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mise à jour du 8 septembre 2002
 L'Encyclopédie
Diderot
Bâillement
L'Encyclopédie de Diderot et D'Alembert
page 17 tome II de 1751
orthographe respectée sauf le s en place du f

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BÂILLEMENT, s. m. (Physiolog.) ouverture involontaire de la bouche, occasionnée par quelque vapeur ou ventuosité qui cherche à s'échapper, & témoignant ordinairement la fatigue, l'ennnui ou l'envie de dormir.

Le remède qu'Hippocrate préférait contre le bâillement, est de garder long-tems sa respiration. Il recommande la même chose contre le hocquet. (Voyez Hocquet). Suivant l'ancien système, le bâillement n'est jamais produit sans quelque irritation qui détermine les esprits animaux à couler en trop grande abondance dans la membrane nerveuse de l'oesophage, qu'on a regardé comme le siège du bâillement. Quant à cette irritation, on la suppose occasionnée par une humeur importune qui humecte la membrane de l'oesophage, & qui vient ou des glandes répandues dans toute cette membrane, ou des vapeurs acides de l'estomac rassemblées sur les parois de l'oesophage. Par ce moyen les fibres nerveuses de la membrane du gosier étant irritées; elles dilatent le gosier, & contraignent la bouche à suivre le même mouvement.

Mais cette explication du bâillement a depuis peu donné lieu à une nouvelle plus méchanique & plus satisfaisante.

Le bâillement est produit par expansion de la plûpart des muscles du mouvement volontaire, mais sur-tout par ceux de la respiration. Il se forme en inspirant doucement une grande quantité d'air, qu'on retient & qu'on raréfie pendant quelque tems dans les poumons, après quoi on le laisse échapper peu-à-peu, ce qui remet les muscles dans leur état naturel.

De-là, l'effet du bâillement est de mouvoir, d'accélérer & de distribuer les humeurs du corps dans tous les vaisseaux; & de disposer par conséquent les organes de la sensation & tous les muscles du corps, à s'acquitter chacun de leur côté de leurs fonctions respectives. (voy. Boerhaave, Inst méd S.638.L).

BÂILLEMENT, s.m. Ce mot est aussi un terme de Grammaire ; on dit également hiatus : mais ce dernier est latin. Il y a bâillement toutes les fois qu'un mot terminé par une voyelle, est suivi d'un autre qui commence par une voyelle, comme dans "il m'obligea à y aller"; alors la bouche demeure ouverte entre les deux voyelles, par la nécessité de donner passage à l'air qui forme l'une puis l'autre sans aucune consonne intermédiaire; ce concours de voyelles est plus pénible à exécuter pour celui qui parle, & par conséquent moins agréable à entendre pour celui qui écoute; c'est ce qui a fait que dans toutes les langues, le mécanisme de la parole a introduit ou l'élision de la voyelle du mot précédent, ou une consonne euphonique entre les deux voyelles. L'élision se pratiquoit même en prose chez les Romains. « il n'y a personne parmi nous, quelque grossier qu'il soit, dit Cicéron, qui ne cherche à éviter le concours des voyelles, & qui ne les réunisse dans l'occasion. Quod quidem lingua sic observat, nemo ut tam rusticus sit, quin vocales nolit conjungere. Cic.Orator°130. Pour nous, excepté avec quelques monosyllabes, nous ne faisons usage de l'élision que lorsque le mot suivi d'une voyelle est terminé par un e muet; par exemple, une sincère amitié, on prononce sincer-amitié. On élide aussi l'i de si en si il, qu'on prononce s'il; on dit aussi m'amie dans le style familier, au lieu de ma amie ou de mon amie; nos pères disaient m'amour.

Pour éviter de tenir la bouche ouverte entre deux voyaelles,& pour se procurer plus de facilité dans la prononciation , le mécanisme de la parole a introduit dans toutes les langues, outre l'élision, l'usage des lettres euphoniques,& comme dit Cicéron, on a sacrifié les règles de la Grammaire à la facilité de la prononciation: Consuctudini auribus indulgenti libenter obsequor...Impetratum est à consuetudine ut peccare suavitatis causâ liceret. Cicer. Orator.n.138. ansi nous disons mon ame, mon épée, plûtôt que ma ame, ma épée. Nous mettons un t euphonique dans y-a-t-il, dira-t-on; & ceux qui au lieu de tiret ou trait d'union mettent une apostrophe n'est destinée qu'à marquer le supression d'une voyelle, or il n'y a point ici de voyelle élidée ou supprimée.

