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mise à jour du
15 août 2002
Rev Neurol
1932;38:516-517
lexique
La diplégie faciale cérébrale : forme corticale de la paralysie pseudo-bulbaire
Th. Alajouanine et R. Thurel
voir imagerie de l'Opercule Rolandique

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Il s'agit d'un homme de 48 ans, qui présente une paralysie pseudobulbaire corticale depuis 3 mois. Le début a été brusque, puisque les troubles se sont installés en une nuit.

Cette forme corticale de la paralysie pseudobulbaire est singulière par bien des côtés :

1- La paralysie pseudobulbaire est isolée : elle est en effet limitée aux muscles de la face, de la langue, du pharynx, du larynx et aux masticateurs. Les membres sont indemnes de toute paralysie : il n'existe qu'une hyperréflectivité tendineuse diffuse; il n'y a ni mictions impérieuses, ni troubles psychiques.

2- La paralysie porte uniquement sur la motilité volontaire, mais ici elle est absolue. Les mouvements élémentaires et les mouvements associés, qui constituent les fonctions sont supprimés. Le malade ne peut volontairement ni plisser le front, ni fermer le, paupières les mouvements des lèvres, de la mâchoire inférieure, de la langue sont très réduits les cordes vocales sont paralysées. Cette paralysie labio-linguo-pharyngo-laryngo-masticatrice rend impossible la parole et la mastication. Si les mouvements volontaires sont supprimés, il n'en est pas de même des mouvements automatiques et réflexes; alors que l'occlusion volontaire des paupières est impossible, on observe de temps à autre un clignement réflexe; on peut d'ailleurs le provoquer aisément en mettant en oeuvre les réflexes naso-oculo-cornéo-palpébraux; de même les paupières se ferment pendant le sommeil. La mimique psycho-syncinétique est conservée (bâillement, rire et pleurer réflexes); le réflexe massétérin existe; la déglutition réflexe se produit lorsque les aliments arrivent dans l'arrière-gorge.

3- Enfin, troisième point intéressant, il existe une atonie musculaire : le visage est atone, les traits tombants. La mâchoire est tombante ; la dépressibilité rétromaxillaire est exagerée. Les muscles présentent une hypoexcitabilité mécanique. L'atonie, l'hypoexcitabilité mécanique des muscles expliquent à notre sens l'absence de rire et de pleurer spasmodiques.


mise à jour du
15 août 2002
Rev Neurol
1959;101:168-171
Le syndrome unilatéral de l'opercule rolandique avec atteinte contralatérale du territoire des V, VII, IX, X, XI et XIIe nerfs craniens
Th. Alajouanine, G. Boudin, B. Pertuiset, B Pépin

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La constatation d'une paralysie dans le territoire de plusieurs nerfs craniens, d'un même côté, conduit en règle générale à explorer la fosse postérieure et les orifices de la base du crâne. Il est pourtant des cas dans lesquels la lésion est d'origine corticale, située dans l'opercule rolandique controlatéral.
Le groupement symptomatique qui est alors réalisé peut, du fait de son étendue, de ses caractères et de ses lacunes, être rattaché à une origine hémisphérique. Deux observations illustreront la réalité de ce syndrome operculaire unilatéral.
 
