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- Le sommeil cesse de deux
manières: premièrement, par une
impression sur quelqu'un des organes, si forte,
qu'elle parvient jusqu'au cerveau; secondement,
quand les esprits animaux qui se produisent
pendant le sommeil, sont assez abondants pour
avoir la force d'ouvrir les entrées des
nerfs, & pour les remplir de façon
qu'ils puissent transmettre juqu'au cerveau les
ébranlements produits par les objets qui
touchent le corps. Il y a aussi deux causes qui
tiennent les orifices des nerfs tendus &
ouverts; la première est le jaillissement
ou l'impulsion des esprits sortants du cerveau;
la seconde est le rebondissiment de ces
mêmes esprits contre le cerveau. Dans le
repos la seconde cause manque, par
conséquent la première est plus
facielement vaincue: c'est pourquoi l'on
s'endort plus facilement dans le silence, quand
rien ne frappe les oreilles; durant la nuit,
quand la lumière ne pénètre
point les paupières; quand on est assis
ou couché, & quand le corps &
l'esprit sont tranquilles.
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- Quand on s'éveille on
bâille, on étend les bras, on
est plus agile, on a plus de vivacité
d'esprit. Comme le suc nerveux n'a pas
coulé dans les muscles durant le sommeil,
toutes les fibres sont languissantes. Il faut
donc les contracter tous, pour ouvrir le passage
au suc nerveux qui s'est filtré dans le
cerveau, ou pour l'appeler dans ces parties. De
plus, le mouvement du sang étoit
languissant dans les muscles, il faut donc
hâter son cours; or cela se fait par la
contraction où ils entrent quand on
étend les membres. Le
bâillement, dit M. Senac, "vient de
la même cause. Ce suc nerveux qui entre
dans les muscles, & qui s'est ramassé
en grande quantité, fait qu'on est plus
agile; car l'âme peut en envoyer beaucoup
dans les nerfs pour mouvoir les parties".
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- Suivant un ancien système, le
bâillement n'est jamais produit
sans quelque irritation qui détermine les
esprits animaux à couler en trop grande
abondance dans la membrane nerveuse de
l'oesophage, qu'on a regardée comme le
siège du bâillement. Quand
cette irritation, on la suppose
occasionnée par une humeur importune qui
humecte la membrane de l'oesophage, & qui
vient ou des glandes répandues dans toute
cette membrane, ou par des vapeurs acides de
l'estomac rassemblées sur les parois de
l'oesophage. Par ce moyen les fibres nerveuses
de la membrane du gosier étant
irritées, elles dilatent le gosier, &
contraignent la bouche à suivre le
même mouvement.
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- L'Encyclopédie
préfère l'explication suivante:
"Le bâillement
est produit par une expansion de la plupart des
muscles du mouvement volontaire, mais surtout
par ceux de la respiration. Il se forme en
inspirant doucement une grande quantité
d'air qu'on retient & qu'on raréfie
quelque temps dans les poumons, après
quoi on le laisse échapper peu à
peu, ce qui remet les muscles dans leur
état naturel. De là l'effet du
bâillement est de mouvoir,
d'accélérer & de distribuer
toutes les humeurs du corps également
dans tous les vaisseaux, & de disposer par
conséquent les organes de la sensation,
& tous les muscles du corps, à
s'acqquitter chacun de leur côté de
leurs fonctions respectives". (Voyez l'Encyclopédie,
le Dictionnaire de
Trévoux, Boërhaave).
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- Quand on voit bâiller,
l'imagination détermine les esprits
à couler dans les fibres nerveuses de
l'oesophage. Les fibres de la membrane se
raccourcissent, séparent la
mâchoire inférieure de la
supérieure, de là l'on
bâille quand on voit
bâiller.
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- Le remède qu'Hippocrate prescrit
contre le bâillement est de garder
longtemps sa respiration. Il recommande la
même chose contre le hoquet.
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- Au reste, quand la vivacité d'esprit
q'on éprouve en s'éveillant, elle
peut dépendre du mouvement des liqueurs
dans le cerveau: or ce mouvement est beaucoup
plus aisé quand il s'est ramassé
une grande quantité de suc nerveux, &
que les fibres ne sont plus engourdies, ou
qu'elles ont repris leur tension; or c'est ce
qui arrive durant le sommeil.
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