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- Charles-Prosper Ollivier d'Angers
(1796-1845) est reconnu pour avoir forgé
le mot syringomyélie d'après le
grec syringo, «creusé en forme de
tuyau » et « myélie », au
sein de la moelle. Ce mot apparaît dans la
deuxième édition, en 1827, de son
« Traité des maladies de la
moelle épinière contenant
l'histoire anatomique, physiologique et
pathologique de ce centre nerveux chez
l'homme » dont trois éditions,
progressivement enrichies, paraîtront de
1823 à 1837. Ollivier fait
véritablement oeuvre de pionnier en
composant ainsi ce traité consacré
exclusivement à la pathologie
médullaire.
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- Ollivier naît le 11 octobre 1796
à Angers (Maine et Loire, France). Son
père alors épicier, et qui
deviendra pharmacien en 1805, le déclara
sous le nom de Charles-Prosper à
l'état civil et fils légitime. Ce
curieux père avait en effet
déclaré, trois jours plus
tôt, un autre garçon, né
hors mariage, qu'il avait nommé
Prosper-Charles, qui deviendra pharmacien ! A la
fin de ses études au lycée
impérial, la carrière militaire
paraissait à Ollivier la seule chance de
prompts succès, à cette
époque glorieuse de l'Empire
napoléonien. Admis à l'Ecole
Militaire de Saint-Cyr, il en sort
sous-lieutenant en 1813 et rejoint les
armées de Napoléon, après
la déroute devant Moscou, à
Mayence. Il participe à la bataille de
Hanau le 30 octobre 1813, au cours de laquelle
il contracte le typhus. Il arrive malgré
cela à continuer la retraite vers la
France. Sa carrière militaire se termine
lors de l'abdication de Napoléon le 4
avril 1814, Ollivier n'a que 17 ans.
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- Charles-Prosper Ollivier
d'Angers
- par Guillaume Bodinier
1821
- Université d'Angers,
collection publique
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- Non sans avoir hésité à
s'orienter vers d'autres carrières, il
s'inscrit à l'école de
médecine d'Angers, y préparant
l'officiat de santé. Après avoir
été interne dans sa ville natale,
il est obligé de gagner Paris, en 1820,
afin de soutenir une thèse de doctorat.
Il y fréquente l'hôpital de La
Charité et l'Hôtel-Dieu, suit
l'enseignement de l'Ecole Pratique et sympathise
avec deux maîtres, angevins de naissance
comme lui, Pierre-Auguste Béclard
(1785-1825), professeur d'anatomie et
Mathieu-Joseph Orfila (1787-1853), professeur de
médecine légale. Béclard
lui confie le sujet de sa thèse qu'il
soutient le 12 juin 1823 : « Essai sur
l'anatomie et les vices de conformation de la
moelle épinière chez l'homme
» qu'il décrit dans son introduction
comme un travail « très
incomplet puisque je ne donne ici qu'une
très petite partie du sujet que je
m'étais proposé de
traiter ». Ollivier est
couronné d'une médaille d'or pour
son travail, délivrée par la
Société Royale de Médecine
de Marseille. Celle-ci lui ouvre les portes de
l'éditeur de la rue de l'Ecole de
Médecine, à Paris, A. Crevot qui
publie, le 23 octobre 1823, la première
édition de son mémoire, plus
complet que sa thèse :
« De la moelle épinière
et ses maladies » devenant pour sa seconde
édition « Traité de la
moelle épinière et ses
maladies » en deux volumes en
1827.
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- Pendant les dix années suivantes,
Ollivier va exercer la chirurgie dans un
dispensaire de la Société
Philanthropique de Paris. Sur recommandations
d'Orfila, il est commis de plus en plus souvent
en qualité d'expert judiciaire (Bayard
H.L. Notice C.P. Ollivier d'Angers. Annales
d'hygiène publique et de médecine
légale. Paris. Baillière.
1845;34:5-20). En 1826, il devient directeur
du journal « Archives de
Médecine Légale » et est
élu membre de l'Académie Royale de
Médecine. Il remplace Béclard,
décédé
prématurément, comme
rédacteur du Dictionnaire de
Médecine de Nicolas-Philibert Adelon
(1782-1862), y traitant des plaies, des
anévrysmes, de la sciatique, de
« la pourriture
d'hôpital » etc (Adelon N,
Béclard PA, Biette L. Dictionnaire de
médecine. Paris. Béchet jeune.
1821-1828. 21 vol.). Il contribue au
Dictionnaire historique de la médecine
ancienne et moderne de Jean-Eugène
Dezeimeris (1799-1851) (Dezeimeris JE,
Ollivier CP, Raige-Delorme J. Dictionnaire
historique de la médecine ancienne et
moderne. Paris. Béchet jeune. 1826-1839.
