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Biographies de neurologues
 
 L'histoire des neurosciences à La Pitié et à La Salpêtrière J Poirier
The history of neurosciences at La Pitié and La Salpêtrière J Poirier
 
   
Charcot JM The topography of the brain Forum 1886
Charcot JM Magnetism and hypnotism Forum 1889
Charcot JM Hypnotism and crime Forum 1890  
 
 
 
 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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mise à jour du
12 décembre 2002
Nouvelle Iconographie
de La Salpêtière
1890
tome 3
 
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 Contribution à l'étude des bâillements hystériques
GE Gilles de la Tourette, Huet, Guinon
 
Bâillements chez un épileptique Charles Féré 1888
Professeur Jean Martin Charcot
L'atelier photographique de JM Charcot à La Salpêtrière
Traité clinique et thérapeutique de l'hystérie d'après l'enseignement de La Salpêtrière 1895
Nécrologie de Gilles de la Tourette dans la Nouvelle Iconographie de la Salpêtrière 1904
G. Gilles de la Tourette interne de JM. Charcot

Chat-logomini

 
baillement-gilles de la tourette
 
JM Charcot et une patiente ataxique 1875 la seule photo connue de Charcot avec un malade
 
L'étude des bâillements hystériques est de date récente, car nous ne connaissons aucun travail sur ce sujet avant la Leçon du mardi 23 octobre 1888, dans laquelle M. le professeur Charcot présenta aux auditeurs de la Clinique la malade qui fait l'objet de notre première observation.
 
Avant cette date, les recherches bibliographiques que nous avons faites sont restées muettes sur cette manifestation dont nous pouvons aujourd'hui rapporter, cinq observations, y compris celle qui sert de base à la leçon de M. Charcot. Trois d'entre elles ont été recueillies, dans le service de la Clinique. Nous pouvons en conclure, en nous basant surtout sur le grand nombre d'hystériques qui fréquentent la Salpêtrière, que c'est là une manifestation assez rare de la névrose. A ce titre, ces phénomènes méritaient d'être le sujet d'un travail d'ensemble dans lequel nous rapporterons les opinions de notre éminent maître, les corroborant par les nouveaux faits que nous avons recueillis.
 
Nous ne pouvons cependant passer sous silence un travail de M. Ch. Féré, publié ici mème, sur les "Bâillements chez un épileptique" , dans lequel cet auteur distingué parle également du bâillement chez les hystériques. « Ce phénomène, dit-il, est fréquent dans les psychoses à forme dépressive, dans l'hypocondrie, la mélancolie; on le voit aussi dans l'hystérie. Dans cette dernière névrose, il peut tenir au ralentissement général des phénomènes nutritifs ou constituer une sorte de spasme. »
Le passage est trop court pour nous fournir des matériaux à utiliser dans une description; nous emprunterons toutefois à ce travail les éléments d'un diagnostic différentiel. Aussi bien, du reste, n'est-ce pas presque toujours avec l'épilepsie que le diagnostic s'impose lorsqu'il s'agit de manifestations hystériques ?
 
Nous ajouterons qu'il ne s'agira pas dans notre description des bâillements qui peuvent survenir dans l'hystérie comme dans tout autre état pathologique ou même physiologique, mais bien de phénomènes relevant directement de la névrose au même titre que la toux, la dyspnée, la chorée rhythmée qui, du reste, comme l'a montré M. le professeur Charcot, s'entremêlent parfois avec la manifestation pathologique dont nous allons parler.
 
policlinique 23 octobre 1888
II
On peut concevoir que les bâillements soient la première révélation de l'hystérie, mais cela ne ressort pas de nos quatre observations ou toujours ils ont été précédés d'autres phénomènes ne laissant aucun doute sur l'état pathologique du sujet. Ces manifestations antérieures peuvent être fort variées, on s'en fera, du reste, une idée par la lecture des quatre cas suivants, particulièrement du premier et du troisième qui furent pendant longtemps l'objet d'une observation attentive.
 
Obs I. Ler..., Augustine, dix-sept ans, domestique, est entrée le aoùt 1888, à la Sapêtrièrej service de la Clinique des maladies du système nerveux.
 
Antécédents héréditaires. - Père inconnu. ~ Mère, trente-cinq ans, domestique, est nerveuse, vive et emportée~ mais n'a jamais eu d'attaques de nerfs. Les grands-parents maternels ne paraissent pas avoir eu d'antécédents nerveux. Une tante, âgée actuellemenent agée de vingt quatre ans, a eu, à dix-huit ans, « une maladie de nerfs » caractérisé par un hoquet persistant qui a duré trois mois; elle n'a jamais eu d'attaques convulsives. Une autre tante (trente et un ans) et deux oncles (dix-neuf et sept ans) sont bien portants.
 
Antécédents personnels. - La malade a été élevée à la campagne chez sa grand'mère, jusqu'à l'âge de quatorze. ans. Son développement, pendant la première enfance, paraît avoir été régulier jusqu'à l'âge de trois ans. Depuis cet âge, jusqu'à huit ans, elle a eu fréquemment des attaques convulsives revenant par moments presque tous les jours et même plusieurs fois par jour. Elle tombait, perdait connaissance, mais d'après ce qu'elle a entendu raconter, elle se débattait peu, tout son corps se raidissait et la face était violacée; pas de morsure de langue, pas de mictions involontaires. A huit ans, elle eut une série d'attaques plus longues, ayant duré plus de vingt-quatre heures. Un peu plus tard, elle fut atteinte d'une chorée qui dura trois mois. A cette époque, les personnes qui la soignaient eassayèrent à plusieurs reprises d'arrêter les mouvements choréiques en lui attachant les bars, mais ces manoeuvres n'eurent pour résultat que de déterminer des attaques convulsives avec perte de connaissance. Un an après, elle fut reprise de chorée, pendant le même temps environ. De neuf à dix sep ans, Ler... n'a pas eu d'attaques et est restée indemme de manifestations morbides. Elle n'a jamais eu de rhumatisme.
 
