Electromyographic techniques are used in a
preliminary study of facial expression in
macaque. The subject, a young adult male, is
sitting in a primate chair. The muscular
activity of the anterior belly of the
digastricus, of the orbicularis oris, and of the
muscles of the nape are recorded during yawns,
threats and lip-smacking. The electromyograms
are synchronized with photographies. The
orbicularis oris is not active during threat,
even if the teeth are fully exposed, but is
active, although constant when the teeth are
gradually completely exposed, during the last
phase of mouth opening in the yawn. The exposure
of the teeth, and especially the large canine of
adult males, during the yawn, appeared to bc
merely linked to the widest opening of the
mouth. This suggests, with other significative
differences, a distinct communicative function
between threats and yawns.
Une étude préliminaire des
mimiques faciales par électromyographie a
été menée sur un jeune
mâle macaque adulte en contention.
L'activité électrique du ventre
antérieur du digastrique, de
l'orbiculaire des lèvres et des muscles
de la nuque a été
enregistrée au cours de
bâillements, de menaces et de
séquences de claquement de
lèvres.
Les électromyogrammes sont
synchronisés avec des photographies.
L'orbiculaire des lèvres est inactif dans
la menace intense, au cours delaquelle les dents
sont découvertes, mais il est actif au
cours du bâillement, lors du
découvrement des dents. Ce dernier
apparaît donc, dans ce cas, simplement
lié à l'ouverture maximale de la
bouche. Cela suggère, en prenant en
considération d'autres différences
fondamentales, des fonctions communicatives
distinctes entre bâillements et
menaces.
Introduction : au cours des
interactions sociales au sein des groupes de
cercopithécidés, les signaux
visuels échangés incluent de
nombreuses mimiques faciales, parmi lesquelles
le bâillement semble revêtir
une valeur particulière. S'il est souvent
mentionné dans les monographies, il est
toutefois omis dans les études
exhaustives de van Hooff (1967) et de
Chevalier-Skolnikoff (1973). La plupart des
auteurs lui accordent une valeur de menace
(Deputte, 1974). Qualitativement cependant le
bâillement se différencie des
autres formes de menaces, en particulier de la
menace « bouche ouverte » ("Staring
open mouth face", van Hooff, 1967, "Open mouth
threat", Shirek-Ellefson, 1972, «Stummes
Dröhen», Angst, 1974) (fig.1). Au
cours de cette dernière, la bouche prend
généralement une forme en
«O», les lèvres recouvrent plus
ou moins totalement les dents et le regard est
fixé sur le congénère. Au
cours du bâillement, par contre, la bouche
s'ouvre lentement, les dents sont couvertes dans
un premier temps (phase 1) puis se
découvrent progressivement lorsque la
bouche atteint son maximum d'ouverture (phase
2), avant une fermeture rapide (phase 3). Tout
au long du bâillement la tête se
relève, le regard n'est orienté
dans aucune direction privilégiée,
les yeux sont de plus généralement
clos au maximum d'ouverture de la bouche
(Deputte, 1978).
Il peut sembler paradoxal de constater qu'au
cours d'une mimique agressive, les dents et en
particulier les puissantes canines des
mâles adultes ne soient pas
exposées alors qu'elles le sont
totalement dans le bâillement, qui
n'implique pas a priori, chez Macaca
fascicularis notamment, des relations dyadiques.
L'apparition des canines, dans ce cas, ne semble
donc être qu'un
épiphénomène de l'ouverture
de la bouche. Il nous a paru intéressant
d'utiliser l'électromyographie pour
tester cette hypothèse.
[...]
Discussion : la comparaison de
l'activité de l'orbiculaire des
lèvres au cours du bâillement et de
la menace montre que le découvrement des
dents ne semble pas, dans les deux cas,
être dû aux mêmes
phénomènes. Dans la menace de
forte intensité, du fait de l'absence de
contraction de l'orbiculaire des lèvres,
le découvrement des dents est
essentiellement dû à
l'activité des muscles zygomatiques (m.
zygomaticus minor et major). La forme en
«O» que prend habituellement la bouche
lors des menaces observées dans un
contexte social est due à la contraction
de Forbiculaire des lèvres (Redican,
1975), l'ouverture de la bouche n'étant
pas très accentuée. Au cours du
bâillement, la contraction de Forbiculaire
se produisant alors que l'ouverture de la bouche
atteint son maximum, elle entraînerait un
glissement des lèvres, découvrant
ainsi les dents. L'augmentation de ce
découvrement n'est pas liée
à l'augmentation de l'activité de
l'orbiculaire mais à l'augmentation de
l'activité du v.a.d. On peut alors penser
que c'est l'ouverture maximale de la bouche qui
est le phénomène essentiel dans le
découvrement des dents au cours du
bâillement. Il faut toutefois mentionner
qu'étant donné les étroites
relations qui existent entre la plupart des
muscles faciaux, on ne peut rejeter
l'intervention complémentaire d'autres
groupements musculaires.
De plus, menace et bâillement se
distinguent par le décours temporel de la
contraction du v.a.d (fig).
La présence d'une phase statique de
l'ouverture de la bouche dans l'évolution
de la menace (ou le nombre de
répétitions du claquement de
lèvres) est en rapport avec les
réactions du récepteur. Il existe
pour cette mimique un feed-back
émetteur-récepteur par le canal
visuel. La menace cessera lorsque le
récepteur aura manifesté sa
réponse, fuite, menace en retour, etc. Le
bâillement se distingue de cette mimique
par son déroulement continu,
asymétrique, indépendant de
l'environnement extérieur.
On peut ainsi montrer que le
bâillement n'appartient pas à la
même classe de signaux visuels que la
menace ou le lip-smacking. Ces signaux sont des
éléments de la «
communication active » alors que le
bâillement appartiendrait, à la
«communication passive» (J.-P. et A.
Gautier, 1977; Deputte, 1978).
Cette étude préliminaire
souligne l'intérêt de
l'électromyographie, associée
à la photographie ou à la
cinématographie (Fontenelle et al.,
1975), dans l'interprétation des mimiques
faciales des primates. Cette technique permet
d'objectiver, par la valeur des
intensités des contractions musculaires,
l'importance relative de diverses parties de la
face impliquées dans les mimiques. Elle
permet en outre d'étudier avec
précision l'enchaînement et
l'évolution temporelle des
éléments des expressions faciales,
les activités des différents
muscles étant des parties d'une
"complicated cooperation [of all
muscles] which are mostly not visible to the
human observer of a primate face" (Seiler,
1973).
Associée à la
télémétrie,
l'électromyographie devrait permettre une
étude simultanée des expressions
faciales d'un «émetteur» et
d'un « récepteur » au cours
d'une interaction sociale.
Menace et
baillement illustrent les deux aspects de la
communication, active "signal primaire" et
passive "indice" ou "signal secondaire". Les
deux mimiques sont à leur apogée,
en ce qui concerne l'ouverture de la
bouche.
Le baillement (à gauche)
présente une évolution motrice
"inconditionnelle". Il évolue
indépendamment du comportement des
partenaires. Il ne présente d'orientation
privilégiée que lorsqu'il est
émis à la suite d'une interaction
(ici un mâle adulte, Macaca
fascicularis).
La menace (à droite)
présente une phase "stationnaire"
correspondant à une évolution
motrice "conditionnelle" ; c'est-à-dire
que son intensité et sa durée
dépendent de la réponse du
partenaire. Celui-ci est "fixé du
regard"