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 Le bâillement : un comportement universel
La parakinésie brachiale oscitante
Yawning: its cycle, its role
Warum gähnen wir ?
 
Fetal yawning assessed by 3D and 4D sonography
Le bâillement foetal
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Le bâillement foetal
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mise à jour du
30 janvier 2003
 
lexique
Développement de la face
Face et séquence de Pierre Robin
Véronique Abadie
Hôpital Necker-Enfants Malades - Paris

Chat-logomini

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Bien que la séquence de Pierre Robin soit une association de malformations oro-faciales (fente vélopalatine postérieure, rétrognathisme, glossoptose), elle ne constitue pas à proprement parler une malformation fixée de la face, dans la mesure où la plus grande partie du phénotype va guérir spontanément lors de la croissance. La séquence de Pierre Robin (communément appelée le Robin) est plutôt une dysmorphie fonctionnelle, c'est-à-dire une morphologie faciale spécifique secondaire à un trouble de la dynamique oro-faciale anténatale.
 
Du point de vue anténatal, la séquence de Pierre Robin est un sujet complexe pour plusieurs raisons. Tout d'abord parce que les stigmates faciaux sont de reconnaissance échographique difficile, ensuite parce que le pronostic fonctionnel pédiatrique est mal corrélé aux données anatomiques, et enfin parce que, bien qu'elle porte un nom propre qui évoque l'idée d'une entité bien différenciée, la séquence de Pierre Robin est une entité hétérogène, tant du point de vue physiopathologique que diagnostique, et donc pronostique. De fait, un Robin peut être isolé ou s'intégrer à un syndrome malformatif, dans des proportions à peu près égales.
 
Tous ces éléments expliquent pourquoi le diagnostic anténatal d'une séquence de Pierre Robin n'est pas fait dans la majorité des cas, et quand il est suspecté, il met l'obstétricien et l'échographiste dans l'embarras.
 
 
Définition, physiopathologie et aspect clinique
 
1. - La séquence de Pierre Robin isolée
 
Pierre Robin, stomatologiste français du début du 20e siècle, a décrit une nouvelle cause de détresse vitale néonatale constituée d'une glossoptose obstructive et d'une rétromandibulie, aggravée par des stigmates de vagotonie (1). Dans les années 50, la triade malformative associant une fente vélopalatine postérieure, un rétrognathisme et une glossoptose a été décrite et nommée Pierre Robin (2).
 
La confusion dans les éléments de cette définition persiste et accentue le nombre de diagnostics effectivement en cause. Néanmoins, la majorité des auteurs s'accordent aujourd'hui pour dire que la triade anatomique faciale doit être présente pour que l'on puisse parler de séquence de Pierre Robin. Le terme de séquence est utilisé dans la mesure où il apparaît que les 3 anomalies anatomiques sont liées par une relation de cause à effet (3).
 
Le développement embryonnaire de la cavité orale passe par un stade (environ 45e jour de vie embryonnaire) où la langue est verticale dans une cavité commune nez-bouche. A ce stade, la fusion des bourgeons maxillaires et des bourgeons naso-frontaux est déjà faite, le palais primaire est en place, mais la mandibule est encore peu développée ; ni la base du crâne, ni les maxillaires ne sont ossifiés (4). Dans la semaine qui suit (fin du 2e mois), les mouvements mandibulaires antéro-postérieurs et l'horizontalisation de la langue se mettent parallèlement en place, et les processus palatins secondaires issus du 1er arc branchial peuvent se rejoindre et migrer vers la ligne médiane et l'arrière pour former le palais secondaire osseux. Cette étape est sans doute brève (5). Les 3 muscles du voile du palais se forment ensuite, ils sont respectivement, d'avant en arrière, issus des crêtes neurales des 3 premiers arcs branchiaux.
 pierre robin
On peut aisément concevoir qu'une altération de cette dynamique à un moment précis du développement puisse être responsable d'une séquelle anatomique, c'est-à-dire une fente palatine postérieure, romane, médiane, sorte d'image inversée de la position embryonnaire de la langue. Le mécanisme de genèse de cette fente est fort différent de celui des fentes labio-palatines antérieures, où des anomalies de fusion des différents bourgeons faciaux embryonnaires, donc une altération des processus de morts cellulaires peuvent être incriminés, et ce à un stade plus précoce du développement facial. Cette distinction entre fente labio-gingivo-palatine et fente palatine postérieure de type Robin est très importante à considérer dans toutes les réflexions relatives aux fentes oro-faciales du fœtus et de l'enfant.
 