Elle était, depuis l'âge de quatorze ans, domestique chez une vieille dame aux environs de Paris, lorsque, vers le commencement du mois de mai de cette année elle fut prise, sans cause appréciable, d'enrouement en même temps que d'une toux quinteuse et continuelle. L'enrouement était très prononcé et la voix se trouvait presque entièrement voilée. La toux sèche et quinteuse persistait pendant toute la journée, puis disparaissait pendant la nuit pour réapparaître le matin au réveil. Néanmoins la malade avait un sommeil très agité et tombait souvent de son lit, mais elle ne saurait dire si, à ce moment, elle vait des attaques convulsives. Comme ces troubles persistaitent, elle se décida, au bout de quinze jours, à consulter un médecin. Parmi diverses médications employées, des injections sous-cutanées, d'éther, dit-elle, pratiquées tous les deux jours, ont réussi seules à calmer sa toux mais seulement pour quelques heures, ou pour un jour entier au plus. L'enrouement disparut bientôt et, quelque temps après, la toux se calma; mais, vers le commencement de juin, apparut un bâillement continuel, entrecoupé par moments de quintes de toux, semblable à celui qui persiste encore aujourd'hui.
 
En outre, dans le courant de juillet, elle fut prise d'anorexie s'accompagnant de vomissements dès qu'elle essayait de prendre quelque nourriture. Toutefois, l'intolérance de l'estomac pour les aliments n'était pas complète; si, après avoir vomi ce qu'elle venait de prendre, elle persistait à manger, l'estomac conservait alors les aliments. (on la nourrissait presque exclusivement, à ce moment avec du lait et de la poudre de viande.)
 
Cette anorexie et ces vomissements cessèrent bientôt, au bout d'une quizaine de jours; mais comme les bâillements persistaient et ne se trouvaient pas modifié par aucune médication, pas même les injections sous-cutanées, qui précédemment avait arrêté pour un instant les quintes de toux., ma malade se présenta au commencement de mois d'août à la consultation de La Salpêtrière et fut admise dans le service de la Clinique.
 
Actuellement, le phénomène prédominant est le baîllement, qui se continue san trêve pendant la journée entière et ne cesse que pendant le sommeil. Par moments, les bâillements sont entrecoupés de quintes de toux. Le rythme respiratoire se trouve complètement modifié et la respiration ne s'effectue pendant plusieurs minutes consécutives que par des bâillements seuls ou par des bâillements entrecoupés de secousses de toux. Les tracés suivants, recueillis avec le pneumographe de Marey, permettent de se rendre compte de ces modifications.
 
Sur la figure 37, le mode respiratoire a été inscrit pendant quatre minutes consécutives. Pendant les deux premières minutes, représentées par les deux lignes inférieures (la figure représente 32 secondes de chacune de ces minutes), la respiration normale est remplacée par des bâillements. Pendant les deux autres minutes (voir les deux lignes supérieures), des secousses de toux apparaissent entre les bâillements.
 
Sur la figure 38, les secousses de toux sont encore bien plus marquées. Les bâillements, comme on peut le voir sur les tracés qui précèdent ou sur ceux qui suivent, sont parfois simples, c'est-à-dire figurés par une seule inspiration suivie bientôt d'une expiration brusque, mais, le plus souvent, ils sont composés par deux ou plusieurs mouvements inspiratoires successifs, séparés par une expiration incomplète.
 
Ils s'accompagnent rarement de pandiculations; seulement la malade porte fréquemment l'une ou l'autre main devant sa bouche pour masquer son bâillement.
 
Il existe des stigmates permanents de l'hystérie : anesthésie totale du bras droit; anesthésie de la moitié droite du tronc, en arrière seulement; rétrécissement concentrique du champ visuel à 40°, des deux côtés; dyschromatopsie pour l'œil droit : le rouge et le jaune sont seuls nettement perçus; abolition presque absolue du goût et de l'odorat des deux côtés; diminution de la sensibilité pharyngée; diminution de l'ouïe du côté droit; douleur provoquée par la pression de la région ovarienne gauche.
 
La malade a été réglée pour la première fois à l'âge de treize ans; depuis cette époque, les règles ont été régulières jusqu'au début des accidents actuels, mais elles n'ont pas paru depuis le mois d'avril. Il n'existe cependant aucun signe de grossesse.
De taille moyenne, elle conserve un embonpoint modéré et un bon état de la santé générale malgré les troubles anorexiques et les vomissements dont elle a souffert pendant quelques semaines avant son entrée.
 
1er septembre. - Les bâillements persistent à peu près aussi fréquents et conservent les mêmes caractères; toutefois les secousses de toux nerveuse qui les accompagnaient souvent sont devenus beaucoup plus rares.
 
Le tracé suivant (fig. 39), représente la respiration de la malade pendant 8 minutes consécutives (chaque ligne correspond à 32 secondes de chacune de ces 8 minutes). Il montre que la respiration s'effectue uniquement par bâillements; les intervalles séparant les bâillements sont marqués presque tous par une apnée complète en expiration, durant de 2 à 7 et 9 secondes. Il existe en moyenne de sept à huit bâillements par minute. - Le pouls est régulier mais peu fréquent, cinquante-six pulsations par minute, aussi bien avant qu'après l'inscription du tracé.
 
