- Au mois d'octobre dernier se
présentaità la consultation de la
Salpêtrière un malade se disant
atteint de « maladie du sommeil » et,
de fait, ii ne tardait pas à s'endormir,
sous nos yeux, d'un sommeil calme et tranquille
en apparence; à peine était-il
éveillé, qu'il s'endormait de
nouveau. Il s'agissait, en
réalité, d'un dormeur
hystérique méritant d'être
examiné de plus près. C'est son
observation, rapprochée de quelques
autres analogues, que nous allons exposer,
désirant appeler l'attention sur une
forme peu fréquente de sommeil
hystérique et capable d'entraîner
un diagnostic erroné.
-
- Les observations qui ont fait le sujet des
leçons de M. le professeur Charcot ou qui
sont contenues dans les ouvrages de MM.
Bourneville et Regnard, de M. P. Richer, ainsi
que dans les mémoires de M. Pitres, se
rapportent soit à des cas exceptionnels,
à des attaques de sommeil prolongé
pendant des semaines, des mois et années,
soit à de petits cas dont la durée
ne dépasse pas trois, quatre, huit et
douze jours. « Ces derniers sont infiniment
moins rares, dit notre éminent maitre ;
c'est ainsi que dans le service, nous n'avons
pas observé moins de cinq cas de cette
catégorie dans le courant de ces deux
dernières années.» A
côté de la grande forme
léthargique et de la forme commune dont
nous venons de parler, il en existe une autre
qui simule la maladie du sommeil et
mérite d'être
caractérisée du notre de forme
narcoleptique. Elle est assez rare pour qu'il y
a peu d'années encore, notre ami, Gilles
de la Tourette, ait pu dire de la narcolepsie
que « le sommeil n'est plus
accompagné ou suivi d'attaques
convulsives ou d'autres accidents
hystériques ».
-
- © Extrait
de l'Album de l'internat de La
Salpêtrière conservé
à la Bibliothèque Charcot à
l'hôpital de la
Salpêtrière
- (Université
Pierre et Marie Curie, Paris)
- Emile
Parmentier, interne de JM. Charcot en
1890
-
- Qu'est-ce donc que la
narcolepsie?
-
- Elle consiste dans un besoin de dormir
subit, irrésistible, ordinairement de
courte durée, se reproduisant à
des intervalles plus ou moins rapprochés
et assez impérieux d'ordinaire pour que
le malade succombe, presque fatalement,
dès que ce besoin se fait sentir. Bien
que le sommeil puisse survenir
spontanément, son apparition peut
être provoquée par des influences
diverses. Nous citerons à ce propos
quelques fragments d'une intéressante
observation de M. Gelineau, qui, mieux que toute
autre description, permettront de comprendre ce
qu'on entend par narcolepsie. "Ce n'est que
depuis deux ans que le malade a ressenti,
lorsqu'il riait aux éclats ou qu'il
voyait une bonne opération à faire
dans son métier (revendeur de barriques),
une faiblesse soudaine dans ses jambes, qui se
dérobaient sous lui, Plus tard, en jouant
aux cartes,s'il voyait un beau jeu, il
était tout saisi et ne pouvait remuer les
bras; sa tête se penchait, il dormait; une
minute après il se
réveillait.
-
- Bientôt, la moindre émotion, la
vue seule de ses futailles suffirent pour amener
le sommeil, et, depuis, ce besoin
impérieux de dormir l'incommode â
chaque instant. Mange-t-il, son repas est
interrompu quatre ou cinq fois par l'envie de se
reposer; ses paupières s'abaissent, ses
mains laissent tomber sa fourchette, son couteau
ou son verre; la phrase qu'il avait
commencée à voix haute, il la
finit avec peine, en balbutiant et à voix
basse; sa tête se penche, il dort. C'est
eu vain qu'étant assis, pour
écarter cette sensation, il se frotte tes
yeux; sa main retombe inerte, il est vaincu, se
courbe et sommeille. Est-il debout et dans la
rue, quand ce besoin le prend, il vacille,
trébuche comme un homme ivre, entend les
gens l'accuser d'avoir bu et se rallier de lui ;
il ne peut leur répondre; leurs moqueries
l'accablent encore plus et il s'affaisse en se
garant instinctivement, par un dernier effort,
des voitures ou des chevaux qui passent. S'il a
une émotion profonde, pénible ou
joyeuse, le besoin de dormir est encore plus
impérieux et soudain...
