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examen 
 "Le vin mêlé avec partie égale d'eau dissipe l'anxiété, le baîllement et le frisson."
Hippocrate, LVI, Maximes et Pensées
 
 
 
 
Biographies de neurologues
 
Nouvelle Iconographie de La Salpêtrière
 
 L'histoire des neurosciences à La Pitié et à La Salpêtrière J Poirier
The history of neurosciences at La Pitié and La Salpêtrière J Poirier 
 

mise à jour du
25 janvier 2009
hippocrate
Hippocrate
île de Cos, 460 av. J.-C. - Larissa, v. 370 av. J.-C.
 
Né d'une famille vouée au culte d'Asclépios, le dieu grec de la médecine, Hippocrate apprend la médecine sacerdotale et l'anatomie auprès de son père, Héraclide. Puis il quitte son île natale et commence un périple qui le mène en Thrace, en Tessalie et en Macédoine. Devenu médecin itinérant, il acquiert une solide réputation en tant que praticien. Il regagne alors Cos et fonde son école vers l'an 420 av. J.-C. Plus tard, il montera une nouvelle école en Tessalie où il mourra vers 370 av. J.-C.
 
Le traité des Vents
Hippocrate se propose de montrer que les maladies, malgré leur diversité apparente, ont toutes une seule et même cause : l'air.
 
Hippocratis medicorum omnium principis
De Flatibus liber
 
Il y décrit la place du bâillement
 
Les aphorismes d'Hippocrate Vigier I 1666  
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texte établi et traduit par Jacques Jouanna
Professeur à la Sorbonne (Paris)
Ed des Belles Lettres
Chapitre I
  1. Parmi les arts, il en est certains qui sont pénibles pour leurs détenteurs mais très utiles pour leurs utilisateurs et qui apportent aux profanes un bien commun mais ne causent aux praticiens que du chagrin.
  2. A une telle catégorie d'arts appartient précisément celui que les Grecs appellent médecine. En effet le médecin voit des spectacles effrayants, touche des choses répugnantes, et à l'occasion des malheurs d'autrui récolte pour lui-même des chagrins. Les malades au contraire échappent, grâce à l'art, aux maux les plus grands, maladies, affliction, souffrances, mort; car c'est à tout cela que s'oppose la médecine.
  3. De cet art, les mauvais côtés sont difficiles à comprendre tandis que les bons côtés sont faciles à saisir. Les mauvais côtés, eux, ne peuvent être connus que par les seuls médecins et non par les profanes ; car ils sont l'affaire non du corps, mais de l'intelligence. En effet, dans tous les cas où le travail de la main est nécessaire, il convient d'en acquérir seulement l'habitude (car l'habitude, quand il s'agit des mains, est l'école la meilleure); en revanche, pour les maladies les plus cachées et les plus difficiles, c'est par le jugement plus que par le savoir-faire que l'on tranche. Or c'est dans ces maladies que l'écart se révèle le plus grand entre la compétence et l'incompétence.
  4. L'une des questions relevant de ce domaine est la suivante : quelle est donc la cause des maladies et quelles sont l'origine et la source des maux à l'intérieur du corps? De fait, si l'on connaissait la cause de la maladie, on serait en mesure d'administrer au corps ce qui lui est utile, en partant des contraires pour s'opposer à la maladie. Cette médecine est en effet la plus naturelle. Par exemple la faim est une maladie ; car ce qui afflige l'homme reçoit précisément le nom de maladie. Quel est donc le remède de la faim? Ce qui supprime la faim. Or cela c'est la nourriture. C'est donc par ce remède-ci qu'ii faut soigner cette maladie-là. Autre exemple : la boisson supprime la soif ; ou encore, la réplétion est soignée par la vacuité, la vacuité par la réplétion, l'exercice par le repos, le repos par l'exercice.
  5. Bref, en un mot, les contraires sont les remèdes des contraires; car la médecine est soustraction et addition, soustraction de ce qui est en excès, addition de ce qui est en défaut. Qui s'acquitte le mieux de cette tâche est le meilleur médecin ; qui en est le plus éloigné est le plus éloigné de l'art. Ces propos ont été prononcés en hors-d'œuvre au discours qui va suivre.
Chapitre II Pour toutes les maladies, le mode d'être est le même, mais c'est la localisation qui diffère. En apparence donc, les maladies n'ont aucune ressemblance entre elles, à cause de la diversité des localisations ; mais en réalité, il n'existe pour toutes les maladies qu'une seule et même forme, une seule et même cause.. Quelle est cette cause? C'est ce que je vais essayer d'expliquer grâce au discours qui va suivre.
 
