Andrew N.
Meltzoff : «It is important to distinguish between
emotional contagion and true empathy, which is different in
that it involves the capacity to hold both your own
emotional state and another's simultaneously - rather than
to just "catch" their emotion and feel it as your own. On
the basis of the research in infants, emotional contagion
precede empathy in developmental terms and preceding both of
these, in the very youngest newborn babies, is the ability
to imitate another's actions and expressions.»
Il ne peut s'envisager de comprendre les
mécanismes neurobiologiques
responsables de la contagion du
bâillement sans s'intéresser
à d'autres aspects des neurosciences
cognitives : reconnaissances
des visages, rôle de l'imitation
etc... Jean Decety a dirigé la
rédaction de cet ouvrage publié
en juillet 2002, dont je vous recommande la
lecture. Extraits p120-125
"L'imitation des actions : Peu
d'études de neuro-imagerie
fonctionnelle ont à ce jour
exploré les mécanismes
neurophysiologiques impliqués dans
l'imitation en dehors de celles de Decety et
al. (1997) et de Grèzes, Costes et
Decety (1998, 1999) au cours desquelles les
modifications hémodynamiques
étaient détectées dans
le lobule pariétal inférieur et
dans le cortex prémoteur pendant
l'observation d'actions dans le but de les
imiter ultérieurement. Une
étude d'IRmf, réalisée
chez des sujets à qui il était
demandé d'observer et d'imiter des
mouvements des doigts, a montré une
activation de la région operculaire
frontale (aire de Broca) dans
l'hémisphère gauche et une
activation du cortex pariétal
supérieur (Iacoboni, et al., 1999).
Récemment, nous avons conduit une
étude de neuro-imagerie fonctionnelle
pour identifier les structures corticales
engagées lorsqu'un sujet imite les
actions réalisées par un
expérimentateur ou lorsque ses propres
actions sont imitées par
l'expérimentateur, comparé
à une condition de production
d'actions sans imitation (Decety,
Chaminade, Grèzes et Meltzoff,
2002). L'objectif principal était
de rechercher comment le cerveau distingue
une même action selon que sa source
(l'intention) est endogène ou
exogène.
Comme attendu, en plus des régions
impliquées dans le contrôle
moteur, un réseau d'activations
commun au sein du cortex pariétal et
du lobe frontal (les régions
préfrontales
dorso-médianes) a
été détecté entre
ces deux conditions d'imitation. Ce
réseau d'activations partagées
est cohérent avec l'hypothèse
d'un codage commun entre les actions du soi
et celles d'autrui. Un résultat
important et original de cette étude
provient de la comparaison des deux
conditions d'imitations. Une forte
augmentation du débit sanguin
cérébral a été
détectée dans le lobule
pariétal inférieur droit
lorsque les sujets sont imités par
autrui. Cette région est reconnue pour
jouer un rôle clé dans la
conscience du corps (Mesulam, 1988). Sa
lésion peut entraîner chez des
patients neurologiques un syndrome
d'influence, c'est-à-dire des
expériences dans lesquelles leurs
pensées, paroles, actions, sentiments
et désirs d'agir sont
remplacés, sont influencés ou
même placés sous le
contrôle d'agents externes plutôt
que sous leur propre volonté (Mesulam,
1981). Une étude PET a d'ailleurs
rapporté que des patients
schizophrènes qui souffrent du
syndrome d'influence ont une suractivation du
lobule pariétal droit au cours de
l'exécution libre de mouvements d'un
joystick, en comparaison à un groupe
de sujets normaux (Spence et al., 1997). Les
auteurs de cette étude arguent que
cette réponse anormale pourrait
déclencher une attribution
erronée de la source de l'action
à des agents externes. Nos
résultats suggèrent que, chez
le sujet normal, cette région est
fortement impliquée et joue sans doute
un rôle crucial pour distinguer les
actions générées de
façon endogène de celles
produites par autrui." [...]
Si l'on regroupe les données
neurophysiologiques concernant
l'implémentation neuronale des trois
types d'activité (préparation,
simulation et observation pour imiter) qui
impliquent les représentations
motrices, on s'aperçoit qu'il existe
une étroite équivalence
fonctionnelle entre elles. De nombreuses
régions corticales sont en effet
communes : le cortex prémoteur
dorsal, le cortex pariétal
inférieur, le cervelet latéral
(pour une méta-analyse du
recouvrement des régions, voir
Grèzes et
Decety, 2001, 2002). Si l'on ajoute le
cortex moteur primaire, retrouvé
dans certaines études au cours de la
simulation (cf. supra) et même au cours
de la perception de mouvements biologiques
(Stevens et al., 2000), c'est bien l'ensemble
du réseau neurophysiologique qui
participe à la programmation et
à l'exécution de l'action, qui
s'active. [...]
En revanche d'autres régions
cérébrales semblent
spécifiques et donc non
partagées par l'exécution, la
préparation, la simulation et
l'observation. En particulier, l'observation
engage aussi des régions
impliquées dans la reconnaissance
visuelle (cortex temporal médian,
gyrus parahippocampique) et dans le
codage moteur des actions (gyrus frontal
inférieur). On peut
considérer qu'il s'agit d'une
étape de décodage et
d'intégration de l'information
visuelle et motrice qui sera ensuite
envoyée aux régions
exécutives et qui n'est pas
nécessaire à la simulation.
