-
- Du
bâillement, acte
involontaire
«Le bâillement est un acte
essentiellement involontaire», tels sont
les premiers mots de la définition de
presque tous les physiologistes. Nous n'avons
pas la prétention de rejeter absolument
cette proposition, mais nous désirons
attirer l'attention sur certains modes de
production du bâillement. Voyons d'abord
ce que les auteurs entendent par le mot:
involontaire. Dechambre, rangeant le
bâillement parmi les
phénomènes spasmodiques, lui
ôte, de ce fait, tout caractère
d'acte volontaire: «De même que pour
les autres modifications de la respiration,
telles que le soupir, le hoquet, qui ne sont
aussi que des mouvements respiratoires
convulsifs, il ne dépend de la
volonté ni de le faire naitre, ni de le
faire cesser une fois commencé ».
Longet avait dit avant lui : «Le soupir
peut être volontaire, tandis que le
bâillement est toujours
involontaire.
-
- Il est facile de simuler le
bâillement, mais en vain ouvrira-t-on la
bouche pour expirer une grande quantité
d'air, en vain fera-t-on successivement deux ou
trois inspirations profondes, suivies de rapides
expirations, en vain abaissera-t-on
excessivement la mâchoire
inférieure, on n'aura pas bâiller
si le besoin n'en existait pas». L'opinion
d'Adelon était toute semblable : «Le
bâillement est involontaire, on peut
réprimer l'envie de bâiller, mais
la faculté qu'on a de le réprimer
porte plus sur l'expression faciale de
même que sur l'action du thorax; ensuite,
l'indépendance où est cet acte de
la volonté est assez prouvée par
l'impossibilité où nous sommes de
le produire à notre gré: on peut
bien en simuler l'expression faciale, mais on
n'éprouve pas alors le sentiment
intérieur qui le suit et qui est un
soulagement». Essayons d'analyser les
citations de ces auteurs dont la conclusion est
la même: le bâillement est
rangé à juste titre, parmi les
actes respiratoires spasmodiques, à
côté du soupir, par exemple: or,
pour Longet ce denier peut être
volontaire; pour Dechambre, il ne l'est jamais;
il est admis généralement et il
est facile de se convaincre qu'on peut soupirer
à volonté. Le bâillement
rentrant dans la même catégorie que
le soupir nous n'en déduirons pas
forcémment qu'il est volontaire. Mais il
nous sera permis de, ne pas admettre sans
démonstration la proposition de
Dechambre: le bâllement est un acte
spasmodique, donc il est involontaire. D'aurtre
part, ces physiologistes prouvent tous les trois
«l'indépendance où est le
bâillement de la volonté, par
l'impossibilite où nous sommes de le
produire à notre gré». Il
suffirait donc de montrer qu'une telle assertion
est exagérée pour que cette
indépendance n'est qu'apparante.
-
- Nous avions déjà
remarqué depuis longtemps qu'il nous
était possible, par un mécanisme
particulier de déterminer à
volonté un bâillement complet;
plusieurs de nos camarades, étudiants en
médecine, sont arrivés au
même résultat. Il suffit de tendre
énergiquement les muscles
sus-hyoïdiens en inspirant lentement et
profondément; le maxillaire
inférieur est abaissé et
projeté en avant, un bourdonnement se
produit dans l'oreille: le bâillement a
lieu. Pour notre part, cette expérience
répétée maintes fois nous a
toujours réussi.
-
- On nous objectera, peut-être, que ce
que nous prenons pour un acte de la
volonté est dû tout simplement
à une espèce d'auto-suggestion, et
ou nous citera la phrase de Dechambre : «Il
est certain que l'on arrive presque
infailliblement à en déterminer la
manifestation en cherchant à plusieurs
reprises à le simuler ou à le
provoquer»; ou bien celle de Muller:
«Il suffit d'y penser pour bâiller
lorsque la disposition à cet acte
existe».
-
- L'objection est sérieuse, à la
vérité; mais nous n'avons pas la
prétention d'affirmer que la seule
tension des muscles sus-hyoïdiens,
combinée avec une inspiration lente et
soutenue, suffit à provoquer l'acte, en
dehors de tout phénomène
cérébral inconscient. Le fait n'en
existe pas moins, le bâillement
recherché a lieu et ces mouvements
absolument volontaires en sont le point de
départ, le primum movens. Ce n'est pas
étonnant du reste: en faisant contracter
les muscles sus-hyoïdiens, nous resserrons
le pharynx, nous dilatons le larynx, nous
abaissons la trachée; en inspirant
lentement etprofondément nous actionnons
le diaphragme; or, les choses se passent-elles
autrement dans le bâillement
ordinaire?
-
- Nous nous mettons dans les conditions de
production de l'acte, est-il extraordinaire
qu'il ait lieu? Ajoutons encore une remarque:
si, par ce mécanisme, nous essayons de
faire plusieurs bâillements successifs,
nous n'y réussissons pas, il y a une
sorte de fatigue, d'engourdissement qui s'y
oppose; après quelques secondes de repos,
une nouvelle tentative fait naitre
infailliblement un nouveau bâillement, et
cela indépendamment de toute question de
temps, de milieu, de fatigue, de faim, etc. Si
nous nous sommes un peu étendu sur ce
sujet, c'est que les assertions des
physiologistes nous semblent par trop absolues.
Nombre d'individus bâillent lorsqu'ils le
veulent, nous l'avons observé maintes
fois. Que ce soit effet d'une auto-suggestion ou
de tout autre mécanisme, il n'en est pas
moins vrai que le bâillement, acte
généralement involontaire, peut
néanmoins étre produit rapidement
et sûrement par l'influence de la
volonté.
- Le
réflexe sexuel de
l'élévation des bras chez la femme
Muhlrad S
|