- -Barbizet
                     J Yawning J Neurol Neurosurg Psychiat 1958;
                     21; 203-209
 
                     
                     - -Barbizet J
                     Le bâillement Le Concours Médical
                     1958; 80; 5; 537-548
 
                     
                     - -Barbizet
                     J Bâillement et vigilance Revue de
                     gérontologie juin 1959
 
                     
                     -  Vidéo
                     d'un bâillement typique,
                     référence
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Qui ne bâille enfant, homme ou
                     vieillard ?
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Et pourtant celui qui, curieux d'en savoir
                     plus que la définition donnée par
                     les dictionnaires : « profonde inspiration
                     involontaire avec la bouche largement ouverte
                     », feuilletera les manuels de physiologie
                     ou de psychologie contemporains à la
                     recherche d'une étude complète de
                     cette activité psychomotrice si courante,
                     le fera en vain.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - A mi-chemin entre le réflexe
                     automatique et le mouvement expressif, le
                     bâillement mérite sans doute mieux.
                     Cela a été, du moins, l'avis de
                     nombreux auteurs qui ont, depuis Hippocrate,
                     accordé leur attention à ce geste
                     banal.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Trautmann
                     dans une excellente thèse sur le
                     bâillement soutenue à Bordeaux en
                     1901, nous fournit un historique
                     documenté et érudit où
                     apparaissent les opinions d'Hippocrate Galien;
                     Oribase; Sanctonus Fernel (1610); Kruger (1627);
                     Sennert (1666);
                     Boerhaave (1680);
                     Gartner (1736); Albertini (1737); Gunz (1738);
                     Czerniewski (1749); Buchner (1758); Roederer
                     (1759); Holler (1766); Walther (1775); Double
                     (1817) Adelon (1821); Rotmund (1824); Richerand
                     (1825); Müller
                     (1851) Monneret (1861); Longet (1868); Dechambre
                     et Charcot sur un des aspects ou l'ensemble du
                     problème du bâillement.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Le XXe siècle a connu aussi de
                     nombreux travaux sur le bâillement. Citons
                     notamment ceux d'Hauptmann (1920 ; Dumpert
                     (1921); Mayer (1921); lnsabato
                     (1928); Peiper (1932); Moore
                     (1942); Salmon
                     (1948) Isolons la bonne revue critique de A. P.
                     Heusner (1946) et
                     celle de Boudouresques
                     (1950).
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Comme on le voit, il ne s'agit pas d'un
                     sujet neuf, mais en existe-t-il en
                     médecine ?
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Avant d'aborder l'étude physiologique
                     du bâillement, arrêtons-nous un
                     instant aux problèmes qu'il pose au point
                     de vue de l'étymologie et de la
                     physiologie comparée.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Bâiller dériverait
                     (d'aprèsTrautmann) du latin belare =
                     bêler, probablement à cause du
                     bruit qui l'accompagne, ou du bas latin badare =
                     bâiller.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Le bâillement s'observe couramment
                     chez les primates et les carnassiers,
                     s'accompagnant alors souvent d'étirement.
                     Par contre, on ne l'observe pas chez les
                     herbivores. Il est difficile de préciser
                     la signification et les liens avec le
                     bâillement, des mouvements d'ouverture de
                     la bouche observés chez les poissons, les
                     amphibiens et les reptiles. Il en est de
                     même pour les mouvements d'ouverture du
                     bec avec battement des ailes des oiseaux.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Analyse du
                     bâillement
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Le bâillement est un mouvement
                     respiratoire involontaire et paroxystique. Il
                     s'agit d'une activité motrice complexe se
                     déroulant dans un ordre donné,
                     toujours le même, et dans lequel on peut
                     distinguer 3 phases : la 1ère est active,
                     inspiratoire ; la seconde correspond à
                     l'acmé du bâillement ; la
                     troisième est passive, expiratoire. Leur
                     durée respective est de 1,5 à 4" ;
                     1 à 2 " ; 1,5 à 4", un
                     bâillement durant en moyenne de 4 à
                     7". L'analyse des mouvements d'un sujet qui
                     bâille peut se faire par l'inspection
                     clinique, par l'examen laryngoscopique et par
                     l'étude des radiographies en série
                     prises toutes les 1/2 secondes, telle que nous
                     l'avons réalisé à
                     l'hôpital St-Antoine avec le Docteur J.
                     Chalut,
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Lors de la première
                     phase, on constate l'ouverture
                     progressive de la bouche, la dilatation du
                     carrefour pharyngo-laryngé, la dilation
                     du thorax et l'abaissement du diaphragme.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - -L'ouverture de la bouche se fait lentement
                     ; elle n'est qu'à moitié ouverte
                     lorsque le temps pharyngolaryngé est
                     déjà à son acmé.
                     C'est alors que chez des sujets
                     prédisposés, peut survenir une
                     luxation de la mâchoire.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - -L'abaissement de l'axe aérien du cou
                     est évident par la simple inspection qui
                     montre l'abaissement du cartilage thyroïde.
                     Les radiographies l'objectivent mieux encare,
                     montrant que le corps de l'os hyoïde
                     situé au repos, en regard de C2 ou C3
                     descend jusqu'au niveau de C6 ou C7. Cet
                     abaissement de l'os hyoïde explique
                     l'atitude de la langue qui est attirée en
                     arrière et en bas, la pointe
                     s'éloignant beaucoup des arcades
                     dentaires qu'elle touche normalement. La
                     dilatation de la glotte et l'abduction des