5 vol.).
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- La Ville de Paris le décore en 1832
pour son dévouement au cours de
l'épidémie de choléra qui
ravage la capitale après la Provence et
la Bourgogne. Homme d'activité
débordante, il consacre l'essentiel de
son temps, au cours des 15 dernières
années de sa vie, à la
médecine légale :
définition de l'infanticide,
appréciation de l'âge gestationnel,
degré de culpabilité d'un malade
mental (monomanie, actuelle paranoïa),
définition des critères cliniques
constatant la mort (Morin-Bateau M.
Charles-Prosper Ollivier d'Angers (1796-1845):
à l'aube de la neurologie moderne.
Thèse de doctorat en Médecine.
Angers. 1986. 156p.). Initiateur de
l'utilisation du microscope en expertise
médico-légale, il distingue les
poils d'animaux des cheveux humains sur une
hache sensée être arme d'un crime
(Ollivier d'Anger ChP. Nouvelle application
de l'emploi du microscope dans les expertises
médico-légales. Archives
générales de médecine.
Paris. Béchet jeune. Panckoucke. 1838.
série "3e et nouvelle série",
n° 03. 455-460). A partir de juin 1844,
Ollivier se plaint de céphalées
continues intolérables, s'aggravant peu
à peu, accompagnées de
vomissements et d'une baisse progressive de
l'acuité visuelle. Il meurt 11 mars 1845
d'une probable hypertension
intra-crânienne d'origine tumorale.
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- Description des pathologies
médullaires
- Ollivier met deux ans à collationner
les cas cliniques qui lui permettent de
présenter sa thèse. Peu avant,
John Abercrombie (1780-1844) avait publié
à Edinburgh « Observations on
the Diseases of the Spinal Marrow »
(The Edinburgh Medical and Surgical Journal,
July 1818), mais Ollivier semble l'avoir
ignoré et ne le cite jamais. Ollivier
explique le peu de données
recueillies avant sa thèse:
« le petit nombre de faits
rapportés par les observateurs le prouve
[...] cet organe est un de ceux qui sont
le moins souvent affectés. Si mes
recherches m'ont conduit ainsi à un
résultat en quelque sorte négatif,
je crois qu'il concourt à prouver que les
affections de la moelle spinale sont peu
fréquentes chez l'homme ». Et plus
loin : « le plus grand nombre des
maladie de la moelle épinière
avaient été observées par
les anciens (cf Hippocrate et Galien); cette
partie de la pathologie est à peu
près restée au même point
depuis cette époque ».
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- Ollivier commence en proposant une
embryologie comparée de la moelle de
l'homme et des animaux tout à fait
originale puis il passe en revue l'anatomie et
l'anatomo-pathologie macroscopique de la moelle.
Il décrit des malformations comme le
spina-bifida nommés « les vices
de conformation », « la
respiration de l'hydrorachis »
précisant l'effet de l'inspiration et de
l'expiration sur les mouvements de la moelle
chez des hydrocéphales, une
hétérotopie
bulbo-cérébelleuse avec
méningocèle reconnues 60 ans plus
tard comme malformation d'Arnold-Chiari, des
atteintes traumatiques, inflammatoires et
infectieuses des méninges. Après
avoir cité les expériences
d'Albrecht von Haller (1708-1777) et de Domenico
Cotugno (1736-1822), Ollivier évoque les
découvertes de la circulation du liquide
cérébro-spinal de son contemporain
François Magendie (1783-1855) et
avance une fonction : « la couche
liquide qui enveloppe la moelle
épinière dans l'état normal
et physiologique, remplit tous les vides qui
pourraient exister entre cet organe et ses
membranes ;[...] il contribue
beaucoup à amortir les secousses
imprimées au rachis, et, qui, sans cela,
seraient transmises avec plus de force au centre
nerveux qu'il entoure et
protège ».