Dès les premiers jours de sa présence à la Salpêtrière, on a remarqué des crises un peu spéciales, revenant irrégulièrement à deux ou trois jours d'intervalle, et se montrant principalement après les quintes de toux: la malade s'endort tout à coup, le corps et les membres sont raides et contracturés, et elle reste inconsciente pendant un temps variable de un quart d'heure à une on deux heures. Elle présente souvent du délire, pendant quelques minutes, au moment où elle se réveille,
Depuis quelques jours les crises sont plus complètes et se rapprochent davantage de l'attaque d'hystérie ordinaire. E]les sont annoncées actuellement par un sentiment d'étouffement ou par la sensation d'une boule montant de l'épigastre à la gorge ; en même temps, la malade entend des bourdonnements dans les oreilles, puis elle perd connaissance.
Des convulsions cloniques assez étendues apparaissent alors, puis l'attaque se termine habituellement par un sommeil analogue à celui des crises précédentes. D'autres fois, les bâillements représentent de véritables crises précédées des phénomènes d'aura que nous venons d'indiquer. Pendant ces crises, on observe presque toujours un mélange de quelques autres phénomènes appartenant à l'attaque ordinaire : raideur des bras avec contracture, secousses classiques des quatre membres, demi-conscience au réveil avec léger délire.
 
Les mêmes stigmates que ceux qu'elle présentait à son entrée existent toujours.
 
15 octobre Les troubles précédents se sont notablement amendés. La malade reste de plus en plus longtemps sans être prise de ses bâillements; lorsque ceux-ci reviennent, ils sont moins fréquents et surtout il existe entre chaque bâillements des mouvements respiratoires ordinaires se rapprochant plus ou moins de la respiration normale. Les deux tracés suivants forunissent la preuve.
 
La figure 40 représente la respiration de la malade inscrite pendant 5 minutes consécutives (chaque ligne reproduite correspond à 49 secondes de chacune de ces minutes). Il existe encore quelques bâillements séparés par une apnée complète en expiration; mais entre la plupart des autres, les mouvements respiratoires reparaissent; peu nombreux et superficiels par moments, ils sont par d'autres, plus fréquents et plus amples bien que encore assez irréguliers.
 
La figure 41 présente les mêmes caractères, avec cette différence toutefois qu'en plusieurs endroits, les mouvements respiratoires sont plus réguliers et se rapprochent davantage des mouvements respiratoires normaux, comme on peut s'en assurer en jetant les yeux sur la figure 42. celle-ci représente la respiration d'une autre hystérique du service. Ici les mouvements respiratoires sont normaux, plus fréquents cependant que d'ordinaire, en raison de l'émotovité très grande de cette malade; ils présentent aussi, par intervalles assez longs, des inspirations plus profondes et supplémentaires (soupirs). Nous reproduisons encore ici fig 43, à titre de comparaison le tracé de bâillements produits chez une hystériques, mise en présence de la malede qui fait l'objet de cette observation, après avoit été placée en état de somnambulisme provoqué. bien que ces bâillements produits par imitation représentent assez bien, à première ve, les baillements de la malade, le tracé y décèle des différences notables: les baîllements y sont presque tous uniques, composés d'un seul temps et non deux ou trois bâillements secondaires, comme chez la malade; de plus, l'inspiration et l'expiration sont séparés par un plateau inspiratoire assez prolongé.
 
La malade a quitté la Salpêtrière, le 31 octobre 1888, à peu près guérie de ses bâillements. Ceux-ci ne reviennent plus qu'à de longs intervalles et par accès assez courts. En dehors de ces accès, la respiration est redevenue normale. Les quintes de toux ont disparu depuis longtemps. Les crises convulsives sont aussi devenues très rares, mais les stigmates hystériques, que nous avons signalés plus haut persistent.
 
Le traitement suivi a consisté en électrisation statique, hydrothrapie, et, à l'intérieur, préparations ferrugineuses. -
 
baillements hystériques
 
Obs. II. - Mme X... vingt-cinq ans, vient à Paris consulter le Dr Auvard, pour des troubles utérins (octobre 1888).
La mère de la malade a des crises d'hystérie. - A partir du moment, où elle a commencé à être réglée, Mme X... a souffert de douleurs très vives dans le bas-ventre à chaque période menstruelle. De plus elle riait et pleurait sans motifs d'une façon excessive.
 
Elle s'est mariée il y a deux ans, et est accouchée il y a huit mois d'un enfant bien portant. Pendant sa grossesse sont survenus chez elle des accidents nerveux variés. Elle avait parfois la sensation d'une boule qui lui remontait jusqu'à la gorge; elle avait alors des sifflements d'oreille, des battements dans les tempes; il lui semblait qu'elle allait défaillir. Parfois alors survenait une attaque véritable avec cris, contorsions, etc.
 
Quelque temps après l'accouchement, survint un gonflement du ventre avec douleur dans le flanc gauche. Ce gonflement d'abord intermittent devint ensuite permanent et la malade se croyant atteinte d'une péritonite ou d'une affection des organes génitaux vint consulter le Dr Auvard qui, ne trouvant aucune altération de ces organes et pensant à des troubles purement nerveux voulut bien demander à M. Gilles de la Tourette d'examiner la malade avec lui.
Nous constatons chez Mme X... une hémianesthésie gauche incomplète avec perte du sens musculaire de ce côté, sensation de pesanteur des membres gauches qui sont faibles; la main gauche laisse parfois échapper l'objet qu'elle tient. Ovarie gauche.
 