                     cordes vocales peuvent être
                     constatées lors d'un examen
                     laryngoscopique suffisamment patient pour saisir
                     un bâillement spontané. Les
                     radiographies en série nous ont
                     montré qu'il existait une dilatation
                     énorme et insoupçonnée du
                     pharynx qui triple ou quadruple de volume. Le
                     pharynx, le larynx, la trachée et aussi
                     les bronches-souche apparaissent sur les
                     clichés dilatés à
                     l'extrême.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - -L'élargissement de la cage
                     thoracique dans tous ses axes et l'abaissement
                     du diaphragme ne diffèrent en rien de ce
                     qu'on observe lors d'une inspiration profonde
                     volontaire.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - L'importance et les caractères de la
                     dilatation pharyngo-Jaryngée nous
                     paraissent devoir être soulignés.
                     Alors que l'ouverture de la bouche et
                     l'inspiration profonde se produisent dans bien
                     des circonstances en dehors du bâillement,
                     l'énorme dilatation pharyngée avec
                     abaissement de l'os hyoïde et de la langue
                     ne s'observe que dans le bâillement.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Il est à noter que le bruit
                     inspiratoire du bâillement se produit dans
                     le palais et l'isthme du gosier. Il ne s'agit
                     pas d'un bruit glottique, la glotte étant
                     dilatée au maximum à cette
                     phase.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - La deuxième phase du
                     bâillement correspond à
                     l'acmé des mouvements d'ouverture de la
                     bouche, de la dilatation pharyngée et
                     thoracique. C'est alors qu'apparaissent le plus
                     nettement les modifications faciales qui ont
                     débuté à la fin de la
                     première phase.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - La contraction des dilatateurs des
                     lèvres exagère l'ouverture de la
                     bouche. Les constricteurs des paupières
                     entrainent une occlusion partielle ou totale des
                     yeux. Les narines sont dilatées. La peau
                     de la base du nez se fronce. Parfois, le front
                     se plisse et les sourcils
                     s'élèvent. A cette phase on peut
                     aussi constater un certain degré de
                     contraction tonique des muscles extenseurs du
                     cou et du tronc. Elle peut s'étendre
                     aussi aux membres, les bras se portant en
                     élévation et en abduction, les
                     membres inférieurs en hyperextension. Cet
                     étirement qui est loin d'être
                     constant a pour résultat d'augmenter la
                     capacité thoracique, ce qu'il est
                     aisé de vérifier en
                     s'étirant après avoir
                     bloqué son thorax en inspiration
                     maximale.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Des phénomènes
                     sécrétoires peuvent aussi survenir
                     alors lacrymation, et plus rarement
                     salivation.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - La troisième phase est
                     passive, brusquement l'inspiration cède,
                     l'expiration est assez lente, bruyante,
                     accompagnée d'un son vocal en
                     «aahn» d'origine laryngée. Le
                     pharynx reprend son volume normal, la bouche se
                     ferme, le faciès retrouve son aspect
                     habituel.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Cet ensemble de mouvements complexes et
                     synergiques peut résumer tout le
                     bâillement. Mais celui-ci peut
                     s'accompagner d'autres mouvements qui l'accusent
                     ou le minimisent. C'est ainsi que l'on peut
                     exagérer un bâillement et en
                     quelque sorte le souligner en s'étirant,
                     en modulant le son expiratoire ou en
                     exécutant des mouvements rythmiques de
                     latéralité avec la mandibule. A
                     l'inverse, on peut tenter de masquer le
                     bâillement dans certaines circonstances
                     où il est socialement
                     réprouvé. Le sujet porte la main
                     à son visage, masquant de sa paume
                     l'ouverture de la bouche. Il peut aussi
                     réprimer le bâillement,
                     c'est-àdire en arrêter dans une
                     certaine mesure l'expression motrice en
                     immobilisant son faciès, en s'opposant
                     à l'ouverture de la bouche et en
                     contrôlant son mouvement expiratoire. Mais
                     malgré sa bonne volonté, le
                     bâilleur est trahi par sa mimique et le
                     bâillement
                     «étouffé»
                     n'échappe pas à l'observateur
                     attentif. On peut remarquer que dans ce cas le
                     bâillement peut être réduit
                     à sa composante pharyngée
                     soulignant encore l'importance de ce temps dans
                     le complexe moteur du bâillement.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Un certain nombre d'explorations
                     physiologiques ont pu être faîtes au
                     cours du bâillement. Elles apportent une
                     maigre récolte de faits
                     accélération minime du rythme
                     cardiaque à la phase inspiratoire, baisse
                     nette de l'indice oscillométrique
                     capillaire au niveau des doigts,
                     phénomène banal puisqu'on
                     l'observe également lors de l'inspiration
                     profonde (P. Heusner). L'EEG. pratiqué bu
                     cours du bâillement est
                     interprétable du fait des
                     mécanogrammes et des myogrammes.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Au point de vue évolutif, il est
                     remarquable qu'un bâillement est rarement
                     isolé. Le plus souvent ils surviennent
                     par courts accès de 2 ou 3,
                     d'intensité inégale et souvent
                     croissante, séparés, chacun, par
                     quelques respirations normales. Parfois les
                     bâillements vont se répéter,
                     à intervalles irréguliers, pendant
                     plusieurs minutes.
 