La question est alors de savoir pourquoi la dynamique mandibulo-linguale ne s'est pas (ou mal) mise en place. Les causes de ce trouble de la dynamique mandibulo-linguale sont certainement multiples, surtout dans les Robins intégrés à un ensemble malformatif (6).
 
Dans les Robins isolés, où les enfants naissent et évoluent sans anomalies neuromusculaires, sans autres anomalies squelettiques, ni anomalies du développement psychomoteur (à condition d'une bonne prise en charge pédiatrique), peu d'hypothèses sont relevables. L'hypothèse d'une compression mécanique mandibulaire extrinsèque est théoriquement possible, et elle est évoquée de surcroît par la constatation inexpliquée d'une proportion de grossesses gémellaires plus importante (15 %) que ne le voudrait le hasard (fréquence des grossesses dans la population générale = 2 %) dans notre série de Robins isolés (n = 59).
 
Cependant, ces Robins jumeaux n'avaient pas d'autres signes anatomiques de contrainte extrinsèque anténatale. De plus, la mandibule n'est pas une partie périphérique exposée de l'embryon susceptible d'être l'objet d'une contrainte mécanique.
 
L'hypothèse la plus solide est donc celle d'une anomalie de la mise en place ou du contrôle de l'activité branchiomotrice embryonnaire issue du cerveau postérieur. Chez l'embryon humain, les premiers mouvements observés sont des mouvements de flexion-extension de l'axe rachidien et des mouvements d'ouverture buccale. Ces mouvements sont secondaires à l'activité rythmique spontanée des nerfs crâniens et des racines motrices rachidiennes mises en évidence par enregistrement de ces motoneurones du tronc cérébral et de la moelle isolés in vitro.
 
Chez la souris, l'activité en bouffées des racines motrices des nerfs crâniens est identifiable avant la fin de la segmentation, soit à un stade très précoce de la vie anténatale, avant la formation complète du palais et l'ossification mandibulaire (7). Cette précession du développement des structures nerveuses sur les structures tissulaires osseuses a été également montrée par des analyses histologiques chez le fœtus humain (8). Chez la souris, la mise en place du contrôle des fonctions vitales (respiratoires et masticatoires) par le tronc cérébral passe par des stades de développement successifs précis et très différents d'une étape à l'autre.
 
Au cours de ces étapes, qui s'enchaînent de la fin de la segmentation à la naissance, les différents niveaux rostro-caudaux du tronc cérébral ont des rôles spécifiques de générateurs de rythme et de régulateurs de la fréquence des bouffées d'activité des nerfs crâniens (données personnelles). Les relations entre ce développement fonctionnel et l'expression des gènes de segmentation sont en cours d'étude.
 
Les résultats préliminaires font apparaître un rôle du gène krox-20 initialement connu pour contrôler la mise en place anatomique des rhombomères 3 et 5. L'analyse in vitro de l'activité du réseau neuronal du tronc cérébral des embryons de souris krox-20 -/- montre des anomalies du développement du rythme branchiomoteur. De plus, l'analyse du phénotype respiratoire et masticatoire des souris krox-20 -/- à la naissance montre de plus des anomalies (9). Ces données montrent le lien entre la motricité des nerfs crâniens pendant la vie anténatale, la morphologie oro-faciale du fœtus et la régulation des fonctions vitales contrôlées par le tronc cérébral après la naissance.
 
De fait, les enfants atteints de syndromes de Robin isolés présentent à la naissance des anomalies fonctionnelles d'intensité variable, touchant la coordination de la succion-déglutition, la motricité oro-œsophagienne, la motricité basilinguale et pharyngo-laryngée, et la régulation ortho/parasympathique cardiaque, qui sont autant de fonctions normalement intégrées et coordonnées dans la réticulé du tronc cérébral (10).
 fetal yawn
Ces anomalies fonctionnelles ne sont pas simplement dues au statut anatomique facial des enfants et témoignent de la pérennisation postnatale des anomalies centrales responsables de la genèse de leur dysmorphie.
 