Mais, ce qui frappe le plus vivement notre attention, ce sont les bâillements réitérés qui affectent la malade pendant la durée de notre examen. À des intervalles très rapprochés, elle porte la main à sa bouche essayant de retenir un bâillement qu'elle ne peut vaincre. Interrogée par nous au sujet de ces bâillements, elle nous dit que depuis trois mois environ, elle est obligée de bâiller sans cesse toute la journée.
 
Ces bâillements sont régulièrement espacés, au nombre de douze par minute, tout au moins pendant la durée de notre examen ; queluefois ils sont incomplets, ce qui, dit la malade, la fatigue beaucoup. Elle semble éprouver une sorte de soulagement lorsque le bâillement est franc et large. Ces bâillements ne sont pas accompagnés de pandiculations.
 
Obs. III. - La nommée Rosalie Gay...-. (pl. XVII) est entrée à la Salpètrière au mois d'avril 1890. Elle est âgée de vingt-trois ans et exerce le métier de couturière.
 
Antécédents héréditaires. - 1°) Côté paternel. Son père est atteint d'une maladie de cœur. Il est sujet à de violentes colères. Son grand-père est mort fou et sa grand'mère avait des attaques de nerfs. 2°) Côté maternel. - La mère est emportée, coléreuse, elle n'a jamais eu d'attaques de nerfs. La grand'.mère est peu connue. Le grand-père est mort d'accident. La malade a une sœur qui est bien portante.
 
Antécédents personnels. Elle a eu la rougeole étant enfant. Vers douze ans, elle eut une bronchite et en depuis cette époque, elle fut sujette a des crises nerveuses précédées d'étourdissement et accompagnées de perte de connaissance. Ces attaques ne duraient que peu de temps. La malade poussait des cris aigus, se plaignait d'une violente douleur au cœur et à l'estomac. De plus les membres supérieurs étaient agités de mouvements convulsifs d'une certaine violence. Ls crises revenaient périodiquement deux ou trois fois par mois.
 
Plus tard, elles augmentèrent de fréquence et d'intensité et, en février 1886, elle fut soignée à la Salpêtrière dans le service de M le Dr Joffroy qui la soumit à un traitement hydrothérapique. Elle sort de l'hôpital en juillet de la même année; les crises nerveuses n'étaient point guéries. Elles persistèrent ainsi jusqu'au commencement de 1889.
 
À cette époque, la malade, voyant que tous les traitements employés restaient sans résultat, eut l'idée d'aller consulter le zouave Jacob. Elle se rendit chez cet individu quatre fois. A la quatrième fois, il parvint, dit-elle, à l'endormir; mais, à la suite de cette séance, elle eut une grande crise de nerfs pendant laquelle se manifestèrent pour la première fois des bâillements incoercibles tels qu'on les remarque aujourd'hui. Pendant cette première attaque, il y eut une courte période de convulsions avec perte de connaissance, puis les bâillements se succédèrent et durèrent environ une demi-heure.
Depuis lors, les attaques se sont succédées très fréquentes et très lentes. La malade dit en avoir de deux espèces différentes, les simples, les autres avec bâillements.
 
Les premières, en réalité les mêmes que celles dont elle souffrait depuis l'âge de douze ans, reviennent toujours deux ou trois fois par mois La malade peut les prévoit, près de douze heures à l'avance, car elles sont précédées, pendant tout ce temps, de vives douleurs dans la tête. Elle ne tombe pas par terre, mais reste dans la position où elle se trouve, cache la figure avec ses mains et pousse des cris aigus. En même temps, des mouvements choréiformes rhythmiques agitent les membres en particulier les membres inférieurs. Le pied frappe violemment le sol. De temps en temps interviennent des mouvements de salutation rhythmés, assez lents, d'une violence modérée.
 
Les attaques n' 2 au contraire des précédentes, qui ne se reproduisent guère que de temps en temps, surviennent avec une très grande fréquence, sous l'influence de la moindre contrariété.
 
Elle ressent, avant ces crises, au niveau de l'estomac, une sensation de boule qui remonte vers la gorge, l'étouffe et l'empêche de respirer. Puis elle se met à bâiller d'une façon convulsive et incoercible pendant un temps qui peut dépasser une demi-heure.
 
Pendant ce temps, la connaissance est absolument conservée. La malade entend ce qu'on dit, mais ne peut répondre, car elle ne cesse de bâiller et ses muscles abaisseurs et élévateurs de la mâchoire sont alternativement dans un véritable état de contracture. Puis surviennent quelques mouvements rhythmiques des membres supérieurs et inférieurs, ainsi que des mouvements lents de salutation. La malade se penche en avant et finit par se trouver complètement pliée en deux, la poitrine contre les genoux.
 
Enfin les bâillements reviennent, mais moins violents, quoique tout aussi incessants qu'au début de l'attaque. Ils permettent cependant à la malade de marcher et même de vaquer à ses occupations tout en bâillant ainsi pendant un temps qui peut être assez long.
 
Etat actuel. - Les stigmates hystériques ne sont pas très développés, mais suffisants néanmoins pont, confirmer le diagnostic. La sensibilité est conservée dans tous ses modes à droite. Elle es légèrement diminuée à gauche. Il existe une légère hyperesthésie pour la chaleur au niveau de la cuisse gauche. L'odorat, normal à l'examen, est, dit-elle, obnubilé certains jours lorsqu'elle doit avoir sa crise n°1. - L'ouïe est normale.
 
La perception de sensations gustatives est notablement moins vive sur la moitié droite de la langue que sur l'autre moitié. Il existe un retrécissement concentrique un peu irrégulier du champ visuel des deux yeux.
 
