Ce patient a proposé
spontanément son cas sur le site
http://www.baillement.com, puis ce
témoignage été
complété par des questions plus
précises recueillies secondairement et
mises en forme.
Monsieur X, 41 ans, architecte, pèse
120 kg pour 181 cm (IMC = 37). Depuis plusieurs
années, il se plaint :
"Toujours débordé, toujours
distrait par ce qui se passe autour de moi,
impulsif et constamment impatient, je ne
m'estime guère. Je commence beaucoup de
choses, mais ne termine rien. Certains efforts,
qui semblent si simples à réaliser
pour la majorité, sont tout simplement
impossibles pour moi comme une forme de
dépression légère,
véritable procrastination pour tout ce
qui me gêne.
J'ai toujours bâillé
très fort, avec de terribles
étirements bruyants, ce qui est
très gênant en public. Ma femme me
conseillait de faire attention, d'y mettre un
peu plus de bonne volonté pour
paraître moins incivil avec mes
interlocuteurs. Mais c'était plus fort
que moi et je ne parvenais pas à me
contrôler malgré toute ma bonne
volonté. Je me sentais en même
temps "nul" puisqu'incapable de me
contrôler. La conduite automobile me
faisait terriblement bâiller à m'en
décrocher la mâchoire.
Je dormais et dors encore de sept à
huit heures par nuit, avec des longs
endormissements, agités de pensées
filantes sans suite ni cohérence. Je n'ai
jamais ressenti de somnolence le jour mais
constamment l'impression d'être
immensémet fatigué, et ce, depuis
la petite enfance. J'ai eu des
difficultés à l'école et on
avait parlé de dyslexie à mes
parents.
Mon impression était que mon esprit
était toujours actif et agité mais
sans que mon corps suive. Je n'ai jamais eu
d'endormissement inapproprié le jour. Je
sais que je rêve mais je ne me souviens
jamais de ces rêves.
Dans mon métier, je craignais
toujours de n'être pas à la
hauteur, d'être pris en défaut. Je
n'ai jamais eu d'autres soucis de santé
et ne prenais pas de médicaments. Je me
rends compte maintenant que j'avais une tendance
à la boulimie, mangeant comme deux ou
trois personnes, avec, très souvent, du
grignotage entre les repas.
Je n'ai jamais compté mes
bâillements mais ils étaient
extrêmement fréquents, souvent en
salves de 3 à 10 successifs, sans horaire
précis dans la journée. Par
contre, dès que je devais me concentrer
intellectuellement, ne serait-ce qu'en
discutant, je me mettais à bâiller
bruyamment, souvent en m'étirant si fort
que les crampes suivaient aussitôt. Je
n'en ressentais aucun bien-être, mais une
gêne importante. Ils étaient
toujours involontaires et rebelles à ma
volonté. Je ne pouvais jamais les
empêcher. Je n'ai jamais ressenti de
satisfaction ou de plaisir à
bâiller, comme cela est souvent
décrit, mais plutôt une sensation
de honte.
Je n'ai jamais perçu de liens entre
mes bâillements fréquents et mon
appétit ni d'horaires liés au
repas. De même, je n'ai jamais
remarqué de bâillements qui
auraient pu avoir un rapport avec la
sexualité.
Ce qui était flagrant, c'était
ma sensibilité aux bâillements des
autres. J'y étais constamment sensible,
immédiatement, quelles que soient les
circonstances ou leurs horaires dans la
journée.
Mon médecin de famille, qui me
connaît depuis 20 ans m'a, à
plusieurs reprises, conseillé de
consulter un psychiatre. Il voulait s'assurer
que je ne était pas atteint d'un "trouble
par déficit de l'attention avec ou sans
hyperactivité" ou TDHA. Je ne me suis
décidé que longtemps après
son conseil en ayant entendu une émission
de radio au cours de laquelle les
témoignages exprimés recoupaient
beaucoup de mes troubles. Pourtant, ce jour
-là personne n'avait parlé de
bâillements. J'ai passé des tests
dans un CHU de la ville de B. Le psychiatre m'a
dit que j'avais tous les symptômes, comme
"à livre ouvert". J'ai eu trois nuits
d'enregistrements du sommeil (hélas, je
n'en ai pas les comptes-rendus). Il m'a
conseillé un traitement avec le
méthylphénidate
(ritaline®).