                     
                     -  
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Bâillement et
                     étirement
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Il s'agit de deux activités
                     très souvent mais non toujours
                     associées, l'étirement se greffant
                     à la 2e phase du bâillement. Chez
                     le nourrisson et chez l'animal, ces deux actions
                     s'observent fréquemment ensemble. Chez
                     l'homme, l'étirement accompagne plus
                     volontiers les bâillements du
                     réveil que ceux de l'endormissement, et
                     l'association de ces deux activités est
                     loin d'être constante, et le
                     bâillernent, même en dehors des cas
                     où les circonstances sociales ne
                     permettent pas de le souligner par un
                     étirement, est le plus squvent
                     isolé. De même, l'étirement
                     qui se produit après une longue pause
                     dans la même attitude ne s'accompagne pas
                     forcément de bâillement. Ces faits
                     permettent de ne pas accorder tout à fait
                     la même valeur physiologique à ces
                     deux actes, notamment, on le verra plus loin, en
                     ce qui concerne leur valeur fonctionnelle.
 
                     
                     -  
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Les causes declenchantes du
                     bâillement
 
                     
                     -  
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Elles sont nombreuses, on peut les classer
                     sous trois chefs.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Causes physiologiques
 
                     
                     -  
 
                     
                     - A. - La somnolence. Elle doit occuper la
                     premiere place. Les hommes, les animaux
                     bâillent à l'approche du sommeil.
                     Il en est de même pour la période
                     du réveil qui est marquée chez
                     certains individus par des bâillements et
                     des étirements
                     répétés.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - B. - L'ennui est une cause fréquente.
                     Il peut naître de circonstances diverses.
                     Une conversation fastidieuse, un
                     conférence monotone, une lecture peu
                     captivante font bâiller. L'ennui est
                     intimement lié au
                     désintérêt dont le
                     rôle est primordial dans la
                     génèse du bâillement. Nous y
                     reviendrons plus loin.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - C. - Le fait de voir bâiller. «
                     Interdum tamen sola imaginatio ositationis causa
                     est. Cum enim qui videt alium oscitare, ipse
                     quoque ad oscitandum invitatur », notait
                     Sennert en 1666. Un bon bâilleur en fait
                     bâiller sept, dit le dicton
                     populaire.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - La contagion du bâillement est facile
                     à vérifier en bâillant dans
                     un groupe averti ou non de votre intention. De
                     nombreuses explications ont été
                     proposées. Richerand, puis Lepelletier
                     soutiennent que c'est la mémoire du
                     soulagement que procure le bâillement qui
                     nous porte involontairement à
                     répéter cet acte toutes les fois
                     qu'une autre personne l'exécute devant
                     nous. Pour Adelon, le bâillement par
                     imitation tient aux connexions qui unissent les
                     différentes parties nerveuses, et
                     à une prédisposition
                     particulière qu'ont les nerfs des muscles
                     inspirateurs à réagir à des
                     impressions reçues par certains points de
                     l'organisme. Müller aussi, développe
                     une théorie associationiste, insistant
                     sur le fait que l'enchaînement des
                     idées et des actions peut devenir aussi
                     intime que celui des idées entre
                     elles.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - La contagion du bâillement n'est qu'un
                     exemple des multiples actes que l'on fait par
                     imitation, assez souvent inconsciemment :
                     répéter un air fredonné ou
                     sifflé ; baisser ou hausser
                     l'intensité de la voix en accord avec
                     celle de l'interlocuteur ; sourire à un
                     sourire ; répondre à une grimace
                     par une grimace. De même, des actes
                     expressifs comme le rire ou le pleurer sont dans
                     certaines circonstances contagieux. Il y a dans
                     ces mécanismes associatifs encore bien
                     des inconnues. Cependant, cette
                     possibilité d'associer deux stimulations,
                     deux comportements, deux idées, est
                     à la base même de nos
                     mécanismes d'apprentissage, et le
                     bâillement - par imitation ne constitue
                     qu'un cas particulier dons un ensemble de gestes
                     imitatifs. En tous cas, qu'un bâillement
                     puisse être provoqué par la vue
                     d'un bâillement chez autrui apporte la
                     preuve dans dette variété de
                     bâillements, de l'intervention du cortex
                     cérébral, notamment occipital,
                     dans le circuit neuronal de l'acte de
                     bâiller.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - D. - Le fait de bâiller. Il est
                     possible de parvenir à se faire
                     bâiller. Pour cela, 4 à 5
                     inspirations profondes, la bouche grande
                     ouverte, imitant le bâillement
                     spontané suffisent souvent. Une fois le
                     bâillement spontané survenu, il
                     sera rarement unique, et dans le quart d'heure
                     suivant de nouveaux bâillements
                     isolés ou en accès vont se
                     reproduire.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Le passage d'un acte volontaire à un
                     acte paroxystique involontaire est difficile
                     à interpréter sur des bases
                     purement associationistes, et l'on peut se
                     demander dans quelle mesure le fait de
                     bâiller volontairement n'a pas, par un
                     mécanisme qu'il reste à
                     préciser, modifié
                     ['excitabilité des neurones,
                     préparant ainsi la décharge
                     paroxystique et involontaire. Ce
                     mécanisme interviendrait dans la
                     répétition des bâillements
                     quelle que soit leur cause initiale,
 
