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mise à jour le
29 juillet 2001
 Lexique
 Texte expliquant l'anatomie clinique
De la reconnaissance des visages
Sémiologie du système nerveux
J de Recondo Flammarion Ed 1995
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GRASPIN

La reconnaissance des visage est une fonction complexe et les données de la pathologie ont permis des progrès dans sa compréhension. Ainsi, la prosopagnosie est un trouble de la reconnaissance et de l'identification des visages sous le seul contrôle de la vue. Le patient qui en est atteint ne reconnaît pas les visages de ses proches, ni le sien sur une glace, les photographies des personnages célèbres qui lui sont présentées ne sont pas identifiées, il ne différencie pas les sexes à partir du visage, ne peut apprécier l'âge de la personne qui lui fait face et signale volontiers que ses interlocuteurs ont un visage terne et sans expression. Cependant, ce même malade est souvent capable de nommer, en les distinguant, les différentes parties du visage qu'il a devant lui, mais il ne peut en réaliser une synthèse connue.

Tous les degrés existent entre l'impossibilité totale à reconnaître les visages et une simple difficulté nécessitant la pratique de tests adaptés pour la mettre en évidence. Ce trouble très particulier pose des problèmes spécifiques concernant les possibilités de compensation, la localisation de la lésion droite ou gauche, la durée des troubles en fonction de l'importance et de l'étendue des lésions.

Les mécanismes de compensation :
Au début, seul le recours à une source d'information différente de la vue permet l'identification des visages et le patient reconnaît son interlocuteur d'après la voix. C'est dire qu'il aura tendance à laisser à l'autre l'initiative de la conversation afin de l'identifier.

Dans un deuxième temps, une stratégie sera mise au point, permettant de compenser le trouble et de reconnaître : l'interlocuteur grâce à la vue et indépendamment de la voix. En effet, si le visage ne peut être identifié, il peut être exploré et ses principaux traits analysés. Le patient en perçoit les particularités, les analyse correctement : couleur et coupe des cheveux, présence ou non de moustache, de barbe, tâches congénitales ou cicatrices, accessoires divers comme des lunettes (forme, monture), une pipe. Des indices complémentaires lui seront fournis par l'étude de la corpulence, de la démarche, des vêtements et également de l'environnement : l'interlocuteur se trouve-t-il dans un lieu familier ou non ? Dans le premier cas en effet, le champ de ses recherches s'en trouve réduit.

Les signes cliniques associés, importants à considérer, orientent vers une atteinte du carrefour occipito-temporal droit, les plus fréquents étant des troubles du champ visuel, surtout gauches, plus rarement bilatéraux, des troubles de l'orientation spatiale et un déficit de la mémoire topographique, une apraxie de l'habillage, une apraxie constructive, des troubles du schéma corporel. Il est à l'inverse rare qu'une aphasie, une apraxie idéatoire et idéo-motrice lui soient associées.

Ces constatations orientent vers une localisation lésionnelle hémisphérique droite (Les lésions concernent surtout la région temporo-occipitale droite et les atteintes bilatérales sont fréquentes) . Il est d'ailleurs difficile de ne pas mettre en parallèle la stratégie mise au point par les prosopagnosiques avec celle observée chez des patients atteints de troubles de la mémoire topographique, l'hémisphère gauche avec ses capacités d'analyse, vient ici aussi compenser les troubles liés à la lésion hémisphérique droite. En effet, lorsque des visages connus et inconnus sont présentés à des patients atteints d'une lésion hémisphérique droite ou gauche, il s'avère que les lésions droites sont à l'origine du plus grand nombre d'erreurs lors de la reconnaissance des visages connus et la lésion gauche dans l'analyse des visages inconnus. Dans un même ordre d'idées, si l'on soumet des sujets cérébro-lésés à un test de reconnaissance de l'expression des visages, soit de type émotionnel, soit de type conventionnel, on note un déficit objectif de la reconnaissance des expressions émotionnelles dans les lésions droites et des expressions conventionnelles dans les lésions gauches. Ces faits amènent à penser que l'hémisphère droit et le gauche ont des fonctions différentes dans l'analyse et l'appréhension des visages. Au premier revient la reconnaissance globale et l'appréciation des émotions qui s'expriment, au deuxième J'analyse des traits du visage qui, dans le cas de la prosognosie, est à la base des mécanismes de compensation.

Reste le problème de l'uni- ou bilatéralité des lésions: lorsqu'elles sont unilatérales, elles sont surtout droites et la récupération semble plus rapide, la bilatéralité expliquant probablement la longue durée du syndrome dans certaines observations.