La malade porte plusieurs points hystérogènes caractéristiques, l'un dans la fosse iliaque droite, l'autre dans la même région à gauche. Il existe aussi un point sous mammaire du côté gauche. Les points ovariens arrêtent assez facilement l'attaque. Ils la repoduisent aussi quelques fois, mais non toujours. De plus, une simple émotion, par exemple le fait d'entrer dans l'amphitéâtre des leçons à la Salpêtière, pour y être présentée par M. le professeur Charcot à ses auditeurs, suffit pour provoquer une attaque.
 
Il est bon de dire que les attaques ne sont pas toujours aussi nettement séparées que leur description, telle que nous l'avons donnée, pourrait le laisser croire. Les deux se mélangent souvent. Cela est même arrivé pour la plupart des attaques que nous avons observées. L'attaque simple se manisfeste seule quelques fois; mais, le plus souvent, actuellement du moins, elle est suivie ou précédée de l'attaque de bâillements.
 
Ce ne sont point des bâillements ressemblant exactement à ceux que l'on a l'habitude d'observer chez les personnes normales. Il y a chez cette jeune fille une exagération de l'acte physiologique telle qu'elle n'a pu, sans la moindre difficulté, prendre à l'aide de procédés qui n'ont rien d'instantané, les photographies qui ont servi à établir la planche ci-contre. L'exagération en effet n'est pas seulement dans la répétition fréquente des bâillements, mais dans l'intensité extraordinaire et la durée de chacun d'eux. C'est véritalement dans un cas semblable que l'expression «bâiller à s'en décrocher la machoire» paraîtrait justifiée.
 
Ce bâillement convulsif diffère encore du bâillement physiologique par un autre point : il n'est point accompagné de cette inspiration profonde, proportionnelle en général, dans l'état normal, à l'intensité du bâillement. Quand elle a la bouche ouverte, la malade est en inspiration, et elle ne fait point d'expiration pendant tout le temps qu'elle reste ainsi. Mais il s'agit là d'une inspiration ordinaire, ne soulevant pas le thorax outre mesure. D'ailleurs, quand la malade ouvre la bouche, commençant un bâillement, on n'entend point le bruit, si caractéristique et si difficile à masquer dans l'état physiologique, qui accompagne l'entrée brusque d'un grande quantité d'air dans la poitrine. A la fin du bâillement, l'expiration qui le termine est en proportion de l'expiration qui en a marqué le commencement, c'est à dire forte et souvent un peu bruyante à l'état normal. Chez notre malade, on note aussi une expiration forcée, souvent accompagnée d'un "Ah!", comme bâillerait un individu mal élévé. Mais cela ne se remarque point toujours et la plupart du temps la bâillement de la malade n'est point sonore.
 
Obs.IV.- Mlle Léontine M..., dix neuf ans, se présente à la consulation externe de la Clinique des maladies du sytème nerveux, avril 1890.
 
Antécédents héréditaires. Père cinquante deux ans, rhumatisant. Mère quarante huit ans, rhumatisante, ayant eu des attaques étant jeune. Soeur morte à dix neuf ans d ela fièvre typhoïde. Elle a eu des attaques. Une autre soeur nerveuse, rit et pleure sans motifs. frère apathique, inintelligent.
 
Antécédents personnels. Histoire de la maladie. La malade a été règlée à douze ans, assez régulièrement, si ce n'est que depuis quelques temps elle perd beaucoup plus. Elle n'a jamais eu de maladies antérieures, notamment jamais de danse de Saint-Guy.
 
Depuis environ un an elle s'est surmenée beaucoup. Elle est modiste, et elle a dû veiller tard. Le soir, quand elle rentrait très fatiguée, elle bâillait. Mais à ce moment ces bâillements n'avaient rien de morbide. Elle avait très sommeil, en même temps elle était très fatigué : son bâillement s'expliquait.
 
Ce n'est que plus tard que ses bâillements sont devenus une véritable infirmité. Ils prennent la malade parfois le matin mais le plus généralement le soir vers 8 heures. Ils sont très longs, et la malade ne peut les arrêter. Ils sont précedés d'une aura qui l'avertit que la crise va la prendre. Elle sent sa poitrine se serrer, une boule qui remonte à la gorge et l'étouffe. Elle a en même temps des bourdonnements et de sifflements dans les oreilles, les tempes battent avec force.
A ce moment, elle éprouve à l'épigastre une douleur plus ou moins violente, avec sensation d'une poche énorme, faisant glou-glou et lui semblant remplie de liquide.
 
Le bâillement arrive, répété, impossible à arrêter et durant parfois une demi-heure et plus. En même temps, elle est très altérée.
 
Ces crises la prennent régulièrement deux ou trois fois par semaine, de 6 à 8 heures du soir. Elles rompent néanmoins parfois leur régularité et sont matinales.
 
A la suite du bâillement survient une attaque convulsive caractéristique; elle étend les bras, les tourne en pronation, sa mâchoire inférieure tremble au point de l'empêcher de parler correctement. Ce tremblement s'étend jusqu'aux mains et aux membres inférieurs. La malade dit même avoir perdu connaissance plusieurs fois pendant ces crises; on n'a pas pu avoir de détails sur ces pertes de connaissance, savoir si elle s'est étendue en arc de cercle, etc.
 
La malade a de fréquents cauchemars la nuit. Elle tombe dans la Seine, elle descend plusieurs marches et tombe soudain dans un trou, etc. Il a été impossible d'assister à une de ses crises de bâillements.
 
