mystery of yawning
Le bâillement, du réflexe à la pathologie
Le bâillement : de l'éthologie à la médecine clinique
Le bâillement : phylogenèse, éthologie, nosogénie
 Le bâillement : un comportement universel
La parakinésie brachiale oscitante
Yawning: its cycle, its role
Warum gähnen wir ?
 
Fetal yawning assessed by 3D and 4D sonography
Le bâillement foetal
Le bâillement, du réflexe à la pathologie
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La parakinésie brachiale oscitante
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Warum gähnen wir ?
 
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Le bâillement foetal
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Biographies de neurologues
 
Nouvelle Iconographie de La Salpêtrière
 
 L'histoire des neurosciences à La Pitié et à La Salpêtrière J Poirier
The history of neurosciences at La Pitié and La Salpêtrière J Poirier 
 
 
 

mise à jour du
21 octobre 2012
« Néron, Prince de la Science »
Berthe de Courrière
1852-1916
 
Mercure de France, n° 46, octobre 1893, pp. 144-146

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Quoi qu'il fut le fils de simples gens, il portait en lui les tendances qui cractérisèrent la plupart des Césars romains, ceux qui furent des modèles de férocité.
 
De bonne heure, il sentit les besoins de son être, mais comme le Destin ne lui avait pas donné le Monde pour jouet, il chercha comment les satisfaire.
 
La tyrannie, telle qu'elle fut pratiquée autrefois, n'étant plus possible, il fallait trouver d'autres moyens d'être tyran.
 
Et il trouva sans hésitation. Guidé par un sûr instinct, il choisit la seule carrière moderne où la cruauté peut s'exercer sans contrôle et sans limite, avec la certitude de l'impunité et les garanties du Pouvoir.
 
C'était un nouvel avatar du despote cruel.
 
Autrefois, les Rois qui abusèrent de leur puissance ne le firent pas sans danger, et plus d'un paya de sa vie les autres vies qu'il avait supprimées sans ménagement et sans justice.
 
Pour cela, comme pour le reste ce qu'on appelle le Progrès avait marché, et l'Homme était resté le même. Seulement il avait revêtu d'un manteau d'hypocrisie ses instincts toujours aussi lâches.
 
Les Cruels étaient toujours cruels. Mais, instruits par l'histoire, ils avaient appris à craindre les représailles des persécutés et à les éviter.
 
Ils ne cherchaient plus à être souverains. C'était trop dangereux: habiles comme les félins donc il portait les tendances, ils avaient trouvé le moyen de les satisfaire impunément, sous le nom de Religion, de Vertu, de Science et d'Amour de l'Humanité.
 
Et ne pouvant plus être tyrans avoués, ils le furent de fait, sans le titre.
 
Longtemps, ils trouvèrent dans la situation de Prince de l'Eglise un vaste champ où s'exercer.
 
Il serait inutile de rappeler les noms de tous les tortionnaires qui, sous prétexte d'orthodoxie, torturèrent avec délices leurs bien-aimées victimes. Quoiqu'ils se dirent ses Prêtres, jamais le Christ ne les connut pour siens, ces loup dévorants.
 
Puis, cette forme de la Puissance s'épuisant par ses propres excès, la révolution vint à point fournir de nouveaux sujets aux perpétuels bourreaux.
 
Mais, si il fut plus intense que nul autre, ce règne de la cruauté n'eut que son heure. Et, le cycle fermé, la marche ordinaire des choses ayant repris son cours, les appétits durent se couvrir d'un autre masque.
 
Les prétextes de Religion et de Vertu était épuisés. Alors parut celui qui devait être la nouvelle Incarnation de la Férocité.
 
Il se réclamait de l'Amour de la Science, et sous prétexte de l'enrichir de nouvelles lumières, il tortura impunément et joyeusement les Etres qui tombèrent en son pouvoir, bénévolement se livrèrent à lui et cela avec d'autant plus de délectations qu'il ne fut jamais troublé par aucune inquiétude, ayant non seulement la certitude de l'impunité, mais des disciples empressés à célébrer les louanges du maître,- du bourreau.
 
Et il marcha ainsi dans la vie glorieuse et incontestée; il avait su atteindre le suprême pouvoir: celui d'échapper à toute critique.
 
Jamais il ne se démentit, remplissant son rôle jusqu'au bout. Car, pour être complet, il fut cabotin. Et, à sa dernière heure, lui aussi eût pu crier: « Qualis artifex pereo ! ».
 
Il avait inventé le Sadisme scientifique.
 
L'avignonnais, son précurseur, s'était contenté de faire rôtir à la broche de vulgaires filles enrubannées de faveurs roses, ce qui lui valut d'être enfermé dans une maison de fous.
 
Il fallait éviter une semblable fin.
 
Il se fit le soi-disant médecins des déments; il monopolisa l'aliénation, et, servi pour de nombreuses et incontestables facultés, comme Néron sur sa tour, d'où, au son de la Lyre, assistait à l'embrasement de Rome, il monta à un tel sommet qu'il fut inaccessible à l'examen des hommes.
 
Il soutint son personnage avec tant d'art que personne ne put le pénétrer, et connaître que la fascination qu'il exerçait sur ses malades était le résultat même de l'intensité même de sa maladie: il avait le délire de la torture.
 
Et ainsi il fut Néron, et si bon comédien que nul ne s'en doute.
 
Bernadette de Courrière
17 août 1893

Alfred Jarry parle de Berthe...
 
Pour ceux qui, par exception, n'auraient pas fréquenté Berthe de Courrière, remémorons vite qu'elle était de taille imposante ; qu'elle chaussait du 42 fillette mais préférait porter des cothurnes; qu'elle naquit à Lille en 1852, et non point Berthe, mais plus simplement Caroline, Louise, Victoire, et dépourvue de particule qui, du reste, n'a jamais constitué une preuve de noblesse (pensez aux Chabot, une des plus anciennes familles de l'aristocratie française).
 
Berthe, lancée fort jeune à la conquête de Paris, se glissera dans le lit du général Boulanger et de quelques ministres. Le sculpteur, en ce temps-là fort réputé, Jean-Baptiste, dit Auguste (quelle idée !) Clésinger, natif &emdash; en 1814 &emdash; de la vieille ville espagnole de Besançon, adorateur des grosses formes, remarquera Berthe, la fourrera sur sa couche, en fera son modèle pour quantité de personnages allégoriques, notamment la Marianne du Sénat &emdash; laquelle subsiste &emdash; et la République gigantesque de l'exposition universelle de 1878 qu'il nous fut interdit de voir, faute d'en avoir l'âge, et dont nous ignorons le sort.
 
À sa mort, en 1883, Clésinger dotera Berthe d'une assez jolie fortune. Quatre ans après son veuvage &emdash; qui ne fut sûrement pas une période de viduité &emdash;, elle rencontre un jeune hobereau décavé, fonctionnaire à la Bibliothèque Nationale, Remy de Gourmont, de six ans son cadet. Il vivra chez elle jusqu'à sa mort en 1915 ; Berthe le suivra de près (14 juin 1916) et le rejoindra dans le caveau de Clésinger au Père-Lachaise où, en toute impudeur, elle avait fait déposer Gourmont.