Quand nous disons si l'on au lieu de si on, l' n'est ponit alors une lettre euphonique, quoi qu'en dise M l'abbé Girard, tom 1 p344. On est un abrégé de homme; on dit l'on comme on dit l'homme. On m'a dit, c'est à dire un homme, quelqu'un m'adit. On, marque une proposition indéfinie, individuum vagum. Il est vrai que quoiqu'il soit indifférent pour les sens de dire on dit ou l'on dit, l'un doit être quelques fois préféré à l'autre, selon ce qui précède ou ce qui suit, c'est l'oreille à le décider; & quand elle préfère l'on au simple on, c'est souvent par la raison de l'euphonie, c'est à dire par la douceur qui résulte à l'oreille de la rencontre de certaines syllabes. Au reste ce mot euphonie est tout grec, bien, son.

Nos voyelles sont quelques fois suivies d'un son nasal, qui fait qu'on les appelle alors voyelles nasales. Ce son nasal est un son qui peut être continué, ce qui est le caractère distinctif de toute voyelle: ce son nasal laisse donc la bouche ouverte; & quoiqu'il soit marqué dans l'écriture par un n, il est une véritable voyelle: & les poètes doivent éviter de le faire suivre par un mot qui commence par une voyelle, à moins que ce ne soit dans les occasions où l'usage a introduit un n euphonique entre la voyelle nasale & celle du mot qui suit.

Lorsque l'adjectif qui finit par un son nasal est suivi d'un substantif qui commence par une voyelle, alors on met l'n euphonique entre les deux, du moins, dans la prononciation; par exemple, un-n-enfant, bon-n-homme, commun-n-accord, mon-n-ami. La particule on est aussi suivie de l'n euphonique, o,-n-a.Mais si le substantif précède, il y a ordinairement un bâillement, un écran illuminé, un tyran odieux, un entretien honnête, une citation équivoque, un parfum incommode; on dine dira pas un tyran-n-odieux, un entretien-n-honnête &tc;. On dit aussi un bassin à barbe, & non un bassin-n-à barbe. Je sais bien que ceux qui déclament des vers où le poète n'a pas connu ces voyelles nasales, ajoûtent l'n euphonique, croyant que cette n est la consonne du mot précédent: un peu d'attention les détronperoit: car, prenez-y-garde, quand vous dites il est bon-n-homme, bon-n-ami, vous prononcez bon & ensuite -n-homme, -n-ami. Cette prononciation est encore plus désagéable avec les diphtongues nasales, comme dans ce vers d'un de nos plus beaux opera : Ah! j'attendrai-long-tem, la nuit est loin encore; où l'acteur pour éviter le bâillement prononce loin-n-encore, ce qui est une prononciation normande. Le b & le d aussi des lettres euphoniques. En latin ambire est composé de l'ancienne préposition am, dont on se servoit au lieu de circum; & de ire; or comme am étoit en latin une voyelle nasale, qui étoit même élidée dans les vers, le b a été ajouté entre am & ire, euphonie causâ.

On dit en latin prosum, prosumus, prosui; ce verbe est composé de la préposition pro, & de sum: mais si après pro, le verbe commence par une voyelle, alors le mécanisme de la parole ajoûte un d, prosum, pro-d-es, pro-d-est, pro-d-eram, &tc. On peut faire de pareilles observations en d'autres langues, car il ne faut jamais perdre de vûe que les hommes sont par-tout des hommes, & qu'il y a dans la nature uniformité & variété.


L'Encyclopédie

Les libraires Le Breton et Briasson voulaient faire traduire en français l'Encyclopédie de l'Anglais Chambers. Ils s'adressèrent à Diderot, qui accepta, mais les décida à publier un dictionnaire beaucoup plus étendu et tout nouveau. Le Prospectus en parut en novembre 1750; le premier volume, avec un Discours préliminaire de d'Alembert, en juillet 1751. Bientôt les idées disséminées dans l'ouvrage commencent à inquiéter. Les inquiétudes se précisent lorsque l'abbé de Prades, ami des encyclopédistes, eut réussi à soutenir en Sorbonne, en 1751, une thèse où l'on découvrit, d'ailleurs après qu'elle eut été reçue, des propositions hérétiques. L'autorité prit prétexte de la thèse pour faire condamner l'Encyclopédie, dont les deux premiers volumes furent supprimés par arrêt du Conseil d'État, le 7 février 1752. Mais l'ouvrage avait des protecteurs : d'Argenson, Mme de Pompadour, Lamoignon, de Malesherbes, directeur de la librairie, qui n'ordonna une visite de la police chez Le Breton qu'après avoir caché chez lui les manuscrits. C'est ainsi que l'impression se poursuivit, à la faveur d'une tolérance tacite, dès 1753 et jusqu'en 1758.