Chapitre III
  1. Le corps des êtres vivants en général et de l'homme en particulier est nourri par trois sortes de nourritures. Ces nourritures ont les noms suivants : aliments, boissons, souffle. Le souffle à l'intérieur du corps s'appelle vent, à l'extérieur du corps, air.
  2. L'air est un souverain très puissant qui règne en tout et sur tout. Il vaut la peine d'en contempler la puissance. Le vent est un flux et un écoulement d'air. Quand donc l'air en grande quantité provoque un flux puissant, les arbres sont arrachés jusqu'à la racine à cause de la violence du souffle, la mer se gonfle de vagues, des navires de transport d'une taille immense sont projetés en tous sens. Telle est donc la puissance qu'il détient dans ces domaines.
  3. Pourtant il est invisible pour l'œil, mais il est visible pour la raison. Car, quel être pourrait exister sans lui? ou de quel être est-il absent? ou en quel être n'est-il pas conjointement présent? Car tout l'espace entre la terre et le ciel est rempli de souffle. Celui-ci est la cause de l'hiver et de l'été, devenant en hiver dense et froid, et en été doux et serein. En outre, la marche du soleil, de la lune et des astres s'effectue grâce au souffle ; car pour le feu, le souffle est la nourriture; et le feu, privé d'air, ne pourrait pas vivre; en conséquence, ce qui assure au soleil une vie éternelle, c'est l'air qui est éternel et subtil. En outre, la mer participe également au souffle, c'est une évidence. Car les êtres vivants qui nagent ne pourraient pas vivre un instant, s'ils ne participaient pas au souffle ; or, comment pourraient-ils y participer autrement qu'en tirant l'air à travers l'eau et de l'eau? Du reste, la terre est une base pour l'air; l'air est un véhicule pour la terre ; rien n'est vide d'air.
Chapitre IV
  1. Ainsi donc, que l'air est puissant dans l'univers, voilà qui a été exposé. Pour les êtres mortels, maintenant, ce principe est la cause de la vie, et des maladies pour les malades.
  2. Si grand est le besoin du souffle pour tous les corps, que l'homme, s'il était privé de tout le reste, aliments et boissons, pourrait subsister pendant deux ou trois jours, ou davantage, tandis que si l'on fermait les accès du souffle dans le corps, il suffirait d'une petite partie d'un jour pour qu'il meure, tant est grand le besoin du souffle pour le corps.
  3. De plus, alors que pour toutes les activités en général les hommes observent des pauses - car la vie est pleine de changements -, c'est la seule activité qui soit continuelle chez tous les êtres vivants mortels, qui tantôt soufflent l'air, tantôt l'inspirent.
Chapitre V Ainsi donc, que tous les êtres vivants participent grandement à l'air, voilà qui a été exposé. Immédiatement après cela, il faut exposer que la source des indispositions n'est autre, selon toute vraisemblance, que ce principe, quand il est en trop grande ou en trop petite quantité, ou trop amassé, ou quand il est souillé par des miasmes morbifiques en pénétrant dans le corps. 2 Ainsi donc, pour la question prise dans son ensemble, ces remarques me suffisent. Après cela, abordant les faits eux-mêmes dans ce même discours, je vais montrer que les maladies découlent et dérivent de ce principe, dans leur totalité.
 