Ces anomalies fonctionnelles font toute la gravité du syndrome. Elles justifient des explorations fines : polysomnographie, laryngoscopie dynamique, étude clinique, vidéoscopique et/ou manométrique de la déglutition, manométrie œsophagienne, ECG de 24 heures avec stimulation oculaire vagale, afin d'évaluer la gravité de l'atteinte du tronc cérébral et prendre les mesures thérapeutiques adaptées à ces défauts.
 
La prise en charge thérapeutique de ces enfants peut être lourde : exclusion alimentaire initiale, nutrition entérale, oxygénation, intubation nasopharyngée ou trachéotomie, éducation de l'oralité, mais elle a permis d'obtenir de bons résultats à long terme.
 
La mortalité est quasi nulle (1 cas il y a plus de 10 ans, plus depuis). La population de Robins isolés ainsi prise en charge va bien, tant sur le plan intellectuel que staturopondéral et fonctionnel. Des difficultés phonatoires et ORL justifient un suivi et une rééducation adaptée.
 
2. - Les séquences de Pierre Robin associées à d'autres malformations
 
Selon les séries et les biais de recrutement liés aux sur-spécialités des auteurs, la proportion d'enfants atteints de Robin avec d'autres malformations varie, mais en moyenne représente la moitié de l'ensemble des cas. Les diagnostics peuvent être divisés en diagnostics établis, on parle alors de Robin syndromique, ou non établis, on parle alors de Robin associé. Cette classification a l'intérêt de permettre de préciser de quoi on parle. Dans notre série de 110 Robins suivis depuis 10 ans, 56 ont une malformation associée, et pour 68 % d'entre eux, le diagnostic syndromique a été précisé. Cinq diagnostics dominent ce groupe de 56 enfants (tableau I). Par ordre de fréquence, on trouve :
 
 
Diagnostics
Nombre (%)
 
Sd de Stickler et collagénopathies 15 (39 %)
Anomalies chromosomiques 8 (21 %)
Sd tératogénique (alcool, antiépileptiques) 4 (10 %)
Sd de Franceschetti 3 (7 %)
Microdélétion 22q1.1 3 (7 %)
Sd oculo-auriculo-vertébral 2
Sd de Nager 1
Sd de Kabuki 1
Atélostéogenèse de type I 1
Tableau I : Diagnostics des Robins syndromiques de notre série de 38 enfants, par ordre de fréquence.
 
Les collagénopathies (syndrome de Strickler et apparentés), responsables, à des degrés variables, d'anomalies osseuses, d'une morphologie faciale particulière, de myopie précoce et de déficit auditif. Ces syndromes sont transmis sur le mode dominant et ont un pronostic intellectuel normal.
 
Les anomalies chromosomiques, toutes différentes, touchant toutes des chromosomes différents, et toutes responsables d'atteinte psychomotrice sévère. Les syndromes tératogéniques, là encore de médiocre pronostic intellectuel.
 
Les syndromes de Franceschetti, auxquels on peut associer le syndrome de Nager, qui sont des malformations du 1er arc branchial, de pronostic intellectuel satisfaisant une fois pris en considération le risque de surdité.
 
Les microdélétions du chromosome 22 (3e et 4e arc), avec des difficultés de développement variables. Sans aller plus loin dans cette liste, on voit l'hétérogénéité majeure de ces syndromes du point de vue de leur mécanisme (chromosome, gène, toxique…). Les Robins associés (n = 18) ont des associations malformatives touchant principalement le système nerveux central et le cœur (tableau II), leur pronostic intellectuel est en règle médiocre.
 
Cœur 9
Système nerveux central 8
Œil 6
Squelette 5
Autres 11
Tableau II : Principaux organes atteints dans les malformations des 18 Robins associés de notre série, par ordre de fréquence.
 
