- Spasmes
respiratoires mixtes:
bâillement et
éternûment
hystériques
- Leçons cliniques sur
l'hystérie et l'hypnotisme
1891
-
- Fulgence Raymond devient interne chez
Charcot en 1875 quand celui-ci dispense
l'essentiel de ses cours consacrés aux
localisations cérébrales. Ils
décriront ensemble le syndrome
post-poliomyélitique. Son successeur est
Albert Pitres (1848-1928). Né à
Bordeaux, fils d'épicière, il y
commença ses études de
médecine à l'Ecole de
médecine qui n'était pas encore
une faculté. Après avoir
été interne de Bordeaux de 1867
à 1869, il est reçu interne des
hôpitaux de Paris en 1872 et entre dans le
service de Charcot en 1876. Il soutint sa
thèse, présidée par
Charcot, le 26 mai 1877, devant Charles
Lasègue (1816-1883), Albert Blum et
Georges Hayem (1841-1933) : « Recherches
sur les lésions du centre ovale des
hémisphères
cérébraux, étudiées
au point de vue des localisations
cérébrales ». Seulement un an
plus tard, il devint agrégé
après avoir soutenu une thèse sur
« les hypertrophies et les dilatations
cardiaques, indépendantes des
lésions valvulaires ».
-
- Albert Pitres, interne en
1874
- © Extrait
de l'Album de l'internat de La
Salpêtrière conservé
à la Bibliothèque Charcot à
l'hôpital de la
Salpêtrière
- (Université
Pierre et Marie Curie, Paris)
-
- Henri Gintrac (1820-1878), son premier
maître à Bordeaux, et premier doyen
de la toute nouvelle faculté de
médecine, fit alors appel à lui
pour enseigner l'histologie qu'il avait apprise
au laboratoire de Louis Ranvier (1835-1922), au
Collège de France. Puis Pitres occupa,
à 32 ans, la chaire de clinique
médicale de 1881 à 1919. En 1885,
à 37 ans, il devenait doyen de la
faculté de médecine de Bordeaux et
le resta plus de 20 ans, anticipant avec
clairvoyance la naissance des
spécialités médicales et la
nécessité de créer au sein
de sa faculté les chaires correspondantes
(42,43). Son année passée chez
Charcot marqua toute sa carrière. Imbu de
la méthode anatomo-clinique, il ne cessa
jamais ses recherches, commencées avec sa
thèse, sur les localisations
cérébrales (44). Jean Flourens
(1794-1867) avait conclu que le cortex n'avait
pas d'utilité pour mobiliser les membres,
après des expériences de
décortication, pratiquées chez la
grenouille et le pigeon. Gustav Fritsch
(1838-1927) et Eduard Hitzig (1838-1907), en
Allemagne, publièrent, en 1870, les
résultats de leurs expériences
d'électrostimulation du cortex de chiens,
prouvant le rôle du cortex dans la
motricité. Il est nécessaire de se
replacer dans le contexte historique de la
défaite militaire de la France contre la
Prusse à cette époque. Une
véritable course-poursuite aux
découvertes s'engagea entre les deux
rives du Rhin. En collaboration avec son ami
Nicolas François-Franck (1849-1921),
Pitres utilisa des singes pour ses recherches.
Associées aux études cliniques et
nécropsiques menées par Charcot,
les travaux de Pitres permirent de
décrire des centres moteurs des muscles
de la face, de la langue, des cordes vocales, de
la motricité oculaires etc.. En 1895,
Charcot et Pitres résumaient leurs
découvertes dans un livre « les
centres moteurs corticaux ». C'est ainsi
que Pitres démontrât qu'à
côté du faisceau pyramidal
croisé, il existait un faisceau direct,
expliquant certaines hémiplégies
dissociées (45).
-
-
- A l'image de son maître Charcot,
Pitres professa des leçons cliniques sur
l'hystérie, sans s'éloigner de la
ligne de La Salpêtrière. Ainsi
paraîtront en 1891, deux gros volumes,
« Leçons cliniques sur
l'hystérie », préfacés
par Charcot. Cette introduction permet à
Charcot de se justifier : « Aussi n'est-ce
pas sans une grande satisfaction que j'ai vu vos
études confirmer, non seulement sur les
points essentiels, mais encore le plus souvent
jusque dans les détails les plus
minutieux, le résultats obtenus à
la Salpêtrière dans nos recherches
faites sur les mêmes sujets. On a
plusieurs fois suspecté la
légitimité de nos descriptions en
objectant que les malades qui nous ont servi de
modèles, confinés dans un service
spécial, ont dû par contamination
réciproque subir une espèce
d'entraînement et acquérir, ainsi
une symptomatologie étrange,
compliquée à l'excès, qui
ne répondrait pas aux types naturels.