Mais les ennemis de l'Encyclopédie se remuaient toujours. Les pamphlets se multipliaient. Fréron traitait le dictionnaire d'ouvrage scandaleux. Il est question de changer les trois censeurs théologiens, que l'on trouve trop indulgents. D'Alembert s'inquiète, puis renonce à l'entreprise ; Voltaire fait mine de l'imiter. Sur ces entrefaits éclate le scandale de l'Esprit, d'Helvétius. En condamnant ce livre, le 6 février 1759, le Parlement en condamnait quelques autres, dont l'Encyclopédie. Un arrêt du Conseil d'Élat, du 8 mars 1759, révoque le Privilège; un autre, du 21juillet, prescrit aux éditeurs de restituer soixantedouze livres aux souscripteurs. Pourtant, les philosophesse défendent, avec l'avantage de l'esprit et du talent. Diderot, resté presque seul, avec le chevalier de Jaucourt, pour continuer le travail, s'impose un labeur écrasant. Les volumes s'impriment secrètement. Tout faillit sombrer lorsque Diderot s'aperçut, en 1764, que Le Breton mutilait à son insu les manuscrits pour en supprimer ce qu'il jugeait dangereux. Après s'être violemment emporté contre cette « atrocité », il consentit à continuer, par égard pour l'associé de Le Breton, Briasson. Les volumes de planches paraissaient avec l'autorisation du gouvernement. En 1766, l'impression fut achevée. On indiqua sur la page de Titre Neuchâtel comme ville d'impression et les souscripteurs de Paris durent aller chercher leurs volumes aux environs. Après cette inoffensive comédie et quelques autres, l'Encyclopédie, fut lue et se vendit sans obstacles. Elle comprend 17 volumes in-folio, 5 volumes de suppléments où Diderot n'est pour rien (1777), et 11 volumes de planches.


La position de la physiologie philosophique de Diderot par rapport au Système des connaissances

Un aspect important (et moins connu) de la formation de Diderot dans le domaine des sciences naturelles &endash; mis à part la relation fondamentale (bien connue) à Maupertuis et Buffon &endash; est la dette du philosophe à l'égard de ses amis et « maîtres » encyclopédistes, les médecins de Montpellier (de Ménuret à Fouquet), rédacteurs de la plupart des articles concernant la médecine et la physiologie. A l'École de Montpellier s'ajoute aussi la leçon du Dictionnaire de médecine (1745) de R. James, dont Diderot fut un des traducteurs, un ouvrage qui est encore redevable au iatromécanisme de la fin du XVIIe siècle. Quelle est la mesure de l'apport de ces sources à la constitution de la physiologie philosophique du dernier Diderot (Éléments de physiologie) et quelle a été la part prise par Diderot dans la rédaction de certains articles et de leurs désignants mis en rapport avec le Système figuré des connaissances humaines. Quelle place y occupe la Physiologie ? Et quel est son « reflet » concret dans le corps de l'Encyclopédie elle-même, dans le domaine des sciences de la vie ? La réponse à ces questions pourrait suggérer quelques idées à propos de la définition des désignants et de leur origine, ce qui implique une « stratégie » d'organisation de la matière textuelle &endash; tacite ou explicite &endash; qui a guidé le travail des rédacteurs et révèle leur manière de se rapporter aux projets des deux éditeurs.

Diderot's philosophical physiology in relation to the the system of knowledge

An important aspect of Diderot's training in natural science, which is less well-known than his important relationship with Maupertuis and Buffon, is his debt towards his friends and 'masters' of the Montpellier medical school, from Ménuret to Fouquet, who wrote most of the Encyclopédie articles on medicine and physiology. One should also men?tion R.James's medical dictionary (1745) which Diderot, Eidous and Toussaint trans?lated and which is still marked by late 17th-century iatromechanism. This article studies the contribution of these sources to Diderot's philosophical physiology in the Eléments de physiologie and Diderot's role in writing these articles and their subject indicators in relation to the system of human knowledge. We look at the importance of physiology and its place in the field of natural history in the Encyclopédie itself. This study throws light on the definition of the subject indicators and their origin, implying an implicit or explicit strategy for organising the text, which guided the work of its authors and shows how they conformed to the editors' project.

Paolo Quintili, « La position de la physiologie philosophique de Diderot par rapport au Système des connaissances », Recherches sur Diderot et sur l'Encyclopédie, numéro 40-41 Les branches du savoir dans l'Encyclopédie,


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