-
- Pendant son sommeil, son pouls, qui est
à 66 à 68 à l'état
ordinaire,descend immédiatement sous 6O.
Ses pupilles, très contractées
à l'état de veille, le sont un peu
moins quand il dort. Elles se contractent
à nouveau quand on les soulève et
qu'on en approche la lumière. Les
accès durent de une à cinq
minutes.
-
- Rien, du reste, ne révèle chez
lui un état maladif; ses traits sont
calmes, reposés, il mange bien; son
sommeil de la nuit est excellent, il ne se
réveille qu'une foi. Jamais, pendant son
sommeil morbide, il n'a laissé
échapper d'urine ou de matières
fécales. Sa mémoire n'est pas
affaiblie le moins du monde, il se rend compte
de l'état de ses affaires et s'en occupe
avec activité, mais en se faisant
accompagner, ne pouvant sortir seul sans
danger».
-
- Telle est la maladie du sommeil à
laquelle M. Gelineau a donné le nom de
narcolepsie et dont MM. Gamuset, Phipson, Ballet
et Landouzy ont publié quelques exemples.
Voici maintenant nos observations.
-
- L'histoire clinique qui va suivre est celle
d'un dégénéré au
premier chef, d'un
dégénéré atteint
d'un infantilisme, de chlorose et
d'hystérie.
-
- Infantilisme et chlorose! Corrélation
d'autant plus digne de remarque qu'il ne s'agit
plus seulement ici de malformations
congénitales du système
artériel Virchow, mais d'un vice profond
de l'organisme tout entier. Et cette chlorose
constitutionnee est une chlorose
héréditaire. S'il est, en effet,
une maladie des parents qui puisse avoir quelque
influence sur le développement de la
chlorose, c'est bien la phthisie. M. [Janet
ne manque jamais d'insister sur ce rapport dont
['exactitude est chaque jour
démontrée par les faits; nons
rappelons d'autant plus volontiers l'opinion de
notre excellent maître sur ce sujet, que
M. Jolly semble ne pas la connaître, bien
qu'il ait recueilli plusieurs observations du
même genre dans son propre service.
-
- Fils d'une mère morte
phthisique,notre malade a pour grand père
maternel un alcoolique
invétéré de
caractère violent. Il était donc
voué, sinon à l'hystérie,
du moins à quelque manifestation
nerveuse. Il ne tarda pas, du reste, à
ressentir les premiers effets de la grande
névrose. A deux reprises, dès son
jeune âge, il fut frappé de
paraplégie momentanée, sans aucun
doute hystérique; plus tard, il eut des
crises convulsives, des attaques de sommeil dont
nous aurons à étudier les diverses
particularités. Avant de les
décrire, nous avons cru bon de rappeler
la part qui revenait aux différents
facteurs dans la genèse de la maladie
constitutionnelle et névropahique.
-
- Obs 1. - Infantilisme, chlorose,
hystérie. - Attaques de Sommeil
hystérique de forme narcoleptique,
polyurie.
- Louis Demeu...., 26 ans, entré salle
Bouvier, lit n°1, service de M le
Professeur Charcot.
-
- Antécédents
héréditaires
- Son père, aujourdh'ui
âgé de 66 ans, est un ancien
aiguilleur au chemin-de fer de l'Ouest où
il est resté pendant trente-quatre ans
avec d'excellentes notes. C'est assez dire qu'il
n'avait pas d'habitudes d'intempérance.
Sa santé est bonne. Son grand-père
maternel s'adonnait à la boisson et avait
un caractère violent. Sa mère est
morte à l'age de 39 ans de phtisie
pulmonaire. Des six enfants que comptait la
famille, le second est mort peu de temps
après le naissance. Le premier,
âgé de 36 ans, est vigoureux, de
taille moyenne; c'est un alcoolique qui boit de
préférence de l'absinthe. Le
troisième est Louis, notre malade. Le
quatrième vient de quitter le 22°
dragons où il était
maréchal des logis: il est sobre et
paraît être le mieux partagé
de tous au point de vue physique et psychique.
Après lui vient encore un jeune homme de
22 ans, qui a eu la fièvre typhoïde
à 10 ans: il est absinthique,
masturbateur, a des idées de suicide et
des attaques d'hystéro-épilepsie.