A l'examen, la malade se présente assez intelligente; elle accuse une habitude assez bizarre pour son sexe, elle s'exercer à soulever des poids; son sternum est couvert de pytiriasis versicolor. Pas de réflexe pharyngien, pas de troubles de la sensibilité générale. Champ visuel normal à droite, à gauche 60. Un peu de micromégalopsie du côté droit. La malade voit nettement les couleurs. Goût aboli à droite. Ouïe très légèrement diminuée à droite. Sens musculaire intact.
 
Obs. V. - La nommée Marguerite Mon..., âgée de trente ans, employée, se présente à la consultation de la Clinique des maladies du système nerveux, au mois de mai 1890.
 
Antécédents héréditaires. - Son père est mort de la rupture d'un anévrysme. Il était rhumatisant. La malade assure qu'il n'avait jamais souffert d'aucune maladie nerveuse ou mentale. Il était parfaitement sobre et n'avait jamais exercé de métier où il pût être soumis à aucune intoxication. Sa mère est morte à l'âge de cinquante-cinq ans, à la suite d'un accident. Elle était nerveuse, sujette à des colères violentes. La grand'mère maternelle est morte paralysée ; mais on ne peut avoir de renseignements précis sur la nature de cette paralysie.
 
Antécédents personnels. - Rien de bien remarquable pendant l'enfance. La malade a eu la coqueluche, la rougeole deux ou trois fois (?) et un zona (?). Elle a eu de la gourme étant petite. Elle est d'un tempérament lymphatique.
 
Réglée à douze on treize ans, elle l'est assez régulièrement depuis cette époque.
Elle est d'un caractère violent et emporté. La moindre remontrance la met en colère. Elle est aussi très émotive et très impressionnable.
 
Il y a cinq ou six ans elle eut les jambes enflées pendant quelques jours. En même temps, elle souffrait de douleurs vagues qui changeaient continuellement de place, siégeant tantôt dans le ventre, tantôt dans la poitrine, d'autres fois dans la tête ou dans les reins. On ne peut guère être renseigné par elle sur la nature de ces douleurs. Elle a toujours été sujette à des fleurs blanches très abondantes.
 
Depuis longtemps déjà, elle ne peut préciser exactement l'époque où ces troubles ont débuté, elle éprouve de petites pertes de connaissance, soit spontanées, soit provoquées par une contrariété ou une émotion. A peu près au même moment où on commencé ces pertes d econnaissance, elle s'est mise à bâiller d'un façon anormale, convulsivement et sans raison. Ces bâillements dont la répétition, en dehors de toute cause, constituait déjà un symtôme morbide se produisaient tantôt spontanément, la malade bâillait alors oute la journée sans savoir pourquoi et sans pouvoir s'en empêcher; d'autres fois les bâillements étaient provoqués par une émotion ou une contrariété, ils étaient dans ce cas beaucoup plus intenses et beaucoup plus fréquents.
 
Etat actuel. la malade a l'apparence d'une femme faible anémique. Son teint est pâle, ses conjonctives décolorées légèrement ainsi que ses lèvres et ses gencives. Elle est très impressionnable. Pendant que nous l'examinons, nous la voyons bâiller trente ou quarante fois devant nous. Elle bâille, dit-elle, parce qu'elle éprouve une sensation d'étouffement qui la force à faire de grandes inspirations en ouvrant la bouche. Elle sent comme une boule qui lui remonte de l'estomac dans la gorge et l'étouffe. Il ne s'agit pas ici d'une véritable attaque d'hystérie caractérisée par un phénomène inusité, le bâillement, mais d'un mouvement involontaire presque continuel, dû à une sensation identique à l'aura ordinaire de l'attaque d'hystérique. Il est impossible d'obtenir de renseignements détaillés sur ces pertes de connaissance dont souffre la malade et de savoir si elles sont ou non accompagnées de convulsions ou de bâillements. On apprend cependant qu'elles sont précédées d'une aura analogue à l'aura de l'attaque vulgaire : contraction de la gorge, battements dans les tempes, sifflements dans les oreilles. Il est donc certain qu'il s'agit là véritablement de petites attaques d'hystérie.
 
La malade se plaint en outre de phénomènes dyspeptiques assez accentués. Son ventre est ballonné après les repas, et, à ce moment, elle souffre de battements de cœur assez violents. La digestion est lente, laborieuse. Elle s'accompagne souvent de crampes d'estomac violentes, quelquefois d'une espèce de vertige, n'allant jamais, il est vrai, jusqu'à la chute sur le sol. Elle mange très peu et éprouve dégoût pour les aliments.
 
Les stigmates de l'hystérie sont très peu accentués chez cette malade. Il existe néanmoins un léger trouble de la sensibilité dont la présence acquiert ici une grande importance, en l'absence de de tout phénomène morbide autre que les petites pertes de connaissance et les bâillements que nous avons déjà mentionnés. La sensiblité au contact est conservée sur toute la surface cutanée, ainsi que la sensibilité au chaud et au froid. Mais il n'en est pas de même pour la sensibilité à la douleur et il existe sinon une analgésie, du moins une diminution notable de la sensibilité à la figure et dans toute la moitié droite du corps.
 
De plus, en constate la présence de deux points hyperesthésiques, l'un dans la région ovarienne droite, l'autre sous le sein gauche. La pression en ces points, si elle ne provoque pas d'attaque proprement dite, donne lieu néanmoins à la production de l'aura hystérique : douleur au cœur épigastrique, constriction du pharynx, sensation de boule remontant de l'estomac à la gorge.
 
Pas de troubles sensoriels. La vue est parfaitement conservée et on ne note pas le plus léger rétrécissement du champ visuel ni à droite ni à gauche. Pas non plus de dyschromatopsie ni de micromégalopsie, ni de polyopie monoculaire. Le goût, l'ouïe et l'odorat sont absolument normaux.
 