Chapitre VI
  1. Tout d'abord, je vais commencer par la maladie la plus commune, la fièvre ; en effet cette maladie se tient aux aguets pour s'associer à toutes les autres maladies. Il y a deux espèces de fièvres, pour orienter l'exposé suivant cette voie, l'une commune à tous qui est appelée pestilence l'autre particulière qui survient chez ceux qui ont un mauvais régime. De ces deux fièvres, l'air est la cause.
  2. La fièvre commune à tous doit un tel caractère au fait que le souffle inspiré par tous est identique ; or comme le souffle, qui est semblable, se mêle de façon semblable au corps, les fièvres aussi sont semblables. Mais peut-être objectera-t-on : « Pourquoi donc de telles maladies s'abattent-elles non sur tous les êtres vivants, mais sur une espèce parmi eux? ». Parce que, répondrai-je, le corps diffère du corps, la nature de la nature, et la nourriture de la nourriture. Car les mêmes choses ne sont ni inappropriées ni appropriées à toutes les espèces d'êtres vivants, mais les unes sont utiles aux unes et les autres nuisibles aux autres. Quand donc l'air est imprégné de miasmes qui ont pour propriété d'être ennemis de la nature humaine, ce sont alors les hommes qui sont malades ; mais quand l'air est inapproprié à une autre espèce d'êtres vivants, ce sont alors ces êtres-là qui sont malades.
Chapitre VII.
  1. Ainsi donc, pour les maladies communes, il a été exposé pourquoi, comment, chez qui et d'où elles naissent. Je vais maintenant traiter de la fièvre qui est due à un mauvais régime. Est mauvais un régime de ce genre : d'une part quand on donne au corps plus de nourriture, humide ou sèche, que le corps n'en peut tolérer, sans contrebalancer par aucun exercice la quantité de nourriture, d'autre part quand on ingère des nourritures variées et dissemblables entre elles. Car les aliments dissemblables entrent en dissension, et les uns sont digérés plus rapidement, les autres plus lentement.
  2. Or, avec une grande quantité d'aliments, il est nécessaire que pénètre aussi une grande quantité de souffle ; car avec tout ce qui est mangé et bu, du souffle pénètre dans le corps en plus ou moins grande quantité. La chose est évidente par le fait suivant : des éructations se produisent après l'ingestion des aliments et des boissons chez la plupart des gens. C'est que l'air qui était emprisonné remonte précipitamment, quand il a rompu les bulles dans lesquelles il se cache. Une fois donc que le corps, empli de nourriture, est également rempli de souffle, comme les aliments séjournent plus longtemps - les aliments séjournent car la quantité les empêche de cheminer -, et comme la cavité d'en bas est obstruée, les vents se répandent précipitamment dans l'ensemble du corps. Se jetant sur les parties les plus sanguines du corps, ils les refroidissent. Une fois que ces lieux sont refroidis, là où se trouvent les racines et les sources du sang, un frisson parcourt le corps tout entier; et quand le sang tout entier est refroidi, c'est le corps tout entier qui frissonne.
Chapitre VIII
  1. Voilà donc pourquoi les frissons se produisent, avant les fièvres. De la quantité et du froid des vents qui s'élancent dépend la nature du frissonnement, plus fort quand ils sont plus abondants et plus froids, moins fort quand ils sont moins abondants et moins froids.
  2. Au cours des frissons, il se produit aussi des tremblements du corps pour la raison suivante : le sang fuyant devant la présence du frisson, se rassemble précipitamment et s'élance à travers tout le corps vers ses parties les plus chaudes. Une fois que le sang bondit des extrémités du corps vers les viscères, il y a tremblement. C'est que les parties du corps deviennent les unes pleines de sang, les autres privées de sang. Dès lors, les parties privées de sang, par suite du refroidissement, ne restent pas immobiles, mais s'affaissent ; car le chaud les a quittées. Quant aux parties pleines de sang par suite de la quantité de sang, elles tremblent ; car le sang ne peut, du fait qu'il est devenu abondant, rester immobile.
  3. 3 Des bâillements se produisent avant les fièvres parce que de l'air, qui s'était amassé en grande quantité, remontant en masse, soulève à la manière d'un levier et ouvre la bouche ; car par cette voie, l'air peut sortir facilement. En effet, de même que de la vapeur s'élève des chaudrons en grande quantité quand l'eau bout, de même aussi, quand le corps s'échauffe, l'air qui s'était rassemblé et qui est violemment expulsé s'élance par la bouche.
  4. Quant aux articulations, elles se relâchent avant les fièvres. Car en s'échauffant les tendons se distendent.
  5. Mais une fois que la majeure partie du sang s'est rassemblée, l'air qui avait refroidi le sang se réchauffe à son tour, vaincu par la chaleur. Devenu incandescent et indistinct, il produit de la chaleur dans tout le corps. Et il trouve un allié dans le sang; car le sang se liquéfie en s'échauffant et du souffle s'en dégage.