Enfin sa soeur, âgée de 20 ans, a
déjà présenté depuis
deux ans quelques crises d'hystérie.
-
- Antécédents
personnels
- Le malade ne peut fournir aucun
renseignement sur sa première enfance. Il
se rappelle avoir été
soigné â l'âge de 9 ans
à l'Enfant-Jésus pour des douleurs
et une paralysie des membres
inférieurs.
-
- Il entra en apprentissage et devint
brocheur. A l'âge de 13 ans, il tramait
une voiture à bras lorsque subitement il
se trouve dans l'impossibilité de faire
un pas et bientôt de se tenir debout. Fort
heureusement le fils de son patron vint à
passer, le mit dans la voiture et le conduisit
ainsi chez son père et de là
à l'hôpital. Traitement:
enveloppement ouaté des jambes.
Guérison.
-
- Un matin, en 1882, il avait
été chargé de distribuer
des brochures dans plusieurs maisons et
d'attendre sun patron, vers onze heures, quai
des Grands Augustins, lorsqu'arrivé au
rendez-vous il s'assit sur les brancards de la
voiture et s'endormit. Vers une heure de
l'après-midi, il se réveilla
étendu sur un matelas au poste de
police.
-
- On lui raconta qu'il avait été
trouvé endormi par son patron et que,
dès qu'on avait essayé de le
réveiller, il avait commencé
à se débattre violemment; qu'il
avait été alors conduit au poste
par le patron, aidé des agents dont il
avait déchiré les vêtements.
De retour à l'atelier, il fut pris d'une
nouvelle crise de sommeil
entremêlée d'accès
convulsifs et délirants.
-
- Peu de temps après il se fit
peintre-doreur sur métaux, travaillant
sous la surveillance de son frère
aîné. Ses négligences, ses
retards, ses attaques de sommeil lui attiraient
à chaque instant des reproches et des
amendes. Il devint alors garde-malade,
métier qu'il exerce depuis 1886.
-
- Il y a un an, en passant vers onze heures
place des Invalides, il vit un terre-neuve
renverser un jeune enfant et se
précipiter sur lui. Dès qu'il
sentit les pattes du chien qu'il croyait
enragé, poser sur ses épaules, il
tomba à la renverse sans connaissance et
se débattit. Il se retrouva assis sur un
banc, entouré de personnes que l'incident
avait ameutées. On le rassura en lui
affirmant que le chien avait voulu jouer, on le
fit marcher un peu; mais très
fatigué, il s'endormit de nouveau.
Lorsqu'il rentra chez lui, il était plus
d'une heure.
-
- Depuis cette époque, les attaques de
sommeil augmentèrent de fréquence
et de durée; depuis trois mois elles
reviennent plusieurs fois par jour et ne lui
permettent plus de travailler. Il a ainsi
mangé toutes ses économies.
-
- État actuel
- Louis Dein... est de petite taille, imberbe;
on lui donnerait 15 ans bien qu'il en ait 26. Sa
face est pâle, à peine
rosée; c'est un chlorotique
mâle.
-
- Son corps est grêle; ses oreilles sont
mal ourlées, les seins très
développés. Son bassin large
appartient au type féminin; ses cuisses
ont une forme arrondie, Il n'existe qu'une seule
fossette lombaire comme chez la femme. Louis
porte un bandage inguinal double; des deux
hernies qu'il présente l'une est
congénitale, l'autre a apparu vers 11
ans. Le pubis est peu garni de poils ; le
pénis n'est pas plus
développé que celui d'un enfant de
9 ans; les testicules ont la grosseur d'une
bille. Le conseil de revision le réforma
pour atrophie congénitale des testicules,
Enfant, il n'a jamais aimé les jeux
bruyants; d'un naturel calme, timide, il lisait
volontiers. Il n'a pour les femmes ni penchant
ni aversion c'est un être neutre avant
tout.
-
- Stigmates hystériques.
- Il présente une
hémìanesthésie
sensitivosensorielle du côté
gauche. Le contact et le chaud sont à
peine perçus; la piqûre ne
détermine pas de douleur, le froid n'est
pas senti. Les différentes odeurs,
camphre, chloroforme, sulfure de carbone, sont
peu ou pas perçus. Le goût est
presque totalement aboli. Anesthésie
pharyngienne.