                     
                     -  
 
                     
                     -  
 
                     
                     - E. - La faim et, au contraire, la
                     plénitude survenant après un repas
                     copieux, sont couramment tenues pour
                     responsables de bâillements isolés
                     dans le premier cas, associés à
                     une somnolence dans le deuxième. Chez
                     certains sujets pléthoriques ces
                     bâillements post-prandiaux peuvent
                     constituer une gêne qui les pousse
                     à consulter.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - F. - Le bâillement enfin survient avec
                     une particulière fréquence dans
                     certains états la fatigue physique, la
                     grossesse.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Causes pathologiques
 
                     
                     -  
 
                     
                     - L'atteinte du tronc cérébral
                     s'accompagne fréquemment de
                     bâillements, qu'il s'agisse d'une
                     lésion à l'intérieur du
                     tronc cérébral (hémorragie,
                     ramollissement, tumeur), et à ce propos
                     rappelons que la somnolence est un signe
                     d'atteinte pédonculaire (J. Lhermitte),
                     ou d'un retentissement sur l'axe nerveux d'une
                     tumeur de la fosse postérieure.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Si les bâillements sont
                     fréquents et intenses au cours des
                     tumeurs frontales (Delmas-Marsalet), temporales
                     et au cours des hémorragies
                     intrahémisphériques, c'est encore
                     sans doute par l'intermédiaire du tronc
                     cérébral comprimé du fait
                     de l'hypertension intracrânienne et d'un
                     engagement temporal. A ce titre donc, le
                     bâillement, dans tous ces cas, a la valeur
                     d'un signe d'atteinte bulbaire. Il est de
                     mauvais pronostic.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Au cours de processus encéphalitique
                     diffus le bâillement n'est pas rare. Des
                     crises fréquentes de bâillement ont
                     été observées au cours des
                     encéphalopathies éthyliques de la
                     paralysie générale (Vergely).
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Le bâillement est une des nombreuses
                     séquelles respiratoires observées
                     au cours de l'encéphalite
                     léthargique à côté
                     des soupirs et des hoquets spasmodiques. Sicard
                     et Paraf, Critchley et Turner ont ainsi
                     rapporté des observations de
                     bâillement et de bêlement (Gaping)
                     spasmodiques. Rapprochons-en les
                     bâillements des choréiques.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Le bâillement peut s'observer aussi
                     dans certaines variétés
                     d'épilepsie.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Pour Wilson, il constituerait une aura des
                     crises viscérales.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Penfield et Jasper rapportent deux
                     observations de bâillement,
                     élément d'une crise
                     diencéphalique autonome.
                     Particulièrement instructive est leur
                     observation d'une femme de 29 ans ayant un
                     astrocytome occupant le lobe temporal gauche et
                     la partie inférieure du corps
                     strié jusqu'à la paroi du IIIe
                     ventricule, dont les crises débutaient
                     brusquement par une douleur occipitale
                     s'accompagnant de bâillements et de hoquet
                     ; en même temps s'engourdissaient le bras
                     gauche et la partie gauche de la bouche. La
                     crise se terminait par un besoin d'uriner.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Des lésions spinales hautes peuvent
                     aussi déclencher des bâillements,
                     comme chez ce malade de D. Furtado, atteint
                     d'une poliomyélite bulbo-spinale qui
                     bâillait à chaque abduction passive
                     de l'une ou l'autre épaule.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Le bâillement a été
                     décrit avec abondance dans les
                     manifestations de l'hystérie. (Charcot,
                     Déjerine, Trautmann).
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Salmon attire l'attention sur la
                     possibilité de crises de bâillement
                     dans la myasthénie et cite è
                     l'appui un cas personnel et un cas d'Albertoni.
                     Il note l'action de la prostigmine qui
                     arrête les bâillements.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Le bâillement serait encore un signe
                     observé au cours des anémies, des
                     hémorragies, des pyrexies. C'est
                     également un symptôme courant au
                     cours des affections digestives, au cours
                     desquels il est noté sans que les auteurs
                     aient beaucoup cherché à en
                     préciser le mécanisme.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - La morphine, les barbituriques, et d'une
                     façon générale les
                     hypnotiques favorisent l'apparition du
                     bâillement. L'action de ces drogues sur
                     les centres de la vigilance est d'un
                     intérêt certain dans
                     l'interprétation du mécanisme du
                     bâillement.
 