  6. Quand le souffle se heurte aux parois des passages du corps, la sueur se produit ; car le souffle qui se condense s'écoule en eau, et, empruntant les passages, il débouche à l'extérieur de la même façon que la vapeur qui s'élève d'eaux bouillantes, si elle rencontre un corps solide auquel elle doit se heurter, s'épaissit et se condense, et l'on voit des gouttes tomber des couvercles auxquels la vapeur s'est heurtée.
  7. Les maux de tête qui accompagnent les fièvres sont dus à la cause suivante. L'espace devient étroit pour le cheminement du sang dans la tête. Car les vaisseaux sont remplis d'air. Étant remplis et gonflés ils provoquent le mal de tête. Car le sang, contraint d'emprunter par force des passages étroits, ne peut pas, bien qu'il soit chaud, progresser rapidement : nombreux sont les obstacles et les barrages qui entravent sa marche ; c'est pour cette raison aussi que les battements se produisent dans la région des tempes.
aphorismes
Chapitre IX
  1. Telles sont donc les causes des fièvres ainsi que des douleurs et maladies accompagnant les fièvres. Parmi les autres affections, les ileus, les coliques, les tranchées ou les douleurs fixes sont le fait des vents ; c'est clair, je pense, pour tous". Car dans tous les cas de ce genre il n'y a qu'une seule médication" : retirer du souffle. En effet quand il se jette dans des endroits intacts et tendres, inhabitués et intouchés, s'enfonçant comme une flèche il pénètre à travers la chair. Il se jette parfois sur les hypocondres, parfois sur les flancs, parfois sur les deux à la fois.
  2. C'est pourquoi justement en échauffant par des fomentations externes, on essaie d'amollir l'endroit ; en effet, rendu plus ténu par la chaleur de la fomentation, le souffle se répand dans le corpsz, de sorte qu'il se produit une accalmie des souffrances.
Chapitre X
  1. Peut-être objectera-t-on : comment donc les flux peuvent-ils être également causés par les vents? ou de quelle façon ce principe est-il cause des hémorragies dans la poitrine? Je pense pouvoir montrer que ces affections aussi sont dues à cette cause : quand les vaisseaux de la tête sont gorgés d'air, tout d'abord la tête s'alourdit, car les vents l'oppressent, ensuite le sang tourbillonne car les vents ne peuvent le laisser couler à cause de l'étroitesse des voies ; seule la partie la plus ténue du sang est exprimée par le canal des vaisseaux.
  2. Et lorsque ce liquide s'est amassé en grande quantité, il coule par d'autres passages. Dans la partie du corps où il parvient en masse, là se forme la maladie. Si donc le flux parvient à l'œil, c'est à cet endroit qu'est la souffrance ; si c'est aux oreilles, c'est là qu'est la maladie ; si c'est aux narines, c'est un coryza ; si c'est à la poitrine, on appelle cela «enrouement». Car le phlegme, mêlé à des humeurs âcres, cause, partout où il se jette dans des endroits inhabitués à sa présence, des ulcérations.
  3. Quand un flux se jette sur la gorge, qui est une partie tendre, il y provoque des rugosités. Car le souffle qui est inspiré traverse la gorge pour gagner la poitrine et ressort par cette voie-là. Quand donc le souffle montant rencontre le flux descendant, de la toux survient et le phlegme est rejeté vers le haut. Les choses étant ainsi, la gorge s'ulcère, devient rugueuse, s'échauffe et attire l'humide de la tête, du fait de sa chaleur ; et la tête, puisant (l'humide) dans le reste du corps, le donne à la gorge.
  4. Quand donc le flux s'est habitué à couler par cet endroit et que les passages sont ravinés, il se répand désormais jusque dans la poitrine. Étant âcre et se jetant sur la chair le phlegme l'ulcère' et rompt les vaisseaux. Et quand le sang s'est déversé dans un endroit étranger, il y séjourne, se corrompt, et devient du pus. Il ne peut en effet ni se porter vers le haut ni sortir par le bas : pour ce qui est du haut, il n'est pas facile pour un liquide de progresser en montant4 ; pour ce qui est du bas, la clôture que constitue le diaphragme fait obstacle.
  5. Mais pourquoi donc maintenant le sang qui fait éruption sans qu'il y ait de flux (de phlegme) peut-il faire éruption. Cela se produit soit spontanément, soit à la suite d'efforts ; eh bien donc, l'hémorragie est spontanée lorsque l'air pénètre spontanément dans les vaisseaux et rétrécit l'espace pour le cheminement du sang; à ce moment-là en effet, le sang, qui est comprimé s'accumule et rompt les passages à l'endroit où sa pression est la plus forte. Dans les cas où l'hémorragie se produit à la suite d'une foule d'efforts, dans ces cas également, à cause des efforts, les vaisseaux se remplissent de souffle ; car il est inévitable que la partie qui fait des efforts retienne le souffle. Pour le reste, tout se passe comme dans le cas déjà exposé.
Chapitre XI Les ruptures sont toutes dues à la cause suivante : quand les chairs, sous l'effet de la violence, se déchirent en s'écartant, et qu'à l'intérieur de la déchirure s'insinue précipitamment du souffle, cela provoque de la souffrances.
 
