- Nous n'avons pas, comme les anciens auteurs,
la prétention en abordant ce chapitre,
d'ériger le bâillement en
symptôme de premier ordre. Il nous parait
cependant que l'on a trop négligé,
son étude de nos jours. Elle peut, dans
certains cas, fournir des renseignements
précieux pour le diagnostic, et permet en
quelques circonstances même
d'établir un pronostic
assuré.
- Nous passerons rapidement en revue les
différentes maladies où ce signe
se rencontre le plus fréquemment, et nous
nous permettrons d'insister quelque peu sur
certains points intéressant où des
observations récentes ont jeté un
jour nouveau.
- Nous avons déjà parlé
plus haut des rapports du bâillement avec
la grossesse, et nous avons dit que ce
symptôme relevait plutôt d'un
trouble digestif que de la grossesse
elle-même, peut-être aussi d'un
réflexe à point de départ
utérin. Il n'en est pas de même
pendant l'accouchement : outre que le
bâillement peut être, dans ce cas,
le signe de perte abondante de sang après
la délivrance, il se manifeste
également en dehors de tout
écoulement sanguin, durant la sortie du
ftus. Rderer, dans sa
dissertation
-
- De oscitatione in enixu, donne une haute
valeur au bâillement du travail. Günz
écrit dans le même sens, et
Rothmund résume et met pour ainsi dire la
question au point quand il dit: «Nobis
videtur notatu dignum, mentionem facere de
oscitatione quae partus tempore fuit,
parturientibus labores intercipit et turbat,
partumque difficilem reddit, et si crebrior
fuerit, magnam uteri languorem significat,
gravissimaeque aut lethiferae etiam futurae
gangrenae, vel uteri hemorragiae subinde index
est». On a observé, il est vrai,
très fréquemment le
bâillement pendant et après
l'accouchement; nous croyons pouvoir donner une
explication rationnelle de sa production aux
divers moments: les bâillements longs et
répétés du travail sont
vraisemblablement dus à la grande
fatigue, car ils se manifestent seulement si ce
travail est lent et pénible. Ceux que les
Anciens voyaient si souvent apparaitre
après l'accouchement, ont pour cause soit
une hémorragie, soit le commencement de
la fièvre puerpuérale. Dans le
premier cas, ils ne sont pas les signes
précurseurs, mais les signes
consécutifs del'hémorragie; dans
le second cas ils sont les symptômes du
début de la fièvre, au même
titre que les bâillements cités
plus haut dans l'invasion des pyrexies.
Aujourd'hui. les hémorragies post-partuin
sont peu fréquentes, grâce aux
soins intelligents donnés aux
accouchées; les progrès de
l'antisepsie ont fait une rareté de
l'infection puerpérale; il ne nous est
plus guère donné de constater le
bâillement dans ces deux cas. Nous avons
cependant recueilli cette observation
intéressante
-
- Observation (Personnelle)
- Femme B..., trente-cinq ans. A en trois
enfants. Au premier accouchement, abondante
hémorragie; au second et
troisième, perte de sang
légère, à l'administration
d'ergotine. Nous avons fait nous-même le
quatrième accouchement. Après la
délivrance, inertie utérine,
légère hémorragie combattue
par les injections d'eau chaude à
48° et 4 grammes, d'ergotine en deux jours.
Deux injections vaginales par jour avec une
solution de sublimé à 0 gr 25 pour
1000, faites par le mari. Le troisième
jour, l'accouchée est prise de frissons
violents, de bâillements
répétés très
incommodes. Température 40°5. Le
lendemain, injection intra-utérine; le
soir, la fièvre baisse et les
bâillernents diminuent. Le surlendemain et
les jours suivants, deuxième et
troisième injection intra-utérine,
Température 36°7. Les
bâillements ont complètement
cessé. Dix jours après, la malade
se lève. Elle nous a affirmé ne
jamais bâiller habituellement. Ainsi quand
Dechambre dit: «Rderer qui a
écrit une dissertation sur le
bâillement dans l'enfantement, en a
certainement exagéré la
gravité en le signalant comme un
symptôme funeste et comme l'avant coureur
d'un cas mortel» trouvons-nous qu'il ne se
rend pas compte de la gravité qu'avaient
autrefois certaines suites de couches et dont,
précisément, le bâillement
annonçait la malignité. En
résumé, si nous constatons moins
fréquemment le bâillement dans
l'accouchement, c'est que ses causes
productrices ont en partie disparu, nous voulons
surtout parler de la
puerpéralité.
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