                     
                     -  
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Bâillement et
                     stimulations
                     cérébrales
 
                     
                     -  
 
                     
                     - De ces causes naturelles de
                     bâillement, on peut rapprocher le
                     bâillement induit expérimentalement
                     par des stimulations
                     intracérébrales. Nous ne
                     connaissons pas d'étude de stimulation
                     intracérébrale concernant
                     directement le bâillement. Par contre, des
                     bâillements ont pu être
                     observés et notés dans certains
                     protocoles; c'est ainsi que W.-R. Hess (1938),
                     stimulant la substance intralaminaire du
                     thalamus et le subthalamus postérieure a
                     pu provoquer chez le chat le sommeil
                     précédé de
                     bâillements.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Les expériences de Passouant,
                     Passouant-Fontaine et Cadilhac (1956) sur la
                     stimulation du rhinencéphale et en
                     particulier de la corne d'Ammon mentionnent
                     aussi le bâillement. La crise induite se
                     fait en 3 temps pendant la stimulation
                     réaction de fuite ; pendant la
                     post-discharge, état de malaise avec
                     diminution de la vigilance. Puis survient la
                     troisième phase: l'animal se lève,
                     se lèche, ronronne. Ce comportement de
                     bien-être se prolonge pendant plusieurs
                     minutes, et parfois il se couche,
                     s'étire, bâille et s'endort. Le
                     sommeil peut se produire 3 à 5 minutes
                     après la fin de la post-discharge.
                     L'enregistrement de l'hippocampe montre qu'il
                     est précédé de pointes
                     brèves et survoltées.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Il est bien évident que dans ce cas,
                     le bâillement n'est qu'une manifestation
                     tardive et indirecte de la stimulation.
                     Néanmoins, il faut retenir qu'il
                     s'intègre dans un comportement de
                     bien-être et d'endormissement qui,
                     s'oppose à la réaction de fuite
                     contemporaine de la stimulation. Le fait que le
                     bâillement puisse s'observer !ors des
                     stimulations portant sur le rhinencéphale
                     ou l'hypothalamus - formation en rapport
                     étroit avec le système
                     réticulé ascendant dont on
                     connaît le rôle dans le
                     mécanisme de la vigilance est à
                     souligner.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Physiologie du
                     bâillement
 