Chapitre XII
  1. Si les vents, pénétrant à travers les chairs, relâchent les passages du corps et si les vents contiennent une humidité, l'air fraie la voie à l'humide. Le corps devenant tout imbibé, les chairs se fondent insensiblement et des gonflements descendent dans les jambes. On appelle une telle maladie «hydropisie»".
  2. Voici une très grande preuve que les vents sont cause de la maladie. On a déjà vu des hydropiques dans un état désespéré, qui furent purgés et vidés de leur eau. Alors, sur le moment, l'eau sortie du ventre parait abondante, mais avec le temps, elle devient moins abondante. Pour quelle raison le devient-elle? Cela aussi est évident. C'est que, sur le moment, l'eau est pleine d'air - or l'air donne un gros volume -, tandis qu'une fois l'air sorti, il ne reste que l'eau seule. Voilà pourquoi l'eau paraît moins abondante, alors qu'en réalité la quantité est égale.
  3. En voici une autre preuve. Une fois que le ventre est complètement vidé, moins de trois jours après, les malades sont à nouveau pleins (d'eau). Qu'est-ce donc qui les a remplis sinon le souffle? En effet, quoi d'autre aurait pu les remplir aussi rapidement? Ce n'est évidemment pas la boisson : elle n'a pas pénétré en aussi grande quantité dans le corps. Ce ne sont pas non plus les chairs : il n'y en a plus qui puissent se liquéfier ; car il ne reste que les os, les tendons et la peau qui ne sauraient être la source d'aucune augmentation d'aucune quantité d'eau.
 Chapitre XIII
  1. Voilà donc exposée la cause de l'hydropisie. Quant aux « apoplexies », elles sont dues aux vents ; car lorsque ces derniers, étant froids et pénétrant en abondance, gonflent les chairs, ces parties du corps deviennent insensibles. Si donc des vents abondants parcourent le corps tout entier, c'est l'individu tout entier qui est frappé d'« apoplexie » ; mais s'ils ne parcourent qu'une partie, c'est cette partie seulement qui est frappée.
  2. Et si ces vents sortent, la maladie cesse ; mais s'ils demeurent, la maladie demeure. La preuve qu'il en est ainsi, c'est que les malades ont constamment la bouche entrouverte.
Chapitre XIV
  1. A mon avis, la maladie dite sacrée est également provoquée par cette cause. C'est avec les raisons mêmes qui m'ont convaincu que j'essaierai de convaincre les auditeurs. J'estime que, chez aucun individu, aucun des composants du corps qui concourent à la pensée n'est plus prééminent que le sang. Tant que ce composant demeure dans son état normal, la pensée aussi demeure. Mais quand le sang subit des modifications la pensée aussi change.
  2. Qu'il en est ainsi, bien des témoignages l'attestent. Tout d'abord, ce qui est commun à tous les êtres vivants, le sommeil, témoigne en faveur de ce qui a été dit ; en effet, quand le sommeil s'empare du corps, alors le sang se refroidit ; car le sommeil a pour propriété naturelle de refroidir. Or, une fois que le sang est refroidi, son cheminement est plus lent. C'est évident : les corps s'affaissent et s'alourdissent, tout ce qui est lourd ayant pour propriété naturelle de se porter vers le bas ; les yeux se ferment, la pensée se modifie et d'autres représentations s'installent, que l'on nomme rêves.