Depuis que je suis sous Ritaline, ma vie est
changée et ma femme peut me dire si je
suis sous l'effet du médicament ou pas.
Certains jours, je pars très tôt
travailler. Je me lève à 5h00 et
j'arrive à 6h45 au bureau. Je prends
alors ma première dose de Ritaline. Dans
l'auto sur le parcours avant d'arriver, il
m'arrive de bâiller et de m'étirer
à m'en déclencher des crampes.
Dès que je prends la Ritaline, c'est
fini, je fais parfois encore quelques petits
bâillements. J'essaye même de
bâiller très fort, il n'y a plus
rien qui vient.
Le soir, lorsque la Ritaline a fini ses
effets, je peux recommencer à
bâiller à m'en décrocher la
mâchoire et je m'étire à en
attraper, à nouveau, des crampes.
Quand je suis sous Ritaline et que j'essaye
de bâiller très fort, c'est tout
bonnement impossible. J'obtiens juste un petit
rictus aux commissures des lèvres.
Je suis, depuis lors, beaucoup moins
sensible aux bâillements des autres. Je le
suis encore, mais pas comme avant : moins
souvent et surtout je ne fais que de petits
bâillements isolés.
Je suis passé du statut de grand
bâilleur à celui de petit
bâilleur. J'ai l'impression de
bâiller comme le commun des mortels. Je
n'ai plus besoin de m'étirer aussi fort
et aussi bruyamment, malgré moi. La
vie a changé en bien mieux. Je ne me
sens plus "nul". Je mange moins et ne grignote
plus. Dans mon cas, le bâillement ne
signifiait pas un manque d'intérêt,
au contraire; assez paradoxalement, il montrait
mon intérêt, mon cerveau y mettait
toute son énergie et demandait plus de
neurotransmetteurs (?). Mais cela, personne
ne pouvait le comprendre, pas moi-même
à cette époque là. Je me
culpabilisais et c'est tout.
Depuis cette métamorphose, j'ai
interrogé, sur un site internet
consacré à ce trouble, d'autres
personnes souffrant des même
symptômes. Voici deux témoignages
recueillis auprès de mamans d'enfants de
dix et douze ans:
1°) J'ai souvent remarqué qu'il
avait une forte tendance à bâiller
au moment des devoirs et à
s'étirer. Hier à l'école,
les professeurs m'en faisaient la remarque et
pensaient qu'il ne dormait pas assez.
Effectivement, il dort peu, mais je ne peux pas
dire, dans son cas, que ce soit la ritaline qui
en soit la cause, il en a toujours
été ainsi.
2°) Mon aîné est, en
effet, tout le temps en train de s'étirer
et de bâiller. Cela nous agace, mon mari
et moi. Effectivement, cela peut avoir un lien
avec la maladie car vous me faites penser que,
depuis qu'il prend de la ritaline, ses
étirements sont plus rares.
J'ai découvert le lien entre dopamine
et bâillement en lisant un entre-filet
dans la revue "Réponse à tout" du
mois d'août 2006. Il était
écrit que le bâillement et la
dopamine étaient liés. J'ai donc
fait des recherches très succinctes sur
Google et je suis tombé sur votre article
"Et bâiller de plaisir..." sur
www.futura-sciences.com qui m'a renvoyé
au site http://www.baillement.com. Je souhaitais
vous faire part de mon témoignage. En
espérant que cela puisse vous aider dans
vos recherches futures. Bonne continuation dans
vos recherches. Meilleures salutations".
Commentaires:
Si l'on admet que le syndrome de
déficit de l'attention est un trouble de
l'éveil au niveau de la
réticulée activatrice du tronc
cérébral, l'apport exogène
d'un agoniste aminergique stimule l'éveil
cortical. Dans deux autres états
pathologiques, des bâillements
répétés apparaissent:
1°) à la phase aiguë d'un
accident vasculaire cérébral du
territoire sylvien;
2°) au décours d'une crise
épileptique partielle temporale. Ne
faut-il pas trouver là une homologie
?