                     
                     -  
 
                     
                     - A. - Les théories
                     classiques
 
                     
                     -   
 
                     
                     - Si les aspects cliniques et les causes
                     déclenchantes du bâillement sont
                     bien connus, son mécanisme physiologique
                     est mal élucidé ainsi que sa
                     signification. Ce ne sont cependant pas les
                     interprétations qui manquent.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Le rôle cathartique du
                     bâillement expulsant les vapeurs qui ont
                     été retenues est
                     déjà exprimé par
                     Hippocrate. Russel, en 1891, dans une
                     monographie consacrée au bâillement
                     montre que cette idée n'avait rien perdu
                     de sa force ou XIXème siècle, le
                     bâillement étant
                     présenté comme une impulsion
                     automatique chargée d'expulser le mauvais
                     air du poumon. Russel ajoute que cette
                     gymnastique a pour double fonction d'activer les
                     organes respiratoires et de stimuler le cerveau
                     en augmentant la circulation.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - A côté de ces
                     interprétat'ans fantaisistes, un certain
                     nombre de théories ont été
                     avancées qui peuvent être
                     classées en deux groupes selon que le
                     bâillement est considéré
                     comme une réaction ou comme une
                     perturbation primitive.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Dans le premier groupe, le bâillement
                     est considéré comme un
                     mécanisme régulateur, au
                     même titre, par exemple, que le frisson
                     est tenu comme une réaction motrice
                     s'opposant au refroidissement de l'organisme.
                     Cependant l'accord ne semble pas être fait
                     sur la nature et les mécanismes de cette
                     régulation.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Hauptmann, en 1920, suggère que le
                     bâillement et l'étirement
                     s'opposent à l'hypotonie musculaire qui,
                     avec l'ennui, est la conséquence de
                     l'inactivité des centres
                     cérébraux supérieurs.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Salmon (1948), soutient aussi que le
                     bâillement est une réaction
                     automatique des muscles respratoires
                     provoquée par l'hypotonie des nerfs
                     respiratoires bulbaires et l'hypotonie qui
                     accompagne le sommeil.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Mais c'est Dumpert (1921) qui a
                     poussé le plus loin l'hypothèse du
                     bâillement réactionnel. Pour lui,
                     le bâillement surviendrait quand la
                     circulation cérébrale ne serait
                     plus suffisante pour maintenir l'état de
                     veille ou de vigilance. Le bâillement et
                     l'étirement augmenterait le retour
                     veineux au coeur, ceci : en comprimant les
                     veines du tronc et des membres ainsi que les
                     veines splanchniques ; en diminuant la pression
                     intrathoracique. L'hypertension veineuse qui en
                     résulterait entraînerait un
                     accroissement du débit cardiaque
                     (réflexe de Bainbridge) et par
                     conséquent améliorerait des
                     tissus. La circulation cérébrale
                     surtout bénéficierait de cet
                     accroissement circulatoire, les
                     afférences sensitives
                     émanées des muscles
                     étirés poduisant, toujours pour
                     Dumpert, une vaso-constriction
                     systématique et une vasodilatation des
                     artères cérébrales. Ainsi,
                     l'étirement, et à un moindre
                     degré le bâillement, produiraient
                     en définitive une augmentation de la
                     circulation sanguine suffisante pour le maintien
                     de l'état de veille.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Citons encore, parmi les rôles
                     réactionnels du bâillement, cette
                     hypothèse rapporté par Heusner,
                     d'une sécrétion de thyroxine
                     commandée mécaniquement par
                     compression de la glande thyroïde lors du
                     bâillement.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - A côté de ces théories
                     résolument finalistes, certains auteurs
                     négligeant les conséquences
                     physiologiques du bâillement, le
                     considèrent comme un accident lié
                     pour Mayer à une expression de la fatigue
                     cérébrale comme le pleurer et le
                     rire sont l'expression du chagrin et de la
                     joie.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Pour Peiper, le bâillement est un
                     trouble transitoire des centres respiratoires,
                     la fatigue produisant une diminution de
                     l'excitabilité des centres respiratoires
                     supérieurs libérant ainsi les
                     centres sous-jacents du bâillement.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Ces théories, sans être
                     totalement contradictoires, font cependant appel
                     à des précisions physiologiques
                     invérifiées, comme par exemple
                     l'augmentation de la pression veineuse pendant
                     le bâillement, ou la diminution du
                     débit cérébral sanguin lors
                     de la chute de la vigilance. Elles laissent, par
                     contre, dans l'ombre certains aspects du
                     réflexe psycho-moteur qu'est le
                     bâillement.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Peut-on tenter à la lueur de nos
                     connaissances psycho-physiologiques actuelles,
                     de préciser les divers aspects du
                     mécanisme du bâillement, en
                     soulignant les lacunes qui devront
                     suggérer des expérimentations
                     ultérieures ?
 
                     
                     -  
 
                     
                     -  B. - Essai sur le
                     mécanisme du
                     bâillement
 
                     
                     -  
 
                     
                     - 1°) Le bâillement est un acte
                     respiratoire complexe, involontaire et
                     paroxystique. Sous l'effet d'un certain nombre
                     de facteurs, se déroule, toujours dans le
                     même ordre, une activité motrice
                     brève (4 à 7 secondes), mettant en
                     jeu un grand nombre de muscles
                     thoraco-cervico-faciaux. Ceci évoque une
                     activité critique se propageant de proche
                     en proche dans un circuit neuronal donné.
                     Connaissant les muscles qui participent au
                     bâillement, il est possible de
                     préciser que les noyaux moteurs
                     intéressés siègent dans le
                     bulbe et la moelle cervicale.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - On peut donc penser que la crise motrice que
                     représente le bâillement, est
                     liée à une décharge
                     paroxystique intéressant un certain
                     nombre de noyaux moteurs situés dans le
                     bulbe et la moelle cervicale haute. L'extension
                     de cette décharge aux noyaux des muscles
                     du tronc et des membres entraInant
                     l'étirement.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Il est difficile de préciser
                     davantage notamment s'il existe une
                     hiérarchie dans cette structure neuronale
                     qui permettrait de parler de « centre du
                     bâillement ».
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Par contre, il y a tout lieu de supposer que
                     cette structure contracte des rapports
                     étroits avec le système
                     réticulé ascendant et avec le
                     cortex cérébral.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - a) Le système réticulé
                     ascendant est une structure neuronale
                     étagée dans le tronc
                     cérébral et l'hypothalamus.
                     L'électrophysiologie a permis de montrer
                     quelle règle le degré de la
                     vigilance (découverte que l'on doit entre
                     autres à Magoun, Moruzzi, Jasper).
                     L'état d'alerte s'affaisse dans le
                     sommeil et les états pathologiques
                     apparentés somnolence, torpeur ne
                     disparaissant complètement que dans le
                     coma profond. Il s'exalte au contraire à
                     des degrés variables suivant
                     l'intensité des stimulations et sans
                     doute l'étendue des mécanismes
                     nerveux mis en action. Il n'est pas
                     nécessaire de souligner les liens entre
                     le bâillement et le sommeil, et nous
                     verrons le rôle important que l'on, peut
                     attribuer à ce système
                     régulateur de la vigilance dans la
                     genèse du bâillement.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - b) La participation du cortex cerebral
                     parait incontestable lorsque le bâillement
                     est le résultat d'activité
                     psychiques aussi complexes que l'imitation ou
                     l'ennui. Il n'est pas sans intérêt
                     à ce propos de rappeler les travaux de
                     French et coll. (1955) qui ont prouvé que
                     les afférences parties du cortex
                     retentissaient sur le système
                     réticulé ascendant.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - 2°) Si l'on s'en tient à cette
                     hypothèse qu'il conviendrait de
                     vérifier notamment par l'enregistrement
                     de l'activité neuronale des noyaux
                     moteurs mis en jeu dans le bâillement par
                     des électrodes intra-bulbaires (l'E.G.G.
                     simple ne pouvant donner aucun renseignement),
                     il faut répondre à la question
                     suivante
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Quels sont les facteurs responsables de
                     cette décharge paroxystique dans cette
                     structure motrice bulbo-médullaire ?
 