Les poumons sont entièrement sains. On note, à l'auscultation du cœur, la présence d'un très léger souffle anémique.
 
III
 
Les bâillements hystériques peuvent se présenter à l'observateur, en dehors ou concurremment avec d'autres phénomènes hystériques, sous deux aspects différents.
 
Dans le premier, la malade, - car nos cas se rapportent uniquement à des femmes - se met tout à coup à bâiller, et les bâillements sont surtout remarquables, à l'investigation superficielle tout au moins, par leur persistance même. La malade de l'observation 1, avant de présenter des crises véritables de bâillements, deuxième forme de cette manifestation, bâillait pour ainsi dire constamment : « A l'origine, dit M. Charcot, elle bâillait environ huit fois par minute, 480 bâillements par heure, soit 7 200 en quinze heures de veille. »
 
Dans ces cas, le sommeil seul interrompt les bâillements qui reprennent au réveil et peuvent ainsi persister pendant des semaines et des mois sans que la santé générale semble en souffrir.
 
A cette période, ou même lorsque les bâillements revètent cette allure, il est, croyons-nous, assez facile de les différencier des bâillements physiologiques et aussi de ceux, qui, physiologiquement pour ainsi dire peuvent survenir dans l'hystérie comme au cours de tout autre état normal ou pathologique.
 
Nous avons noté la fréquence, nous noterons encore et surtout «le rhythme et la cadence, caractères propres à nombre de phénomènes hystériques» (Charcot).
 
De plus, le bâillement physiologique consiste en une inspiration profonde : le thorax est alors à son summum d'ampliation, les mâchoires sont écartées au maximum; il se termine par une expiration bruyante qui s'accompagne souvent de flux de salive et de sécrétion de larmes. Souvent aussi, on note des pandiculations qui ne sont autres que des mouvements d'élévation et de rétraction en arrière des épaules.
 
Or, on peut voir sur nos tracés, particulièrement surla figure 40, que l'inspiration dans le bâillement hystérique n'est guère plus profonde qu'une inspiration normale. Peut-être cela tient-il à ce que les bâillements sont tellement répétés que la malade n'a pas besoin de subvenir a l'hématose insuffisante que provoquerait - à ce que l'on croit - le bâillement physiologique. Parfois, en effet, ils se rapprochent tellement qu'il semble que ce soit le mode habituel de respirer des sujets (fig. 39). Nous noterons aussi que les bâillements s'accompagnent ou même s'entrecoupent de quintes de toux (fig. 38), phénomènes de même ordre.
 
Ce qui est exagéré par exemple, ainsi qu'on peut s'en convaincre sur la planche XVIII, c'est l'amplitude de l'écartement des mâchoires porté à son maximum.
 
Le bâillement considéré en soi peut être simple, unique, mais aussi il peut être double, se faire en deux fois, c'est-à-dire être formé de deux inspirations assez rapprochées pour constituer un seul et même bâillement (fig. 40).
 
Il peut être avorté; dans ce cas la malade de l'observation III accusait une sensation de malaise ; il fallait que le bâillement fût complet pour que l'organisme se déclarât satisfait. On note, en effet, que les bâillements s'accompagnent souvent, comme à l'état physiologique d'ailleurs, d'une sensation de soulagement.
 
IV
 
Les crises de bâillemenis hystériques ne diffèrent pas, comme allure générale, des autres manifestations convulsives limitées ou généralisées de l'hystérie se groupant sous forme d'attaques. Il existe dans tous ces cas un fond commun qui se juge par les phénomènes prémonitoires de l'accès, par les signes et symptômes constitutifs de l'aura.
 
Avant la crise, ou même lorsque celle-ci va venir, la malade accuse une sensation de boule qui remonte de l'épigastre; elle a des bourdonnements d'oreilles, des battements dans les tempes; puis, après un temps variable, éclatent les bâillements sous forme d'accès.
 
Ils se précipitent alors beaucoup plus rapidement que dans la forme précédemment décrite, empiétant les uns sur les autres pendant un temps plus ou moins long, un quart d'heure, unedemi-heure et plus suivant les cas. Puis la crise se termine, les bâillements cessent pour passer à l'état intermittent ou revenir ultérieurement sous forme d'une nouvelle crise.
 
Il est bien rare que la crise de bâillements soit absolument pure de tout mélange des phénomènes ordinairement observés lors dela grande attaque. On sait en effet, - M. Charcot l'a montré, - qu'un observateur attentif retrouve presque toujours dans les crises convulsives limitées, chorée rhythmée, toux, dyspnée hystérique, des vestiges des quatre périodes classiques.
Outre les phénomènes prémonitoires de l'aura qui sont communs, il est fréquent d'observer au début de l'attaque des contractures des membres supérieurs on inférieurs, contractures qui, de toniques, ne tardent pas à devenir cloniques. Enfin, lorsque la crise se termine, le regard devient fixe, la physionomie reflète des sentiments représentatifs des attitudes passionnelles et de la quatrième période ou de délire. La prédominance des bâillements fixe seule la forme de l'attaque.
Parfois l'attaque de bâillements peut se terminer par une véritable attaque convulsive ordinaire, les bâillements représentant alors la phase tonique de l'accès ; quelquefois, cependant, on voit alterner: sans se confondre (obs.III), les attaques convulsives proprement dites et les attaques de bâillements.
 