Quand le tronc cérébral tente
de communiquer avec les structures cortico
sous-corticales susjacentes sans obtenir de
feed-back, les structures stimulant
l'éveil augmentent leur activité
pour tenter d'activer les fonctions
supérieures. Le bâillement
apparaît alors comme la seule
extériorisation motrice témoignant
de ce processus adaptatif, homéostasique.
Dans le cas de notre témoin, l'activation
pharmacologique aminergique thérapeutique
est efficace, rendant l'aisance cognitive et
réduisant les bâillements et
pandiculations. Dans les trois articles
référencés ci-dessous, les
bâillements sont rapportés comme un
signe clinique d'un défaut d'éveil
et d'attention.
Brumback RA.
Weinberg's syndrome: a disorder of attention and
behavior problems needing further research.
Child Neurol. 2000;15(7)478-480.
Koch P. Variation
of behavioral and physiological variables in
children attending kindergarten and primary
school. Chronobiol Int. 1987;4(4):525-535.
Weinberg WA,
Brumback RA Primary disorder of vigilance: a
novel explanation of inattentiveness,
daydreaming, boredom, restlessness, and
sleepiness. J Pediatr. 1990;116(5):720-725.
Comment in: J Pediatr. 1991;118(3):489-490.
Can repeated yawning be a clinical sign of
an attention deficit disorder with or without
hyperactivity?
Can repeated yawning be a clinical sign of an
attention deficit disorder with or without
hyperactivity?
This patient
proposed spontaneously his case on the website
http: // www.baillement.com, then a follow up
interview was completed with more precise
questioning.
Patient X is a 41 year old male, 181 cm tall
and weighs 120 kg (BMI=37). For several years he
has been complaining about his condition. The
following is a quotation he has provided
explaining his current situation.
"I am chronically upset and distracted by
what is going on around me. I find myself making
impulsive decisions because I am very impatient
which weighs heavily on my self esteem. I begin
many things and end nothing. Some efforts which
seem easy to realize for the majority of people
are simply impossible for me due to my
depression and procrastination.
I always yawned very hardily with terrible
noisy stretches which can be very annoying to
the general public. My wife said to me I should
put in more of an effort and willingness to seem
more civilized around others. It was far too
powerful of a force for mere will to overcome
and I did not succeed in controlling myself no
matter how hard I (or my wife) wanted me to
stop. Even driving in my car made me yawn so
terribly I felt my jaw would fall off.
I sleep usually 7 to 8 hours per night. It
is not a refreshing sleep. I fall asleep with
agitated thoughts without continuation or
coherence. I have never felt sleepy in the
daytime yet I have a chronic colossal fatigue
which has haunted me since childhood. It has not
ever resulted in an inappropriate sleepiness in
the daytime yet I never feel awake. I know that
I dream during the night but can not recall what
about.
Even in my school days I had trouble which
teachers suspected and consulted my parents
about a possible dyslexia disorder. My personal
sensation was that my spirit was always active
and willing but my body did not respond.
Constantly I fear of not being capable in my
profession, to be faulted. I never worried about
my health and did not take medicine. I now
realize that I tended to bulimia, eating as two
or three persons and nibbling between
meals.
I never counted my yawns but they were
extremely frequent often in salvoes from 3 to 10
successive without precise scheduling throughout
the day. Sometimes all it would take to trigger
a "session" is simply a discussion with someone
or deep concentration. I would begin yawning
noisily, often stretching me so tightly that
cramps followed immediately. They were always
involuntary and uncontrollably by shear will
power alone. I never found pleasure or
satisfaction in yawning as most people describe
it but rather a great sensation of shame.
I have never figured out the link between my
frequent yawns and my appetite or schedules
connected to meals or a relationship with
sexuality. I was constantly aware of my
sensibility in the yawns of others. Any time
another individual would begin to yawn, so would
I.
