervention, la puissance que l'esprit exerce sur le corps. Par exemple, on ne saurait trouver, dans les annales sacrées, de cures prétendues miraculeuses dans lesquelles là foi ait suffi pour rétablir un membre amputé, tandis qu'au contraire les cas abondent de guérison de paralysies.
 
M. Charcot établit tout d'abord. une importante constatation:
 
Les médecins nommés pour examiner d'un peu près ces miracles. sont obligés de convenir que la disparition soudaine de la paralysie et des convulsions n'est due à aucune cause qui sorte du domaine de la loi naturelle. Ils se contentent de chercher à démontrer que les tumeurs et les ulcères sont marchandise courante dans le royaume de la thérapeutique miraculeuse. Cela même, M. Charcot ne le conteste pas. Il reconnaît que la foi peut, dans certains cas, faire disparaître ulcères et tumeurs; mais il affirme, en revanche, que les lésions de cette espèce,malgré leur dissemblance apparente, sont de la même essence: que la paralysie dont il a été question tout l'heure. La science a démontré que la paralysie et les convulsions. avaient une commune origine hystérique, ce qui revient à leur donner un caractère, non pas organique, mais dynamique; si l'on arrive donc à prouver que les cancers et les tumeurs sont aussi d'origine hystériques et susceptibles du même traitement que la paralysie et les convulsions, c'en sera fini de la théorie des miracles.
 
Que la guérison par la foi, dit M. Charcot, soit religieuse ou laïque, c'est une distinction sans aucune importance : le même travail du cerveau produit dans les deux cas le même effet. Ce qu'on observera pour le second cas peut donc, en tout état de cause, s'appliquer au premier.
 
L'antiquité et le moyen-âge fourmillent d'exemples de cette thaumaturgie, depuis Simon le Magicien jusqu'au prince de Hobenlohe, au commencement de ce siècle, sans parler du diacre Paris, qui jouissait du pouvoir d'accomplir des cures miraculeuses. Et il est curieux de constater avec quelle unanimité ces différents thaumaturges qui, d'ailleurs, appartenaient presque tous à des ordres religieux, fondaient des lieux de pèlerinage, où les miracles continuèrent, bien entendu, à se produire après leur mort. Il est à noter que, dans ces pèlerinages, ce n'est pas la Divinité elle-même qui est invoquée, mais ses prophètes ou ses disciples.
 
Presque toujours, c'est un simple mortel, favorisé de la canonisation pour avoir, réalisé des miracles pendant sa vie. Et souvent, ces thaumaturges eux mêmes avaient été atteints pendant presque toute la durée de leur vie de ces maladies, qu'ils guérissaient si rapidement chez les autres. Saint Français d'Assises. et Sainte Thérèse, dont les pèlerinages comptent parmi les plus renommé pour leurs cures miraculeuses, étaient, à n'en pas douter, des hystériques. Il faut remarquer également que les guérisons par la foi ne produisent pas toute leur intensité dès le premier moment.
 
Et, à ce propos, M.Charcot analyse les phénomènes par lesquels passe le futur miraculé avant le miracle lui-même.
 
Un malade entend parler de guérisons miraculeuses survenues dans tel ou tel pèlerinage. II est rare qu'il résiste à la tentation, de s'y rendre immédiatement. Mais des milliers de difficultés matérielels s'opposent, au moins temporairement à l'acte, à la réalisation de son projet. Ce n'est point une petite, pour un aveugle ou un paralytique, que d'entreprendre un long voyage. Il interroge ses amis. Il demande des détails sur ces cures miraculeuses dont lui a parlé la rumeur publique. Bien entendu, les encouragements lui parviennent de tous côtés, non seulement de son entourage, mais du médecin même qui le soigne et qui se reprocherait d'enlever au malade son dernier espoir, surtout s'il croit le mal guérissable par la foi, remède qu'il n'a pas osé prescrire lui-même.
 
La cure miraculeuse est dès lors commencée et elle poursuit son développement. La conception du projet, sa séparation, le pèlerinage lui-même, deviennent une idée fixe... Dans ces conditions, l'esprit n'est pas long à prendre barre sur le corps. Et quand, après la fatigue d'un long voyage, les patients arrivent au lieu de pèlerinage, ils se trouvent dans un état d'esprit éminemment susceptible de suggestion. « Si l'esprit du malade, dit Barwell, est dominé par cette idée qu'une cure va s'opérer en lui, la cure est opérée par cela même... Un dernier effort, une immersion dans la piscine, une dernière et fervente prière aidée par l'extase que produit la solennité du rite, et la guérison par la foi produit le résultat désiré, et la guérison par la foi produit le résultat désiré. La cure miraculeuse devient un fait accompli.
 
M. Charcot passe ensuite en revue certains cas de guérison par la foi et plus spécialement celui de Mlle Coirin au XVIII°siècle.
 
Au mois de septembre 1716, Mlle Coirin, alors âgée de trente ans, avait fait deux chutes de cheval successives et il en était résulté chez elle-un état pathologique grave. Une première période avait été marqué par des vomissements de de sang et de la prostration. Trois mois après, une énorme glande apparut sur le côté gauche de la poitrine. Cette glande, d'un rouge violet, était dure et douloureuse. Une petite cavité purulente y apparut bientôt, qui ne tarda pas à s'étendre et à augmenter graduellement de surface. Un cancer fut diagnostiqué par le médecin traitant et déclaré incurable. Deux ans plus tard, la paralysie envahit tout le côté gauche du corps. La jambe gauche, violemment contractée, était nettement diminuée de longueur.
 
Le 9 août 1731, quinze ans après le début de la maladie, Mlle Coirin chargea une vieille femme de Nanterre de faire pour elle une neuvaine au tombeau du bien heureux François de Paris, de toucher le tombeau avec une chemise qu'elle lui donna, et de rapporter une motte de tarte prise au même lieu. Ces instructions furent ponctuellement suivies le lendemain dès que la malade fut en possession de la chemise qui avait touché le tombeau du saint, elle put se retourner dans son lit, sans l'aide de personne. Le jour suivant ; elle se hâta d'appliquer la précieuse motte de terre sur le cancer et elle s'aperçut presque immédiatement que la plaie était assainie et commençait à se cicatriser. La paralysie céda peu à peu. Le24 août, elle put sortir, et le 3 septembre, elle fit sa première promenade en voiture.
 
Je confesse, dit à ce propos, M, Charcot, que il y a seulement dix ans, l'explication des divers éléments de ce cas étrange aurait présentée maintes difficultés. La nature hystérique des vomissements de sang et de la paralysie n'aurait fait doute pour personne; mais comment expliquer l'atrophie qui accompagnait la paralysie ? Il est heureusement prouvé aujourd'hui que l'atrophie musculaire est fréquemment constatée dans les cas de paralysie hystérique et de contractions de membres. Il en est de même du prétendu cancer. Chacun sait à présent que les ulcérations persistantes de la peau ne sont pas rares dans les dérangements du système nerveux, comme en témoignent les stigmates de Saint François d'Assises et les ulcères de Louise Lateau.
 
La conclusion découle tout naturellement de ces prémisses. Chez les sujets hystériques, l'influence de l'esprit sur le corps est assez forte pour guérir des maladies que le défaut de connaissances a fait jusqu'à ce jour considérer comme incurables. Tel est le cas des troubles d'origine hystérique qui commencent à peine à être connus, et dans lesquels on range l'atrophie musculaire, l'oedème, le tumeurs ulcérées. Si l'on entend parler de la guérison miraculeuse d'un cancer à la poitrine, ii est permis de rappeler le cas de Mlle Coirin.
 
 
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