On peut également envisager ces Robins non isolés du point de vue de leurs mécanismes physiopathologiques. Il y a ceux pour lesquels l'ensemble malformatif renforce l'idée d'une atteinte anténatale du tronc cérébral, comme les anomalies des arcs branchiaux et du conotroncus cardiaque, quelle que soit leur identité. Pour ceux-là, une anomalie du tube neural rhombencéphalique et des crêtes neurales correspondante est invoquée.
 
Il y a ceux, à l'inverse, qui évoquent un problème de mobilité fœtale : syndrome arthrogryposique, anomalies squelettiques type pied et main bots, anomalies neuro-musculaires périphériques. Ils sont rares. Pour les autres, les hypothèses physiopathologiques sont controversées, notamment pour les Stickler, où une anomalie primitivement osseuse est invoquée par certains, ce qui n'est pas notre opinion.
 
3. - Anatomie faciale et Pierre Robin
 
Evaluation post-natale
 
Plusieurs auteurs ont cherché à quantifier les anomalies anatomiques faciales des enfants atteints de Robin. Deux types de travaux ont été effectués, ceux qui cherchent à caractériser les paramètres faciaux des Robins à la période néonatale, et ceux qui analysent l'évolution de la croissance faciale des Robins. Les méthodes de mesures sont soit cliniques, soit radiologiques. La mesure clinique la plus utilisée est le jaw index qui mesure 3 paramètres :
 
La différence antéro-postérieure entre les 2 crêtes alvéolaires.
 
La longueur du maxillaire supérieur, d'une oreille à l'autre en passant par le milieu du philtrum.
 
La longueur de la mandibule en partant des mêmes points auriculaires et en passant par le milieu du menton. Le jaw index est le résultat du calcul suivant : 1 x 2/3.
 
Chez les Robins étudiés, le jaw index était à 15,3 +/- 1 pour un index à 4,2 +/- 1,8 chez les enfants du groupe contrôle, soit un chiffre 3,6 fois supérieur chez les Robins (11). La mesure du jaw index a l'avantage de n'être pas invasive, et pourrait avoir un intérêt dans l'évaluation des rétrognathismes en général. Les mesures radiologiques (céphalométrie) impliquent des tracés d'angles entre des points précis du squelette facial et de la base du crâne (12). Ces techniques ont toutes une validité discutable, compte tenu des recouvrements entre le normal et le pathologique et compte tenu des difficultés à valider des mesures sur une structure circonférentielle en croissance, dont le point de référence, le fond de la selle turcique, bouge avec le temps.
 
Les résultats ne sont pas fascinants et superposables d'une méthode à l'autre. Ils montrent que les Robins ont un rétrognathisme significativement plus marqué que les sujets normaux, que leur récupération avec l'âge est complète pour certains auteurs, partielle pour d'autres. Une étude a montré que les sujets avec del 22q1.1 ont des rétrognathismes plus francs quand ils ont un Robin associé, alors que les Stickler ont le même morphotype facial, qu'ils aient ou non un Robin associé. Cela peut avoir un certain intérêt dans la discussion physiopathologique du Robin dans ces syndromes (13).
 
Cependant, ces études n'ont pas un grand intérêt pratique dans la mesure où les pédiatres savent qu'il y a une mauvaise corrélation entre les stigmates anatomiques de Robin et la gravité de leurs difficultés fonctionnelles.
 
De fait, dans notre série de 59 Robins isolés, nous avons évalué les stigmates anatomiques cliniquement (en les classant en 3 stades d'intensité croissante), et nous avons montré que les formes de gravité moyenne, tant du point de vue de la taille de la fente que de celui de l'intensité de la glossoptose et du rétrognathisme, dominaient en fréquence (78 % de fente partielle, 61 % de glossoptose modérée, 56 % de rétrognathisme modéré). Nous n'avons trouvé aucune corrélation entre la taille de la fente et la gravité fonctionnelle orodigestive et cardiorespiratoire, et nous n'avons trouvé de corrélation qu'entre les formes extrêmes de rétrognathisme et de glossoptose et les stades de gravité fonctionnelle. Cela signifie simplement qu'une glossoptose et un rétrognathisme majeurs aggravent les difficultés alimentaires et respiratoires des enfants, ce qui n'est pas une grande surprise.
 