-
- Points hystérogènes 1°)
temporomaxillaire des deux côtés;
2°) costal inférieur à gauche
(8-10° espace) et flanc gauche; 3°)
testiculaire gauche; 4°) Iliaque des deux
côtés.
-
- Rétrécissement du champ visuel
gauche à 60°.
Micromégalopsie.
- Comment it s'endort la nuit, - Presque
chaque soir vers huit heures, il ressent une
douleur assez vive au niveau des derniers
espaces intercostaux et du flanc du
côté gauche, qu'il cherche à
calmer en frictionnant la région sensible
après s'étre étendu sur un
lit. Puis, il est pris de battements dans la
tête et s'endort. Il ne rêve pas ou
mieux il ne croit pas réver. Ses voisins
de lit assurent qu'il parle tout le temps: "Vous
êtes un infame! retirez-vous... Vous
n'êtes pas digne de porter le brassard aux
armes, etc. "
-
- Comment it se réveille le matin. - Il
s'éveille rarement seul ; il lui est
arrivé de rester couché jusque
vers quatre heures de l'après-midi ce
jusqu'au soir. Quand il a besoin de se lever de
bonne heure il affiche dans le couloir qui
mène à sa chambre un papier
invitant les personnes qui passent à le
réveiller à l'heure
indiquée, â frapper à sa
porte, à entrer chez lui. Chaque soir en
se mettant au lit il s'attache une corde au
bras, corde qui traverse la porte et va tomber
dans le couloir. Il est ainsi facile de
l'avertir.
-
- Somnambulisme nocturne. - Au réveil
il n'a aucun souvenir des actes qu'il a
accomplis durant son sommeil. Une
première fois il s'est reveillé en
chemin au premier étage (il habite le
sixième étage) il venait de
heurter la rampe d'escalier.
-
- Une autre fois il a été
réveillé par un locataire. Il lui
est arrivé de descendre dans la loge du
concierge, de s'asseoir et du remonter ensuite
chez lui sans s'éveiller; la concierge,
qui l'avait trouve " pâle comme un mort ",
lui aurait demandé ce qu'il faisait
là et l'aurait invité à
regagner sa chambre,
-
- Le matin, il trouve son linge rangé,
ses chaussures cirées, ses
vêtements brossés. Il
exécute même des actes qui exigent
une certaine adresse ou une certaine
lucidité d'esprit il fait du brochage,
exécute des calculs, etc.
-
- Ces accès de somnumbulisme se
produisent généralement quand ii
se couche avec la préoccupation de la
besogne du lendemain. "C'est rare quand je ne la
fais pas la nuit".
-
- Au réveil, le matin, il est
fatiguê, il a mal à la tête,
n'a pas d'appétit, éprouve le
besoin de dormir. Quand il a fait la nuit
quelque calcul, il ne peut en faire d'autre le
lendemain, tant il est mal en train.
-
- Attaques de sommeil. - Il
s'endort partout et à n'importe quel
moment de la journée, quelle que soit son
occupation. ll s'endort en se promenant, en
mangeant, en jouant, surtout lorsqu'il est
assis. Qu'il écrive ou qu'il lise, il
s'endort. Il ne peut regarder un objet brillant
ou fixer un objet quelconque sans être
pris de sommeil.
-
- Aura. - La tète devient
lourde; il se met à bâiller,
sent des battements dans les tempes, des
bourdonnements dans les oreilles, puis entend
sonner un timbre ou résonner un tambour.
Quelquefois les bourdonnements font
défaut; alors les paupières
battent, quoi qu'il fasse pour les
arrêter. Sa face, d'ordinaire blanche et
pâle, prend une teinte
légèrement rosée. Les
paupières s'abaissent et vibrent. Le
front se plisse, les sourcils se contractent, la
fossette du menton se creuse, la physionomie
prend une expression chagrine ; il porte la main
au front et semble souffrir de la tête.
Puis la tête tombe en avant: il est
endormi.
-
- Il reste dans cet état un temps plus
ou moins long, d'ordinaire immobile; souvent il
a soin de prendre un point d'appui, de
s'arcbouter de façon â ne pas
tomber pendant le sommeil, chute qu'il
n'évite pas toujours.