                     
                     -  
 
                     
                     - a) Les facteurs circulatoires et
                     humoraux
 
                     
                     -  
 
                     
                     - ils doivent être discutés en
                     premier car ce sont eux qui ont
                     été le plus souvent
                     avancés, cependant sans données
                     expérimentales précises.
 
                     
                     -  
 
                     
                     -  On a invoqué le rôle
                     possible d'une anoxie bulbaire ou de
                     modifications passagères du rapport
                     CO2/02. Ce mécanisme très
                     vraisemblable dans les lésions du tronc
                     cérébral est moins évident
                     lors du bâillement physiologique. Nous
                     manquons de données précises
                     à ce sujet, mais l'on peut observer que
                     l'apnée volontaire, même
                     prolongée, n'entraîne pas de
                     bâillements.
 
                     
                     -  
 
                     
                     -  Une variation de la circulation
                     cérébrale bulbaire qui aboutirait
                     aussi à une anoxie partielle n'est pas
                     plus démontrée, bien au contraire,
                     on connaît le rôle du nerf de
                     Héring et du sinus carotidien dans la
                     régulation de la circulation
                     encéphalique et la constance de celle-ci.
                     D'autre part, on n'observe pas de
                     bâillement lorsque la circulation
                     cérébrale est insuffisante comme
                     dans les accès paroxystiques de
                     bradycardie au cours du syndrome de
                     Stokes-Adam.
 
                     
                     -  
 
                     
                     -  Le rôle de modifications
                     humorales est aussi avancé par certains.
                     Le bâillement et la somnolence
                     post-prandiale étant mis sur le compte
                     dune vague d'alcalose ou dune décharge de
                     polypeptides ou de lipides, d'origine digestive
                     ou encore de métabolites
                     intermédiaires lors de la fatigue
                     musculaire. Cramer (1924) notant la
                     fréquence des bâillements chez les
                     colitiques, rendait responsable une
                     auto-intoxication par les toxines
                     bactériennes intestinales. En fait, pas
                     plus que l'on a réussi à
                     démontrer l'existence d'un facteur
                     hypnotique d'origine endogène, on n'a pu
                     faire la preuve d'une substance endogène
                     provoquant le bâillement.
 
                     
                     -  
 
                     
                     -  La pharmacodynamie nous fournit par
                     contre des drogues qui facilitent l'apparition
                     du bâillement et de la somnolence, telles
                     que la morphine et les hypnotiques. On
                     connaît par ailleurs l'action de ces
                     substances sur le système
                     réticulé ascendant qu'elles
                     dépriment alors que des drogues telles
                     que la caféine et les amphétamines
                     ont un effet inverse.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Ainsi, si le bâillement peut
                     être induit pharmacodynamiquement, on n'a
                     pas de preuve formelle sur le rôle des
                     perturbations circulatoires ou humorales dans la
                     genèse du bâillement. On doit
                     souligner que si de telles perturbations
                     existaient cependant, ce qui demeure possible et
                     qui doit fournir l'objet de recherches
                     ultérieures, elles ne pourraient avoir
                     qu'un rôle favorisant, leur durée
                     excédant nettement celle du
                     bâillement qui, par ailleurs peut, par
                     exemple dans le post-prondium, apparaître
                     ou non selon les conditions psychologiques
                     où se trouve le sujet.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - b) Rôle des stimulations
                     psycho-sensorielles
 