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- La syringomyélie
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- Dès 1823, il soutient que
« l'examen de la structure
intérieure de la moelle
épinière démontre qu'il
n'existe pas dans son centre un canal, comme
quelques anatomistes l'ont
pensé ». Il ne changera jamais
d'opinion. Il est probable que les
difficultés techniques de
prélèvement et de dissection ne
permettant qu'un examen macroscopique de la
moelle, plusieurs jours après un
décès, sont la cause de cette
erreur. Dans le chapitre qu'il consacre à
la pathologie, il ajoute: « plusieurs
anatomistes ont admis l'existence d'un canal
dans le milieu de la moelle
épinière [...]. Il est
à présumer que ce canal
était en quelque sorte une prolongation
du quatrième ventricule et qu'il
était analogue à celui
observé par M. Portal ». Dès
1804, Antoine Portal
1742-1832) écrit en effet:
« l'examen de la moelle de divers
sujets, a fait voir dans son milieu un canal
grêle qui descendait plus ou moins bas, et
qui communiquait supérieurement avec le
quatrième ventricule; il paroît
convenable de penser que ce canal existe
naturellement, mais qu'il ne devient bien
apparent que par état de maladie, comme
les sujets morts de spina bifida »
(Portal A. Cours d'anatomie médicale
ou élémens de l'anatomie de
l'homme avec des remarques physiologiques et
pathologiques et les résultats de
l'observation sur le siège et la nature
des maladies, d'après l'ouverture des
corps. Paris. Baudouin. 1804. tome 4.
590p.).
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- Louis Florentin
Calmeil (1798-1895) précise, en 1828,
que « plusieurs animaux
vertébrés (des oiseaux, des
reptiles, des poissons) conservent, pendant
toute la vie, un canal au centre de la moelle.
Quelques anatomistes ont rencontré une
disposition semblable chez l'homme adulte. Cette
disposition leur a été
contestée. J'ai fait de nombreuses
dissections tendant à éclairer ce
point d'anatomie humaine. Il est certain qu'on
rencontre assez souvent, même à un
âge avancé, un canal central dans
la moelle épinière»
(Calmeil LF. Recherches sur la structure, les
fonctions et le ramollissement de la mlle
épinière. Extrait du Journal des
Progrès des Sciences et Institutions
Médicales. Paris. Chez Villeret. 1828.
107p.). Malgré ces observations,
Ollivier reprend néanmoins les termes de
sa thèse dans son livre de 1827 et de
1837, se contentant de souligner que parmi les
observations de Calmeil: « plusieurs
sont autant d'exemples d'une
variété d'organisation primitive
de la moelle épinière, tandis que
dans d'autres le canal observé dans la
moelle était bien évidemment le
produit d'une altération pathologique
développée postérieurement
à la naissance ». Ainsi, on ne
peut reconnaître à Ollivier que la
paternité du mot syringomyélie,
description purement anatomo-pathologique mal
interprétée, et qu'il n'a reconnu
aucune symptomatologie liée à
« la moelle creusée en forme de
tuyau ». Il faudra attendre 1882 et
les travaux allemands de Otto Kahler (1849-1893)
et Friedrich Schultze (1848-1934) pour que la
symptomatologie clinique de la
syringomyélie soit associée
à la présence d'un syrinx
anatomo-pathologique (von Kahler O.
Casuistiche Beiträge. Prager Medicinische
Wochenschrift 18/10/1882;7(42):413-415 /
01/11/1882;7(44):433-436 /
08/11/1882;7(45):443-445.) (Schultze F.
Beiträge zur Pathologie und pathologischen
Anatomie des centralen Nervensystems. Ueber
Splat-, Höhlen- und Gliombildung im
Rückenmarke und in der Medulla oblongata.
Archiv für pathologische Anatomie und
Physiologie und für klinische Medicin.
Berlin. von G. Reimer. 1882. Band 87; Drittes
Heft (1 März 1882): 510-540.).
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- Enfin, Jean-Martin
Charcot (1825-1893) le citera dans ses
leçons sur les lésions de la
moelle épinière en 1872, comme
ayant probablement décrit deux
observations et l'anatomo-pathologie
macroscopique de la sclérose en
plaques : « paralysie
incomplète du mouvement des membres
thoraciques puis du tronc et des membres
inférieurs ; affaiblissement moins
marqué du sentiment. Mort à la
suite d'une pneumonie. Ecartement des cordons
médullaires postérieurs ;
substance grise hypertrophiée et
altérée, à nu, à la
face postérieure de la moelle »
(Observation CXXXIII) et dans un autre cas
« induration extrême de toute la
moelle » (Observation CXXXII).
Ollivier parle de myélite et bien qu'il
ne cite pas d'atteinte de la substance blanche,
il a le mérite de bâtir les
fondations nosologiques des pathologies
médullaires que les cliniciens du XIX
° siècle parachèveront,
remédiant « au profond oubli
dans lequel est tombé la moelle
rachidienne » comme il le disait
lui-même. (Charcot JM. Leçons
sur les maladies du système nerveux
faites à La Salpêtrière,
recueillies et publiées par Bourneville.
Paris. Adrien Delahaye. 1872-1873.
368p.)
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