- Mr Courserant : consulte la
                     Société sur les moyens à
                     employer dans une affection qui, depuis trois
                     mois, résiste à tous les
                     traitements.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Voici les particularités les plus
                     saillantes de cette observation:
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Mademoiselle X..., exerçant la
                     profession de bonne d'enfants, agée de
                     dix-huit ans, non enore
                     règlée, présente tous
                     les caractères d'un état
                     chlorotique avancé (terme devenu
                     désuet pour anémie ferriprive ou
                     état d'asthénie sans
                     précision).
 
                     
                     - Le 26 mai, elle fut prise, à onze
                     heures du soir, d'un besoin
                     irrésistible de bâiller, qui
                     persista deux heures; la nuit fut calme, mais le
                     lendemain matin, les mêmes
                     désordres fonctionnels
                     réapparurent de sept à dix heures,
                     de deux à sept heures et de onze à
                     deux heures. A dater du troisième jour,
                     de l'invasion de la maladie, le bâillement
                     devint continuel et ne laissa plus de repos
                     à la malade que les courts instants
                     qu'elle consacrait à ses repas ou au
                     sommeil , car il cessait aussitôt que la
                     malade prenait des aliments ou qu'elle se
                     couchait dans son lit.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Le 2 juin la malade vint réclamer mes
                     soins; aucune lésion matérielle
                     appréciable dans les organes.
 
                     
                     - J'attribuai donc tous ces accidents à
                     la chlorose, dont l'aménorrhée
                     elle-même pouvait très bien
                     n'être que la conséquence.
 
                     
                     - Les préparations de fer, de
                     valériane, d'asa foetida associées
                     de différentes manières parurent
                     apporter un léger soulagement, mais elles
                     furent impuissantes à arrêter le
                     bâillement, jusqu'à ce qu'enfin,
                     les règles étant apparues le 14
                     juin, tout sembla rentrer dans l'ordre. La jeune
                     malade perdit beaucoup de sang, et, pendant les
                     sept jours que durèrent les menstrues, il
                     y eut cessation complète de tous les
                     accidents; mais, à peine furent-elles
                     supprimées, que le bâillement
                     reparut, accompagné de douleurs assez
                     vives à l'épigastre : des
                     cataplasmes de moutarde furent appliqués
                     sur cette région et calmèrent la
                     douleur. L'éther, le musc et les bains
                     froids furent associés aux moyens
                     déjà conseillés et
                     produisirent peu d'effet.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - La malade ayant avalé un jour un
                     verre d'eau à la glace, le
                     bâillement cessa à l'instant
                     même : il y eut une rémission
                     complète pendant quelques jours. La
                     maladie ayant reparu, le même moyen
                     arrêta le bâillement; mais, au bout
                     de quelques minutes, la jeune fille eut une
                     attaque d'hystérie qui dura une
                     heure environ. Bientôt les attaques se
                     multipièrent tellement qu'on en compta
                     jusqu'à quatre par jour.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Tous les moyens déjà
                     indiqués furent continués, et les
                     attaques, devenues moins fréquentes, ne
                     se montrèrent qu'à des intervalles
                     assez éloignés; cependant, le
                     bâillement persiste depuis trois mois, les
                     règles, ne paraissent pas, et la malade,
                     qui a déjà consulté
                     plusieurs médecins, se trouve toujours
                     dans le même état.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Mr Corbel pense que l'on retirerait
                     peut être de bons effets de l'introduction
                     d'un pinceau chargé d'ammoniaque dans le
                     pharynx.
 
                     
                     - JI. Picard. Tout le monde sait que
                     des actes fréquemment
                     répétés dans en organe
                     établissent une espèce de seconde
                     nature. Dans le fait que l'on vient de nous
                     rapporter, il y a un mouvement automatique.
                     J'emploierais, pour empêcher,
                     bâillement, un moyen mécanique, et
                     je ne serais pas éloigné de croire
                     qu'une mentonnière, fortement
                     serrée pourrait produire de bons
                     effets.
 
                     
                     - M. Guersant, en raison de la
                     périodicité de l'affection, serait
                     d'avis que l'on fit prendre à la malade
                     du sulfate de quinine.
 
                     
                     - Le secrétaire annuel, Dr A.
                     Foucart
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Interprètation
                     de ce cas clinique en 2002
 
                     
                     - tumeur sellaire et supra-sellaire avec
                     hypertension intracranienne
 
                     
                     - Cette jeune femme présente une
                     aménorrhée primaire. L'observation
                     ne relate pas l'existence éventuelle
                     d'une galactorrhée, ni d'anomalie du
                     champ visuel, ni de céphalées. . .
                     Les crises baptisées hystériques
                     sont peut-être de nature convulsive. La
                     déglutition glacée
                     déclenche un réflexe vagal. Tout
                     concourt à faire penser à un
                     adénome de l'hypophyse
                     sécrétant de la prolactine
                     (aménorrhée) avec hypertension
                     intracranienne (salves de bâillements,
                     douleurs épigastriques).
 
                     
                     -  
 
                     
                       
                     
                       
                   
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