                     
                     -  
 
                     
                     - En dehors du bâillement par imitation,
                     dont nous avons discuté plus haut le
                     mécanisme sur lequel nous ne reviendrons
                     pas, le bâillement spontané est
                     aussi fortement influencé par
                     l'environnement, il en est de même pour le
                     sommeil et l'on connaît le rôle du
                     désintérêt dans la
                     genèse de ces deux
                     phénomènes.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Nous avons déjà insisté
                     sur le rôle de l'ennui et du
                     désintérêt comme causes
                     provoquantes du bâillement. A l'inverse,
                     on ne bâille pas et, si l'on somnolait, on
                     se réveille quand survient brutalement un
                     fait nuveau, stimulation physique ou choc
                     affectif qui relance l'attention. A-t-on jamais
                     vu quelqu'un bâiller au moment où
                     il apprend le résultats d'un examen
                     important ou la nouvelle d'un accident grave
                     survenu à un proche ? Le bâillement
                     ne survient que dans des conditions
                     psychologiques d'indifférence, de
                     désafférence avec
                     l'entourage.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Connaissant le rôle du système
                     réticulé ascendant dans le
                     mécanisme de la vigilance, nous formulons
                     l'hypothèse suivante : Le
                     bâillement est une décharge dans
                     une structure motrice
                     bulbo-cérébrale,
                     déclenchée par un état
                     d'excitabilité particulière du
                     système réticulé ascendant
                     correspondant à une baisse de la
                     vigilance précédant l'état
                     de sommeil.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Cette hypothèse qui s'accorde avec
                     les constatations neurophysiologiques et
                     pharmacodynomiques explique que le
                     bâillement puisse s'observer lors de
                     l'endormissement comme lors du réveil.
                     Dans notre conception, le bâillement
                     apparaît comme une manifestation physique
                     d'une baisse de la vigilance. L'on peut
                     rapprocher cette crise motrice paroxystique de
                     l'hypotonie musculaire observée pendant
                     le sommeil. Il exprime un état et ne
                     constitue pas un mode réactionnel contre
                     cet état. Il n'aurait donc pas de
                     rôle physiologique. Le bâillement,
                     on le sait, en effet, entraîne le
                     bâillement, et non pas un regain
                     d'intérêt. Nous pensons qu'il faut,
                     à cet égard, séparer le
                     bâillement de l'étirement, celuici
                     ayant peut-être une action de «mise
                     en train» quil faudrait
                     préciser.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Sans utilité physiologique, le
                     bâillement a néanmoins une
                     signification ; il traduit un état de
                     désintérêt. Or, cette
                     conception psycho-physiologique appelle certains
                     développements sur la
                     phénomènologie et la valeur
                     sociale du bâillement.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Dans la mesure, en effet, où il
                     reflète le désintérêt
                     et l'ennui, le bâillement a un valeur
                     mimique expressive. L'intérêt, et
                     partant le désintérêt que
                     nous avons pour l'environnement,
                     dépendent certes des conditions
                     immédiates de cet environnement.
                     L'intérêt d'un sujet sera
                     très diversement éveillé
                     suivant qu'il sera dans le calme,
                     l'obscurité, le silence ou qu'au
                     contraire il subira des stimulations sensitives
                     ou psychiques vivaces. Cependant, son
                     intérêt va dépendre aussi,
                     et pour une part non négligeable, de sa
                     personnalité et de ses acquisitions
                     antérieures, quelques exemples
                     illustreront cette thèse : un
                     collectionneur portera un intérêt
                     tout particulier à des spécimens
                     qui lasseront vite le profane. Il en est de
                     même d'une conversation sur un sujet
                     spécialisé peu connu ou à
                     propos d'un tiers que l'on ne connaît pas.
                     L'intérêt est conditionné
                     par notre formation familiale, scolaire,
                     professionnelle, sociale, linguistique (le fait
                     de ne pas comprendre une conversation
                     étrangère amène à
                     s'en désintéresser), affective,
                     etc.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - L'on peut prévoir dans une certaine
                     mesure ce qui plaira ou ennuira tel sujet, ses
                     gots représentant
                     précisément la gamme de ses
                     intérêts.
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Ces liens intimes entre
                     l'intérêt et la personnalité
                     expliquent la valeur expressive du
                     bâillement, marquant le détachement
                     et l'ennui. Le bâillement est à
                     l'ennui ce que l'expression motrice du rire et
                     du pleurer est à la joie et au chagrin.
                     L'on peut du reste moduler la valeur expressive
                     du bâillement. En le réprimant, ne
                     traduit-on pas notre désir, souvent
                     à moitié conscient, de cacher
                     notre ennui ? En exagérant dans certaines
                     circonstances, en le rendant
                     particulièrement bruyant ou
                     prolongé, ne lui confère-t-on pas
                     également une valeur
                     démonstratrice et ne traduit-il pas sous
                     cette forme non équivoque, notre refus
                     voire de notre agressivité envers la
                     situation qui a cessé de nous attirer ou
                     un interlocuteur qui nous lasse ?
 
                     
                     -  
 
                     
                     - Le fait qu'il soit séant de mettre la
                     main devant sa bouche quand on bâille,
                     c'est-à-dire de dissimuler le
                     bâillement, appris dès l'enfance et
                     qui devient automatique, au point de
                     s'intégrer dans le complexe moteur du
                     bâillement, apparaît ainsi comme une
                     reconnaissance implicite de la signification
                     sociale de cette mimique exprimant l'ennui, le
                     refus, et qu'il convient de masquer.
 
                     
                     -  
 
                   
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