  3. Ou encore dans l'état d'ivresse, comme le sang devient soudain plus abondant, l'âme change ainsi que les pensées de l'âme ; elle devient oublieuse des malheurs présents et pleine de confiance dans les bonheurs futurs. Je pourrais citer bien d'autres cas analogues dans lesquels les altérations du sang altèrent la pensée. Dans ces conditions, si le sang tout entier est totalement troublé, la pensée disparaît totalement ; car connaître et reconnaître sont affaire d'habitude. Quand donc nous sortons de notre état habituel, notre pensée disparaît.
  4. Je prétends donc que la maladie sacrée se produit de la façon suivante : quand le souffle répandu en grande quantité à travers le corps tout entier se mêle au sang tout entier, de nombreux obstacles se forment en de nombreux endroits dans les vaisseaux. Quand donc de l'air, parvenu en grande quantité dans les gros vaisseaux qui contiennent beaucoup de sang, y exerce une pression et y demeure en exerçant cette pression, le cheminement du sang s'en trouve entravé. Dès lors, à tel endroit il est immobilisé, à tel autre il chemine lentement, et à tel autre plus rapidement.
  5. Or, comme la marche du sang à travers le corps devient irrégulière, il se produit des irrégularités de toute sorte (le corps tout entier est tiré de tout côté, et les parties du corps, soumises au trouble et au tumulte du sang, sont secouées) et des contorsions de toute sorte se produisent de toutes sortes de façons. Durant cette crise, les malades sont privés de toute sensation, sourds à ce qui se dit, aveugles à ce qui se produit, insensibles à la souffrance. C'est ainsi que l'air, qui est troublé, trouble le sang et le souille.
  6. De plus, des flots d'écume remontent précipitamment par la bouche, ce qui est naturel ; car l'air, se glissant par les vaisseaux « sphagitides ». Il, remonte lui-même, et fait remonter avec lui la partie la plus fine du sang. Or l'humide, mêlé à l'air, blanchit ; car travers de fines membranes, l'air, qui est pur, transparaît ; voilà pourquoi les flots d'écume paraissent tout à fait blancs.
  7. À quel moment donc ceux qui sont en proie à ce mal sont-ils libérés de la maladie et de la tourmente présente, je vais l'expliquer : quand le corps, qui a pris de l'exercice par suite des efforts, s'est échauffé, le sang aussi s'échauffe ; le sang, une fois qu'il est bien échauffé, échauffe les vents ; ceux-ci, une fois qu'ils sont bien échauffés, se dispersent et dispersent l'accumulation du sang tandis qu'ils sortent en partie avec la respiration, en partie avec le phlegme. Une fois que l'écume est sortie en bouillonnant, que le sang s'est apaisé, que le calme est revenu dans le corps, la maladie cesse.
Chapitre XV
  1. Il est donc clair, grâce à toutes ces considérations, que les vents sont les agents les plus actifs. Tout le reste n'est que cause concomitante et cause secondaire. Que la cause des maladies réside là, je l'ai démontré.
  2. J'avais promis d'expliquer la cause des maladies. J'ai montré que le souffle exerce sa souveraineté sur l'univers et sur les êtres vivants. J'ai fait porter mon discours sur les maladies et les affections connues, pour lesquelles ma thèse s'est révélée vraie. Si je parlais de toutes les affections, mon discours deviendrait plus long, mais il n'en serait nullement plus exact ni plus convaincant.
 
De la superfétation Oeuvres d'Hippocrate E. Littré 1853
 
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