My family physician of 20 years repeatedly
advised me to see a psychiatrist. He wanted to
ensure I was not affected by an attention
deficit hyperactivity disorder (ADHD). Only much
later I followed through on his advice after
hearing a radio broadcast in which testimonies
of ADHD sufferers' symptoms matched many of my
own. To this day though, nobody had spoken about
the yawns.
I endured many tests at a University
hospital. The psychiatrist informed me I had
text book symptoms. My sleep was recorded during
three nights (unfortunately I have no reports of
it). He advised a treatment of methylphenidate
(Ritalin®). Since I have been taking the
drug my life has changed. My wife knows when I
am under the influence of the medication or nor.
Some days I have to go into work very early. I
get up at 5:00 am and I arrive at 6:45 am at the
office and take my first pill. On the drive to
work I yawn and stretch sometimes so strongly
that cramps start. As soon as I take the Ritalin
the yawns almost all stop. I sometimes make
small yawns throughout the day but when I try to
yawn harder nothing more appears then a small
grimace in the corner of my lips. I am much less
sensitive to the yawns of others. Every now and
then I will yawn at sight of others but much
less often and very small isolated yawns. In the
evening when the effects of the Ritalin wear off
the large jaw-breaking yawns, stretches and
cramps begin again.
I have been converted from the status of big
yawner to small yawner. I have the impression to
yawn as regular people do. I do not need to
stretch so hard or noisily anymore. My life has
changed for the better and I no longer feel like
a nobody. I eat less and do not nibble in
between meals any longer. In my case the yawns I
produced did not mean a lack of interest but
rather quite the opposite. Paradoxically it
showed my interest my brain used all its energy
and asked for more neuro-transmitters (?).
Nobody could understand that though, including
myself.
Since this metamorphosis I questioned on an
internet web site dedicated to the disease other
people suffering from similar symptoms. Here are
the two testimonies gave by two mothers of a ten
and twelve year old children that I
collected:
1°) I often noticed that he had a
strong tendency to yawn and stretch when ever he
was working on homework. Yesterday at the school
the professors made the remark to me that he did
no sleep enough. He gets little effective sleep
which I can not say in his case whether the
Ritalin is the cause as he has always been
so.
2°) My elder son is constantly
stretching and yawning. It annoys both my
husband and I. I believe it can have a link with
the disease because you remind me that since he
has been using Ritalin the stretches have become
scarcer.
I discovered the link between dopamine and
yawning by reading a paragraph in the review of
"Réponse à tout" (August 2006) in
which they mentioned dopamine levels directly
related to yawning. After a quick search on
Google I came across your article "Et
Bâiller de Plaisir" on
www.futura-sciences.com which sent me back to
the site http://www.baillememnt.com. I wanted to
give you my testimony in hopes in would help you
in your future researches. Best of luck in your
continued study."
Comment:
If we admit that the syndrome of deficit of
the attention is a deficiency in arousal at the
level of the ascending reticular system of the
brainstem, the contribution of an aminergic
agonist stimulates the cortex. In two other
pathological states repeated yawns appear:
1°) In the acute phase of a stroke of
the sylvian territory
2°) After a crisis of a temporal
epilepsy
We should find a homology there. When the
brainstem tries to communicate with the corticio
sub-cortical structures without obtaining a
feedback the ascending reticular system attempts
increase arousal and the activity of the
superior functions. The yawn seems then as the
only driving display testifying of this adaptive
process (homeostasis). In the case of our
witness, the pharmacological aminergic
activation therapeutic is effective, returning
the cognitive ease and reducing the yawns and
pandiculations.
In three articles referenced below the yawns
are reported as a clinical sign of a defect of
awakening and attention:
Brumback RA.
Weinberg's syndrome: a disorder of attention and
behavior problems needing further research.
Child Neurol. 2000;15(7)478-480.
Koch P. Variation
of behavioral and physiological variables in
children attending kindergarten and primary
school. Chronobiol Int. 1987;4(4):525-535.
Weinberg WA,
Brumback RA Primary disorder of vigilance: a
novel explanation of inattentiveness,
daydreaming, boredom, restlessness, and
sleepiness. J Pediatr. 1990;116(5):720-725.
Comment in: J Pediatr. 1991;118(3):489-490.