Le diagnostic différentiel des bâillements ne nous arrêtera pas longtemps ; presque toujours il existe concurremment des stigmates qui, en dehors des bâillements eux-mêmes, ne permettront pas au diagnostic de s'égarer. Mais enfin on peut supposer que ce soit là une rnanifestation monosymptomatique de l'hystérie. Dans ce cas, la question du diagnostic différentiel peut se poser. Lorsque les bâillements ne sont pas groupés sous forme d'attaques, le rhythme et la cadence sont des éléments différentiels de premier ordre qui ne paraissent pas exister dans les bâillements épileptiques jusque-là seulement observés dans les intervalles des accès (Féré).
 
Dans le cas de crises, on peut faire intervenir un élément d'appréciation qui permettrait, très probablement, d'établir un diagnostic certain avec les accès de bâillements épileptiques qui, comme nous l'avons dit, n'ont pas encore été observés. Ce critérium est tiré de l'analyse des urines.
 
On sait en effet que MM. Gilles de la Tourette et Cathelineau, ont établi par des recherches entreprises dans le service de M. le professeur Charcot, que l'analyse des urines de la période des vingt quatre heures comprenant l'attaque, donne des résultats qui permettent d'établir que l'attaque a eu lieu.
 
Dans ces cas, l'attaque se juge par l'abaissement du résidu fixe, du taux de l'urée, et par l'inversion de la formule des phosphates, à, savoir que les phosphates terreux qui, normalement, sont aux phosphates alcalins comme 1 est à 3, deviennent comme 1 est à 2, 1 est à 1 et même quelquefois plus.
 
Or, l'attaque de bâillements hystériques ne fait pas exception à cette règle.
Il suffit, pour s'en convaincre, de considérer le tableau suivant relatif aux attaques de la malade dont l'histoire est rapportée dans notre première observation.
 
« Les considérations précédentes, disent MM. Gilles de la Tourette et Cathelineau en parlant de l'attaque convulsive, sont également applicables aux bâillements hystériques, forme rare de l'attaque. Dans un cas que nous avons observé et qui nous a fourni huit analyses dont quatre de la période d'attaque, l'état normal hystérique caractérisé par les stigmates permanents était également entrecoupé par des bâillements espacés, la période d'accès se caractérisant par quelques-uns des prodromes de l'attaque ordinaire suivis d'une série de bâillements précipités, convulsifs, se groupant sous forme d'attaque. Or, nous notons encore dans cette période d'accès comparée à la période d'état normal un abaissement du volume, une diminution du résidu fixe, de l'urée et de l'acide phosphorique total avec inversion de la formule, absolument comparables à ce qui s'observe dans la période des vingt-quatre heures correspondantes de l'attaque convulsive proprement dite. »
 
Il est à noter que les bâillements qui surviennent à l'état isolé sans se grouper sous forme d'attaques n'influencent pas les phénomènes nutritifs. Il faut, pour les bâillements comme pour les autres manifestations hystériques, qu'il y ait crise pour que les modifications se produisent. Nous insistons sur ces données chimiques, car si le doute pouvait exister entre les attaques de bâillements hystériques et les accès de bâillements épileptiques, l'analyse des urines trancherait vite la question, étant donné, ainsi que l'ont démontré MM. Lépine et Mairet, que l'accès d'épilepsie, à l'inverse de l'attaque d'hystérie augmente considérablement le taux du résidu fixe et particulièrement de l'urée sans inversion de la formule des phosphates.
Terminons en disant que, ainsi que l'avait fait M. Charcot à son cours, nous avons pu reproduire par imitation ces bâillements chez une hystérique mise en somnambulisme hypnotique. Dans ce cas, ainsi qu'on pourra le voir sur le tracé (fig. 43), l'amplitude de l'inspiration constitutive de ces bâillements simulés nous a paru se rapprocher beaucoup plus de l'amplitude du bâillement physiologique que de celle du bâillement hystérique proprement dit.
 
Gilles De La Tourette, Huet, Guinon Clinique des maladies du système nerveux. 1890
 
Lire : "Hystérie : l'iconographie de La Salpêtrière artistes et modèles "
M Corcos P Clervoy Revue du Praticien 1995; t 45; p 1205-1207
 
Bâillements chez un épileptique Charles Féré (1852 -1907) Nouvelle iconographie de La Salpêtrière 1888 (vol 1, n°4, p163-169)
 
La maladie de Gilles de la Tourette
GE Gilles de la Tourette La maladie des tics convulsifs (pdf)
Contribution à l'étude des bâillements hystériques Nouvelle Iconographie de La Salpêtrière1890
Traité clinique et thérapeutique de l'hystérie d'après l'enseignement de La Salpêtrière1895
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La nécrologie La Presse Médicale 4 juin 1904
La nécrologie Nouvelle Iconographie de la Salpêtrière 1904
The forgotten face of Gilles de la Tourette: practitioner, expert, and victim of criminal hypnotism at the Belle Époque Bogousslavsky J Walusinski O
Criminal hypnotism at the Belle Époque : The path traced by Jean-Martin Charcot and Georges Gilles de la Tourette Bogousslavsky J Walusinski O Veyrunes D
Correspondance inédite de G. Gilles de la Tourette, sa maladie fatale Walusinski O. Duncan G
Correspondance inédite de G. Gilles de la Tourette avec JM. Charcot et G. Montorgueil Walusinski O. Duncan G
Vivre ses écrits, l'exemple de G. Gilles de la Tourette Walusinski O. Duncan G
G. Gilles de la Tourette 1857-1904 in english
L'état mental de Froufrou G. Gilles de la Tourette 1892
Mademoiselle Bottard par G. Gilles de la Tourette 1898
couverture
Hypnotisme and crime Charcot JM 1890 
gazette hebdomadaire médecine
 

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Marguerite Bottard (1822-1906) sa biographie et la lettre inédite de G. Gilles de la Tourette Walusinski O. PDF