C'est ainsi qu'on a parlé, à la
vérité toujours sans preuve, d'une
hystérie propre à la
Salpêtrière, hystérie
artificielle, hystérie de culture,
perfectionnée en quelque sorte par
l'éducation, et qui ne s'observerait pas
dans d'autres milieux. A ces critiques reposant
uniquement sur des vues purement
spéculatives, nous avons depuis longtemps
répondu par l'exposé de faits
cliniques nombreux, montrant par exemple que
pour ce qui est relatif â la grande
attaque d'hystérie, le rôle de
l'« imitation », de la «
suggestion », considérées
comme modificateurs des apparences morbides,
tout intéressant qu'il soit à
étudier, n'est cependant, contrairement
à ce qu'on a gratuitement avancé,
que relativement restreint et fort
limité. Dans la réalité des
choses, les modifications produites par ces
causes n'affectent que la surface; elles ne
portent pas sur le fond, sur la trame, non plus
que sur l'évolution
générale des
phénomènes morbides. « La
charpente de l'édifice, comme le dit
ingénieusement Paul Richer dans le beau
livre que vous connaissez bien, reste partout la
même; l'ornementation seule diffère
». Du même coup d'ailleurs on
démontrait, toujours à l'aide de
faits cliniques appropriés, que les
règles qui président à la
constitution et à l'évolution de
l'attaque sont communes à la pratique
d'hôpital et à celle de la ville;
qu'elles sont valables pour tous les temps, pour
tous les pays, chez toutes les races, et que les
variations qu'elles subissent n'en affectent en
rien l'universalité puisqu'elles peuvent
toujours être rattachées
logiquement au type fondamental. Vos
leçons viennent à leur tour, je
suis bien heureux de le constater, prêter
un puissant appui à la thèse que
je défends. Elles prouvent, en effet,
péremptoirement qu'en province, pourvu
que le matériel neuro-pathologique dont
on dispose soit suffisant pour permettre
d'embrasser toutes ses formes, de
reconnaître ses grands aspects,
l'hystérie ne diffère en rien,
absolument rien, de ce qu'elle est chez nous,
à Paris ».
-
- Sur la fin de sa vie, après qu'Ernest
Dupré (1862-1921) eut
développé le thème de la
mythomanie, Pitres reconnût humblement ses
errements. Reprenant le concept de Charles
Féré (1852-1907), de Jules
Séglas (1856-1939) et de Gilbert Ballet
(1853-1916) « les idées fixes ont
leur origine dans l'émotivité
», Pitres écrit en collaboration
avec Emmanuel Régis (1855-1918) «
Les obsessions et les impulsions ». Ils
décrivent tous les types de compulsions,
en insistant sur le concept étiologique
de « dégénérescence
». Auteur de l'article Encéphale du
Dictionnaire Encyclopédique des Sciences
Médicales (1864-1889) de Dechambre, il
écrivit avec Louis Vaillard (1850-1935)
« Contribution à l'étude des
névrites périphériques non
traumatiques » en 1883. Cette même
année, Pitres présida la
thèse de Célestin Sieur
(1860-1955) où est décrit «
le signe du sou », permettant de
préciser l'importance des
épanchements pleuraux en percutant le
thorax avec une pièce métallique
pendant l'auscultation au stéthoscope. Il
s'associa, en 1925, avec l'anatomiste Léo
Testut (1849-1925) pour proposer aux
étudiants en médecine un
traité « Les nerfs en schéma,
anatomie et physiopathologie ». Pitres
avait déjà pris part à la
guerre de 1870. Pendant la première
guerre mondiale, malgré son âge, il
obtint de diriger un centre neurologique. Membre
de l'Académie de Médecine, couvert
d'honneurs, il s'éteignit à 80 ans
des suites d'une chute (45).
-
- 42. De Fleury M. Le Professeur Albert
Pitres. Le Progrès Médical.
1928;16:682-686.
-
- 43. Verger H. Le Professeur A. Pitres de
Bordeaux (1848-1928). Paris Médical.
1928;68:515-516.
-
- 44. Jeannerod M. La contribution de JM.
Charcot à l'étude des
localisations motrices chez l'homme. Rev Neurol
(Paris). 1994;150:536-542.
-
- 45. Leal F. Pitres Albert (1848-1928) et
Regis Emmanuel (1855-1918), les deux fondateurs
de l'école neuropsychiatrique de
Bordeaux. Thèse n°163. Bordeaux.
1997
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