-
- Les membres ne sont ni souples ni rigides:
ils ne gardent pas la position qu'on leur donne
ou s'ils la conservent un instant c'est pour
retomber bientôt. Dès qu'on cherche
à les mobiliser, ils ont une tendance
très accusée à se raidir et
à entrer dans une rigidité
complète: alors le corps dessine
quelquefois l'arc de cercle. En malaxant les
masses musculaires du bras on peut le mettre
dans un état cataleptiforme pendant
quelques minutes.
-
- Des tracés ont été
obtenus, le membre snpériénr
étant placé par ce
procédé dans un état de
rigidité complète. La ligne
d'inscription est régulière sur
une certaine étendue, puis devient
légèrement tremblée. Or,
à ce moment, le corps était
agité d'un frémissement à
peiné perceptible et la physionomie
prenait un air de souffrance. Il faut sans doute
voir dans ces indications l'expression d'un
délire intérieur triste ou d'une
hallucination pénible.
-
- La tête, entrainée par son
propre poids, tombe d'ordinaire sur la poitrine;
les paupières closes sont animées
de vibrations rapides, presque imperceptibles;
on n'arrive à les ouvrir qu'avec la plus
grande difficulté et fort imparfaitement.
Les globes oculaires convulsés en haut
décrivent un léger mouvement de
rotation ou un nystagmns incomplet; les pupilles
sont moyennement dilatées. La bouche est
fermée, les dents sont
serrées.
-
- La respiration, qui était
superficielle et fréquente pendant la
phase préparatoire, est
irrégulière au suprême
degré. Après de longues pauses de
vingt à trente secondes, survient une
respiration saccadée se fixant en deux ou
trois temps et davantage; puis l'aspiration
apparaît aussi irrégulière
qu'elle, rendant inutile toute description:
c'est la variété dans
l'irrégularité, comme on peut en
juger d'après les tracés
ci-joints.
-
- Le pouls, qui ne dépasse guère
60, à l'état normal, se
précipite Un peu, atteint 70,75 et
présente aussi de légères
irrégularités.
-
- Parfois le malade semble poursuivre un
rêve, voir un tableau et se met à
parler. Il décrit ce qu'il voit ou
converse avec des amis; souvent il s'agit dans
ses discours d'ambulances, de postes de secours,
de blessés qu'il a secourus : on sait
qu'il est infirmier. Quelquefois en dormant il
se raidit et un peu d'écume lui vient
à la bouche.
-
- La sensibilité cutanée est
très obtuse. Une excitation un peu forte
le fait entrer en rigidité
complète. Il en est de même,
à plus forte raison, lorsqu'on presse un
des points hystérogènes. Les
sourcils se contractent, le front se plisse, la
physionomie prend une expression de souffrance ;
il prend sa tête entre les mains, il
gémit, se raidit et décrit un arc
de cercle, en même temps les machoires se
serrent violemment et sur les lèvres
apparait un peu d'écume.
-
- Les mêmes phénomènes se
reproduisent parfois sous l'influence d'un bruit
violent, de l'application devant les yeux d'un
verre de couleur. On peut changer à
volonté les images, les tableaux qu'il
voit dans son rêve soit en lui parlant,
soit en excitant le sens de la vue ou de
l'ouïe.
-
- Il répond à l'appel de son
nom, indique sa profession, se leve et marche si
on lui en donne l'ordre, donne des
renseignements sur les personnes qu'il
fréquente. Il parle de son ami Gore.,,,
demeurant 128, rue Montmartre. Il voit un
incendie, l'arrivée de la pompe, la
sauvetage qu'on organise, etc; on le fait
assister à un enterrement, il est
à l'eglise, dépeint les
décorations, les illuminations, etc. Il
entend l'heure de la ville si l'on percute un
aimant et le bourdon de Notre-Dame si l'on
frappe sur un gong. Il s'agit de l'enterrement
d'un de ses clients, de Jules Bao...,
nègre qu'on va enterrer dans le caveau de
ses mattres, ancien syphilitique qu'il a
soigné pendant plus de six mois. En
jouant sur la table une marche militaire, il
entend le tambour, voit défier le
régiment caserne à la
Pépinière, etc. Si on lui commande
d'ouvrir les yeux,de se réveiiler,il n'y
parvient pas malgré tous ses efforts; il
pleure, se frotte la tête inutilement.
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