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Biographies de neurologues
 
Nouvelle Iconographie de La Salpêtrière
 
 L'histoire des neurosciences à La Pitié et à La Salpêtrière J Poirier
The history of neurosciences at La Pitié and La Salpêtrière J Poirier 
 
 
 

mise à jour du
13 janvier 2008
Annales des Sciences Naturelles
1831;21:388-419
lu le 2 mai 1830 à l'Academie Royale des Sciences
1831
Annales des sciences naturelles
Audouin, Brongniart, Dumas
 
Mémoire sur le développement
des facultés intellectuelles
des animaux sauvages et domestiqués
Adolphe Dureau de la Malle
1777 - 1857
1831

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 audouin
 
 
 
.... p 417
 
Je terminerai ce Mémoire par l'énonciation d'un fait simple que je crois avoir bien constaté, ayant répété mille fois l'expérience; j'exposerai le procédé qui m'a mené à cette petite découverte, et qui, étant suivi par des savans plus habiles et plus constans dans leurs recherches que moi, peut nous conduire I éclaircir quelques mystères de l'entendement des animaux domestiques.
 
Je crois pouvoir assurer que le bâillement est sympathique chez les chiens comme chez les hommes, pourvu que ces animaux soient placés comme nous dans les circonstances qui le produisent.
 
Le hasard m'a donné connaissance de ce petit fait; mais je solliciterai ici l'indulgence et l'attention de l'Académie, parce que le sujet que j'aborde en tremblant prête le flanc au ridicule, et pourrait, je le sens, me faire confondre, si on me prêtait une oreille inattentive, avec les hommes à idées creuses, qui se sont vantés d'entendre et de traduire plusieurs mots de la langue des oiseaux, des mammifères et même des insectes.
 
Élevé à la campagne, et y ayant passé une partie de ma vie, je suis parvenu, en m'amusant, à imiter assez exactement les cris et les sons de plusieurs oiseaux ou animaux domestiques et sauvages. Cette imitation, perfectionnée per l'usage, est devenue assez vraie pour tromper les animaux soumis à l'expérience; et en exprimant à leur, manière le désir, la douleur, la colère, pour éveiller chez eux ces impressions diverses, et leur faire produire, si je puis m'exprimer ainsi, le langage de ces passions.
 
Dans ces nombreuses tentatives, répétées tant de fois qu'elles ne peuvent laisser de doute, l'imitation par le son a toujours produit un effet sympathique, et j'ai enfin obtenu sur les animaux et Ies oiseaux, tels que chiens, chats, ânes, coqs, poules, dindons, etc., le même résultat qu'obtient sur un auditoire réuni un bon acteur tragique ou comique, qui fait pleurer on rire la salle selon que sa voix et ses gestes imitent plus fidèlement la douleur ou la gaîté, selon que la feinte, en un mot, est plus rapprochée de la vérité.
 
C'est ainsi qu'en bâillant à la manière des chiens et en imitant exactement le son qui, chez ces animaux, accompagne le bâillement, je suis parvenu à faire bâiller mon chien à volonté. Mais il faut, je le répète, que l'animal soit dans un état calme et tranquille. Je n'ai pu y parvenir, quand le chien est en marche et à la promenade, où il met à coup sûr beaucoup plus d'intérêt que nous.
 
J'ai remarqué que, quand plusieurs chiens étaient couchés ensemble, le premier qui bâillait faisait bâiller les autres, excepté celui qui était distrait par l'occupation de s'épucer, de se gratter on autre chose semblable; celui-là m'a semblé presque toujours échapper l'effet sympathique du bâillement.
 
Ce petit succès de l'imitation, dans un cas particulier, m'a engagé à me servir de ce nouveau mode d'exploration; Il m'a semblé qu'en pouvait considérer, sous ce point de vue, les animaux comme des sauvages qu'on visite pour la première fois, dont on ignore la langue, et avec lesquels il faut, pour communiquer ses idées, se créer d'abord une langue de signes, et former ensuite un vocabulaire des mots essentiels. Je crois que ce mode d'investigation peut être suivi avec succès; car, dans un grand nombre d'expériences, les animaux ont été complètement abusés; dans quelques autres, où l'imitation avait probablement été moins fidèle, ils se sont aperçu de la feinte, et alors ont exprimé leur perception, soit par le mépris, soit par une expression de gaîté ironique annonçant positivement qu'ils se prêtaient à la plaisanterie, mais qu'ils n'en étaient pas dupes. Ces expériences ont été répétées tant de fois et se sont reproduites avec tant de fidélité dans les circonstances, que je crois pouvoir affirmer qu'avec le mode d'intitation dont j'ai parié, et dans plusieurs cas, la langue des signes et des passions chez les chiens peut être traduite et interprétée.
 
Dogs catch human yawns