Obs. 1. - M. Marcel P.... âgé de 57 ans, se plaint pour la première fois en septembre 1954 de troubles de la parole. Un électroencéphalogramme pratiqué en novembre conclut à la présence d'une tumeur cérébrale et le malade est adressé à la Clinique Neuro-Chirurgicale de la Pitié en décembre. L'examen montre :
- Une importante diminution du réflexe cornéen droit sans troubles sensitifs notables du reste de la face ; une asymétrie très marquée des masséters même au repos et s'exagérant dans la contraction volontaire. Il existe de plus un petit signe de la diduction dans l'ouverture de la bouche.
- Une paralysie faciale droite très importante prédominant sur le facial inférieur mais touchant légèrement le facial supérieur dans les manoeuvres de l'occlusion des paupières, du froncement des sourcils et du front.
- Une asymétrie vélo-palatine très nette dans la vocalisation prolongée de même qu'une asymétrie pharyngée. Les réflexes du voile et pharyngé sont abolis.
- Une asymétrie des muscles du cou, le sterno-cléido-mastoïdien se contractant mal.
- Une déviation de la langue vers la droite dans la protraction forcée.
A ce groupement étaient associés :
- Une anarthrie de Broca très discrètement aphasique avec une dissociation phonétique considérable, relativement fixe et avec une perturbation du débit qui est syllabique. Il existe de plus une certaine scansion et un certain nasonnement.
- Un très léger déficit moteur du membre supérieur droit à dominance distale avec des réflexes ostéo-tendineux un peu vifs.
L'examen ophtalmologique se révéla normal. L'électroencéphalogrmime et l'angiographie carotidienne confirmèrent la présence d'une lésion de l'opercule rolandique gauche probablement superficielle du fait des éléments irritatifs contenus dans le tracé et kystique étant donné l'aspect avasculaire de la région rolandique sur les clichés angiographiques. Le malade est opéré le 23-12-54 (B. Pertuiset) : après la taille d'un volet coronal, la dure-mère, qui est peu tendue, est ouverte : la partie inférieure du gyrus précentralis et les divers segments du gyrus frontalis inferior apparaissent alors pâles et élargis. Une ponction retire 25 cm3 d'un liquide citrin clair qui coagule rapidement. Le cortex est incisé verticalement ce qui permet de pénétrer dans le kyste dont la paroi est lisse sauf en dehors et en bas : à ces endroits existe une tumeur murale dont le volume est difficile à apprécier et qui est aspirée, après biopsie, avec le cortex envahi. Des clips sont mis en place pour le repérage radiologique.
Histologiquement la tumeur est un glioblastome isomorphe présentant par endroits l'aspect d'un astrocytome protoplasmique. Certains noyaux sont à la limite de la monstruosité, il existe quelques pseudo-rosettes dégénératives. Les suites opératoires sont simples et le malade sort le 18 janvier 1955. L'opéré est revu le 3 avril 1955. Il n'existe plus d'hypoesthésie cornéenne et l'asymétrie du voile et du pharynx à la vocalisation prolongée a disparu. La paralysie faciale, de même que l'asymétrie des masséters, persiste; les réflexes nauséeux et du voile restent abolis. L'anarthrie est un peu améliorée. Le 6 mars 1956 l'état neurologique est inchangé.
 
Obs. 2. - M. Pierre G.... âgé de 28 ans, est hospitalisé à l'Hôpital. Saint-Antoine le 14 janvier 1959 pour une hémiparésie droite avec aphasie. Depuis 1 mois il se plaint de céphalées diffuses et rebelles, matutinales, à l'effort, et accompagnées de vomissements. L'examen montre:
- une parésie et une hypotonie du masséter droit à la fermeture de la bouche sans atrophie. Le réflexe cornéen est normal ;
- une parésie faciale intense prédominant sur le facial inférieur mais intéressant aussi le facial supérieur avec effacement partiel des plis du front et diminution de la force de l'orbiculaire des paupières ;
- une asymétrie du voile et du pharynx à la vocalisation forcée, avec abolition des réflexes vélo-palatin et pharyngé ;
- une hypotonie du sterno-cléido-mastoïdien droit
- une paralysie de l'hémilangue droite importants et sans atrophie, avec une hypotonie massive.
A ce groupement étaient associée
- une aphasie de type mixte avec dysgraphie, acalculie et apraxie idéo-motrice;
- un déficit moteur léger du membre supérieur droit à dominance distale avec réflexes normaux ;
- une désorientation temporo-spatiale avec indifférence et euphorie.
L'examen ophtalmologique montra un fond d'œil normal, l'électroencéphalogramme révéla un delta ample et monomorphe fronto-temporal gauche avec tendance à la bilatéralisation. L'angiographie carotidienne comme le gamma-encéphalogramme (Dr Planiol) situèrent dans l'opercule rolandique une tumeur indiscutablement maligne.
Le malade est opéré le 21 janvier 1959 (B. Pertuiset). Après la taille d'un volet coronal la dure-mère qui est tendue est ouverte ce qui découvre un cortex pâle et déplissé. Il est incisé au-dessus de Broca et à 2 cm de profondeur environ la tumeur apparaît sous forme d'une masse gris rougeâtre qui est aisément clivable en avant, en arrière, en dehors et en haut mais adhère en bas au cortex operculaire. Cette tumeur est volumineuse.
L'examen histologique (Dr Messimy) diagnostique une glioblastome hétéromorphe avec de nombreuses monstruosités cellulaires. Les suites opératoires sont simples et l'opéré quitte la Clinique Neuro-Chirurgicale de la Pitié le 2 février 1959. Quinze jours après l'opération l'examen montre une régression partielle de la paralysie faciale, de l'atteinte des masticateurs et du sternocléido-mastoïdien. Par contre l'atteinte pharyngo-vélo-linguale reste inchangée. L'aphasie tend à régresser.
 
