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Biographies de neurologues
 
Nouvelle Iconographie de La Salpêtrière
 
 L'histoire des neurosciences à La Pitié et à La Salpêtrière J Poirier
The history of neurosciences at La Pitié and La Salpêtrière J Poirier
 

mise à jour du
8 septembre 2002
pages 267-268
Lexique
photos de Nadar
Le tic non douloureux
 
Armand Trousseau (1801-1867) Clinique médicale de l'Hôtel-Dieu de Paris 1868 Paris J-B. Baillière éd.
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Je ne parle pas des tics douloureux, de la chorea nevralgica, de la névralgie épileptiforme dont je vous ai assez longuement entretenus dans une de nos précédentes conférences, je parle du tic non douloureux qui consiste en des contractions instantanées, rapides, involontaires, généralement limitées à un petit nombre de muscles, habituellement aux muscles de la face, mais pouvant aussi en affecter d'autres, ceux du cou, du tronc ou des membres. Il n'est personne qui n'ait eu occasion de rencontrer des individus qui en sont affectés. Chez l'un, c'est un clignotement des paupières, un tiraillement convulsif de la joue, de l'aile du nez, de la commissure des lèvres, qui donne au visage un air grimaçant ; chez un autre, c'est un hochement de tete, une contorsion brusque et passagère du cou se répétant à chaque instant; chez un troisième, c'est un soulèvement d'épaule, une agitation convulsive des muscles abdominaux ou du diaphragme; c'est en un mot, une variété infinie de mouvements bizarres qui échappent à toute description.
 
Affection chronique par excellence, faisant pour ainsi dire partie de la constitution de celui qui en est atteint et qui souvent est le seul à ne pas s'en apercevoir, elle guérit difficilement; mais, chose singulière, elle est susceptible de changer de place. Lorsque, par un traitement et par une sorte de gymnastique appliquée aux muscles qui en sont le siège, on est parvenu à faire cesser un tic, c'est pour le voir reparaître bientôt ailleurs; celui qui l'avait à la face, par exemple, s'en débarrassant, mais en le prenant dans le bras, dans la jambe. J'étais consulté dernièrement par un jeune Anglais qui m'était adressé de Dieppe et dont le tic consistait dans des mouvements convulsifs et violents de la tête et de l'épaule droite. Après s'être soumis pendant un certain temps à la gymnastique ordonnée que je lui conseillai de faire, son tic cessa du côté qu'il occupait depuis si longtemps, mais il ne tarda pas à reparaître dans l'épaule gauche. Vous vous rappelez ce que j'entends par gymnastique ordonnée; elle consiste à exécuter avec les muscles affectés de la convulsion des mouvements commandés, et à les exécuter d'une façon régulière, en suivant une mesure que donne, par exemple, le mouvement d'un métronome ou d'un balancier d'horloge.
 
Ces tics sont en quelques cas accompagnés d'un cri, d'un éclat de voix plus ou moins bruyant, très-caractéristique. Et à ce propos, je rappellerai le fait que j'ai bien des fois raconté d'un de mes anciens camarades de lycée, que j'avais reconnu, à vingt ans d'intervalle, pendant qu'il marchait derrière moi, à l'espèce d'aboiement que je lui avais entendu pousser autrefois, alors que nous faisions ensemble nos études. Ce cri, ce jappement, cet éclat de voix, véritables chorées laryngées ou diaphragmatiques, peuvent constituer tout le tic. Ce sont non-seulement un éclat de voix, un cri étrange, c'est encore une tendance singulière à répéter toujours le même mot la même exclamation; et même l'individu profère à haute voix des mots qu'il voudrait bien retenir.
 
Ces tics sont bien souvent héréditaires. J'ai vu, chez moi, en consultation, une dame de la Bourgogne atteinte de tic de la face, ses trois filles avaient, comme elle, des tics musculaires de diverses parties du corps et la pauvre mère, vivement affligée de l'infirmité de ses trois filles, ne s'apercevant pas qu'elle en fût atteinte elle-même, leur reprochait leurs mouvements nerveux avec une amertume qui me paraissait au moins étrange. Cette hérédité se traduit d'une autre façon. En interrogeant avec soin les individus affectés de tics, on trouve quelquefois dans les ascendants ou dans les collatéraux des névroses bien différentes. Tout récemment je voyais un enfant de quatorze ans; atteint de tics extrêmement violents; il jetait sa tête de côté par un mouvement giratoire des plus brusques, en poussant un petit cri aigu; je l'avais vu pendant l'été de 1860, poussant des cris féroces d'instants en instants, sans que son intelligence semblât le moins du monde troublée. Ce triste état qui avait duré plusieurs mois, n'avait paru s'amender que sous l'influence de l'atropine. Son frère aîné, pendant plusieurs années avait eu un tic du visage caractérisé par des grimaces pendant lesquelles tous les muscles de la face étaient violemment convulsés. Le père de ces deux jeunes gens a, depuis vingt ans, une ataxie locomotrice; leur grand-père paternel s'est suicidé à la suite d'un accès de monomanie, et il y a eu plusieurs aliénés dans la ligne maternelle.
 
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 A functional neuroanatomy of tics in Tourette syndrome
E Stern, D Silbersweig
Arch Gene Psychiatry 2000;57:741-748
 
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