L'activation du gyrus frontal
inférieur dans
l'hémisphère gauche (qui
correspondrait à la région F5
chez le singe), au cours de l'observation
d'actions peut aussi simplement s'expliquer
par une verbalisation silencieuse des sujets.
Cette zone appartient en effet à la
région de Broca dont la lésion
provoque une aphasie de production. Cette
région s'active également lors
de la génération explicite ou
mentale de verbes d'actions ou encore dans
l'identification d'outils (Grèzes
et Decety, 2001, 2002 , Martin, Haxby,
Lalonde, Wiggs et Ungerleider, 1995 ; Martin,
Wiggs, Ungerleider et Haxby, 1996).
Les modalités de fonctionnement
d'une représentation ne se limitent
donc pas pour un sujet donné, à
ses propres états internes. Au
contraire, le fait que la production d'une
action, son imagination et son observation
impliquent des mécanismes
neurologiques communs suggère une
équivalence entre les
représentations propres au sujet et
les représentations nées de
l'interaction avec d'autres individus
(Jeannerod, 1999). Le fait que beaucoup de
ces représentations soient des
représentations partagées rend
bien compte de la capacité que
possède chaque individu d'attribuer
des états mentaux et des intentions
à autrui.
La correspondance entre action
observée et réalisée
peut être métaphoriquement
décrite en termes de
résonance. Cette résonance
chez l'observateur ne produit pas
nécessairement un mouvement ou une
action mais pourrait servir à d'autres
fonctions comme activer, à un niveau
infra-conscient, l'expérience
subjective (avec sa valence affective et
émotionnelle) qui serait
associée à la
génération de l'action
perçue. Ainsi percevoir les actions
réalisées par autrui
impliquerait un processus de simulation qui
permettrait d'en extraire les intentions. Si
les actions perçues ne sont pas
déclenchées, c'est probablement
parce qu'un mécanisme inhibiteur est
parallèlement activé. Certaines
observations neurologiques appuient cette
hypothèse. Il a été en
effet décrit que des patients,
à la suite de lésions frontales
(orbitaires) manifestent un syndrome
d'imitation et d'utilisation. Ce tableau
clinique a été
interprété comme le signe d'une
levée d'inhibition du cortex orbitaire
sur les régions pariétales
(Lhermitte, Pillon et Serdaru, 1986). Cela
constitue une évidence
supplémentaire quant au rôle de
cette région dans l'inhibtion des
actions. D'autre part, le fait que les jeunes
enfants, et même les
bébés, sont d'excellents
imitateurs s'explique aussi par le calendrier
de la maturation
neuro-développementale (Allmann,
1999). Le cortex préfrontal, dont la
fonction cardinale est l'inhibition, n'est
pas mature à la naissance. Si la
maturation cytoarchitecturale est atteinte
à la naissance, il n'en est pas de
même pour la myélinisation des
fibres nerveuses dont la maturation se
poursuit jusqu'à l'adolescence. Ce
défaut d'inhibition au début de
la vie confère un avantage
développemental certain, en
particulier pour permettre un fonctionnement
rapide et peu coûteux de l'imitation
(Decety, 2000). Puis les mécanismes
inhibiteurs se développent
progressivement en parallèle avec les
capacités cognitives pour lesquelles
l'inhibition est indispensable (Houdé,
1995, 2000)
Imitation is a natural mechanism
involving perception-action coupling which
plays a central role in the development of
understanding that other people, like the
self, are mental agents.
PET was used to examine the hemodynamic
changes occurring in a reciprocal imitation
paradigm. Eighteen subjects (a) imitated the
actiens of the experimenter, (b) had their
actions imitated by the experimenter, (c)
freely produced actions, or (d) freely
produced actions while watching
différent actions made by the
experimenter. In a baseline condition,
subjects simply watched the experimenter's
actions.
Specific increases were detected in the
left STS and in the inférior parietal
cortex in conditions involving imitation. The
left inferior parietal is specifically
involved in producing imitation, whereas the
right homologous region is more activated
when one's own actions are imitated by
another person.
This pattern of results suggests that
these regions play a specific role in
distinguishing internally produced actions
front those generated by others.
A large body of psychophysical
evidence suggests that perception of human
movement is constrained by the observer's
motor competence. PET measurements of
regional cerebral blood flow were performed
in eight healthy subjects who were requested,
in a forced-choice paradigm, to anticipate
the outcome of a single moving dot trajectory
depicting the beginning of either mechanical,
pointing or writing movements. Selective
activation of the left premotor cortex and of
the right intraparietal sulcus was associated
with visual anticipation of pointing
movements while the left frontal operculum
and superior parietal lobule were found to be
activated during anticipation of writing
movements. These results are discussed in the
perspective that the motor system is part of
a simulation nerwork, which is used to
interpret perceived actions.