Discussion
Ces deux observations sont remarquablement comparables et l'absence de signes importants d'hypertension intracranienne comme la vérification opératoire confèrent toute sa valeur au groupement symptomatique observé, qui témoigne d'une lésion contralatérale de l'opercule rolandique. Ce groupement comprend :
1 - une paralysie masticatrice avec ou sans hypoesthésie cornéenne
2 - une paralysie faciale importante qui domine nettement sur le facial inférieur mais touche aussi le facial supérieur sans signe de Charles Bell
3 - une paralysie vélo-palatine et pharyngée avec abolition des réflexes du voile et nauséeux, sans atteinte des cordes vocales
4 - une parésie du sterno-cléido-mastoïdien
5 - une paralysie linguale avec hypotonie sans atrophie.
Il est associé à ces signes une parésie discrète et distale du membre supérieur. Cette paralysie facio-linguo-vélo-pharyngo-cléido-masticatrice ne paraît pas avoir retenu l'attention dans sa manifestation unilatérale.
 
Par contre la forme bilatérale de cette paralysie est connue depuis la description de C. Foix, J. A. Chavany et J. Marie en 1926. J. Dejerine avait déjà attiré l'attention sur les monoplégies linguales d'origine corticale de même d'ailleurs que sur les monoplégies facio-linguales sans mentionner le groupement symptornatique qui fait l'objet de ce travail.
 
Si l'on se reporte aux descriptions des diplégies facio-linguo-pharyngo-masticatrices on y trouve deux faits que nous n'avons pas observés :
- nous n'avons pas vu en effet de pseudo-ophtalmoplégies qui sont sans doute la conséquence du caractère bilatéral des lésions
- nous n'avons pu mettre en évidence la conservation de la motilité réflexe et automatique, qui contraste dans les diplégies avec la disparition des mouvements volontaires, fait sur lequel nous avons insisté autrefois.
 
L'étiologie corticale du groupement symptomatique observé repose donc essentiellement sur le fait qu'il reproduit fidèlement la topographie fonctionnelle du gyrus précentralis dans son segment inférieur, qu'il respecte les voies cochléo-vestibulaires comme la corde vocale et qu'il s'accompagne d'une discrète monoparésie brachiale.
 
Du point de vue physio-pathologique un seul point nous paraît obscur : le substratum anatomique de l'abolition des réflexes nauséeux et du voile. En effet il n'est pas possible d'expliquer par l'hypertension intracranienne, qui d'ailleurs resta modérée dans les deux cas, cette abolition puisqu'elle persista dans la période postopératoire.
 
Ce groupement symptomatique qui pourrait abuser un observateur non averti et lui faire croire à une lésion de la fosse postérieure ou de la base du crâne est à rapprocher des paralysies des nerfs crâniens que l'on peut observer par compression à distance dans l'évolution des tumeurs frontales médianes . Ces deux séries de faits montrent combien il faut être prudent dans l'interprétation d'une paralysie siégeant sur le territoire d'un nerf cranien et s'entourer de tous les examens paracliniques dont on peut disposer.

Conclusion : Le syndrome unilatéral de l'opercule rolandique est fait d'une paralysie contro latérale facio-linguo-pharyngo-cléido-masticatrice, avec abolition des réflexes vélopalatin et nauséeux et comportant une atteinte du facial supérieur. Ce syndrome est très comparable à celui qui a été décrit en 1926 par Foix, Chavany et Marie, mais ce dernier était bilatéral.

  1. Alajouanine, et al Le Syndrome operculaire unilatéral avec atteinte controlatérale du territoire des V, VII, IX, XI, XIIe nerfs craniens. Rev. Neurol.1959; 101; 168-171
  2. Alajouanine T, Thurel R La diplegie faciale cérébraIe (forme corticale de la paralysie pseudo-bulbaire). Rev. Neurol.1932; 38; 516-517
  3. Pertuiset B, F Perrier Le syndrome operculaire unilatéral (rolandique inférieur) d'origine vasculaire Rev Neurol 1960; 103; 63-64
  4. Boudin G, B Pépin, JP Wiart Le syndrome operculaire unilatéral d'origine vasculaire Rev Neurol 1960; 103; 65
  5. Gschwend J yawning in a case with transsecting glioma of the pons Fortschr. Neurol. Psychiat 1977; 45; 652-655
  6. Crumley RL The opercular syndrome - diagnostic trap in facial paralysis The laryngoscope 1979; 89; 361-365
  7. Bauer G et al Involuntary motor phenomena in the locked-in syndrome J. Neurol. 1980; 223; 191-198
  8. Bauer G et al stimulus evoked oral automatismsin the locked-in syndrome Arch Neurol1982; 39; 435-436
  9. Laurent-Vannier A Syndrome de Foix Chavany Marie d'origine traumatique Rev Neurol 1999; 155; 5; 387-390
  10. Billeth R, Jorgler E, Baumhackl U Bilateral anterior operculum syndrome Nervenarzt 2000; 71; 8; 651-654
  11. Ghika J, et al Dissociated preservation of automatic-voluntary jaw movements in a patient with biopercular and unilateral pontine infarcts Eur Neurol 2003, 50; 185-188