L'analyse de la face d'un enfant atteint de Robin peut être utile au diagnostic syndromique. Beaucoup de ces syndromes, anomalies des arcs branchiaux bien sûr (Franceschetti et Nager), mais également syndrome de Stickler et syndrome microdélétionnel 22 q11 entre autres ont des caractères morphologiques faciaux codifiés qui aident à la détermination du diagnostic, surtout pour ceux qui n'ont pas de marqueurs moléculaires ni cytogénétiques.
 
2. - Evaluation anténatale
 
Le diagnostic anténatal de Robin est difficile. De fait, sur notre série de 110 cas, seulement 8 cas (7 %) avaient été suspectés à l'échographie anténatale, et dans un cas au moins il s'agissait d'une récidive dans une fratrie (tableau III).
Tableau III : Description des signes échographiques dans les 8 cas de suspicion anténatale de Robins dans notre série de 110 cas, tous diagnostics confondus.
 
La fente palatine n'a été vue qu'une seule fois, précisément dans ce cas familial, dans la mesure où la forme anatomique était assez grave pour que la pointe de la langue apparaisse au-dessus du plan du palais, ce qui n'est possible que s'il y a une fente postérieure. La glossoptose se traduit par une verticalisation de la langue. Or la langue n'est pas toujours spécifiquement regardée et sa verticalisation peut être modérée. De même, le rétrognathisme ne se voit que si les conditions échographiques sont favorables à sa recherche (profil vrai), et s'il est majeur.
 
Des signes indirects, en revanche, peuvent faire suspecter un Robin : un hydramnios et une petite taille de l'estomac, qui sont deux signes de réduction du débit de déglutition du liquide amniotique.
 
Dans notre série, l'hydramnios a toujours été modéré, et de ce fait non spécifique, car de tels hydramnios sont fréquemment rencontrés au cours de grossesses normales, notamment chez les gros fœtus. La petite taille de l'estomac a été remarquée deux fois, et dans un cas, il s'agissait d'une authentique microgastrie. De plus, dans cette série, un Robin n'a pas été reconnu, malgré la compétence de l'opérateur, dans une famille de Stickler où le risque était précisé (50 %). A la naissance, l'enfant avait une fente palatine incomplète, une glossoptose et un rétrognathisme mineurs, le diagnostic anténatal n'était pas possible à faire.
 
Dans ce cas, comme dans tous probablement, l'analyse des flux en Doppler couleur n'a pas montré d'anomalie. Cette technique, valide pour les fentes labio-gengivo-palatines, ne l'est pas pour les fentes postérieures de Robin.
 
L'analyse du débit de déglutition fœtale pourrait être un élément important, mais le débit de déglutition est encore faible à 20-22 SA, et son évaluation plus tardive est rendue difficile par la position du fœtus qui cache plus souvent son visage. De plus, sa quantification chez le fœtus normal n'est pas établie.
 
Pour améliorer la performance des diagnostics anténatals de Robins, il faudrait que les rétrognathismes soient dépistés par la visualisation d'un vrai profil fœtal, que la position de la langue (verticale ou horizontale) soit recherchée, que la position de sa pointe soit évaluée par rapport au plan du palais, que sa mobilité antéro-postérieure soit vérifiée. Tous ces signes devraient a fortiori être analysés devant un hydramnios modéré ou un petit estomac. La suspicion anténatale de Robin doit essentiellement conduire à la recherche de malformations associées : face, oreille, axe des fentes palpébrales, cardiopathie, cerveau, pieds et mains, squelette, mobilité globale du fœtus. Elle peut également conduire à la réalisation d'un caryotype et d'une analyse familiale.
 
Le diagnostic anténatal de Robin mène à une discussion éthique délicate. Les anomalies chromosomiques et les polymalformations non étiquetées sont le plus souvent de mauvais pronostic développemental et justifient, à mon sens, une discussion d'interruption thérapeutique de grossesse. Ce n'est pas du tout le cas des Robins isolés, même de formes initialement graves, ni de plusieurs des Robins syndromiques. Il ne faudrait pas que l'amélioration des techniques iconographiques anténatales de la face de l'enfant (reconstruction 3D) exposent à des risques de décisions excessives de non poursuite de la grossesse.
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